Le secteur de la Tech en Chine a traversé une année 2021 tumultueuse, entre répression des géants du numérique comme Alibaba, Tencent, Didi et sanctions américaines. Pourtant, le Wall Street Journal relève des niveaux d’investissements records dans l’Empire du Milieu traduisant une réorientation stratégique des autorités dans le domaine.

En 2021, en Chine, les services internet ont été malmenés

129 milliards de dollars investis dans plus de 5 300 startup en 2021, selon la base de données d’investissement Preqin qui suit les opérations en capital-risque en Chine, il s’agit d’un record. Le précédent sommet atteint était de 115 milliards de dollars en 2018. Avec une base plus large, incluant les financements par capital-investissement, le nombre atteint 165 milliards de dollars sur les trois premiers trimestres de 2021 selon la base de données PE Data, propriété de Zero2Ipo. Les résultats complets pourraient surpasser le record de 190 milliards de dollars atteint en 2017.

Ces données peuvent sembler paradoxales. Lorsque le secteur de la Tech chinois est évoqué en 2021, il l’a surtout été pour l’apparition de nouvelles réglementations limitant l’activité des géants numériques chinois. Amende antitrust record contre Alibaba, contrôle de l’exploitation des données avec le PIPL, entraînant des suspensions de centaines d’applications, mise en péril de l’introduction en Bourse de Didi à New York

Le secteur a également été agité par des éléments exogènes. La guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine, entamée par les premiers en 2019 contre la domination de Huawei sur le marché de la 5G, a suivi son cours. Des dizaines d’entreprises et de startup ont été placées sur liste noire pour contenir les progrès technologiques chinois. La liste noire américaine rime avec interdiction d’accès aux équipements, licences et capitaux américains.

2021 a bel et bien coûté cher aux géants chinois. Les cours de Bourse d’Alibaba, Tencent et d’autres se sont effondrés engendrant des pertes de valeurs se comptant en milliards de dollars. Pékin semble en avoir cure. La période faste de 2016 à 2020 où l’émergence de services internet chinois était une priorité est close.

La « hard Tech » enjeu de sécurité nationale pour Pékin

Pour la Chine ces derniers ne sont plus des priorités nationales, le nouveau plan quinquennal sur le développement technologique du pays s’intéresse à d’autres domaines, ceux dits de la « hard Tech ». Semi-conducteurs, biotechnologies, technologies de l’information sont désormais privilégiés. Les dépenses en recherche et développement de ces secteurs doivent augmenter de 7% par an, c’est plus que pour l’Armée populaire de Chine.

Les puces, l’intelligence artificielle, l’informatique quantique, les logiciels, ces domaines technologiques de pointes sont devenus des enjeux de sécurité nationale. La Chine compte bien surpasser les États-Unis dans l’IA et le quantique. Une perspective qui ne manque pas d’inquiéter à Washington. Pour les semi-conducteurs l’enjeu est celui de la souveraineté de l’Empire du Milieu. Pékin est le plus grand importateur de puces au monde, le pays en achète davantage que du pétrole.

Une situation problématique mise en exergue par la pénurie mondiale de semi-conducteurs et le conflit avec les États-Unis. Cette faiblesse de la Chine est très bien identifiée à Washington. L’administration Biden s’efforce de limiter les exportations des puces les plus perfectionnées de l’autre côté du Pacifique.

Les investisseurs suivent

Les investisseurs ont tendance à suivre la politique publique chinoise selon le Wall Street Journal. Les investissements dans le secteur d’internet sont tombés à la 4e position en termes d’attrait en 2021 avec 20 milliards de financements. Selon PE Data, celui des semi-conducteurs atteint 30 milliards de dollars.

Le secteur de la « hard Tech » est généralement plus long à dégager des bénéfices, mais une fois à maturité, les retours sur investissements sont là. La Chine s’efforce de l’épauler. La bourse de Pékin, lancée en novembre, favorise les petites entreprises en technologies avancées. Le STAR Market, le Nasdaq de la Bourse de Shanghai, a revu ses règles pour favoriser la cotation des entreprises de Hard Tech.

La Chine a encore du chemin pour atteindre son autonomie en matière de semi-conducteurs. La bataille avec les États-Unis pour l’IA, la suprématie quantique et les biotechnologies s’annonce, elle, acharnée. L’année 2021 a démontré que la Chine était capable de mettre en œuvre de gros moyens pour parvenir à ses fins, en particulier dans le secteur des nouvelles technologies.