Thales Alenia Space a connu une année 2022 particulièrement réussie. Se hissant à la première place du marché des satellites de télécommunications pour la deuxième année consécutive, l’entreprise franco-italienne est l’un des acteurs forts du spatial européen. Aujourd’hui, Siècle Digital s’intéresse aux solutions, technologies et projets de Thales Alenia Space, dont les applications s’étendent à plusieurs marchés.

Leader des satellites de télécommunications

Société commune entre Thales, géant français de l’électronique, et Leonardo, second groupe industriel italien, Thales Alenia Space a été fondée en 2007. En 2021, elle a enregistré un chiffre d’affaires de 2,140 milliards d’euros et emploie plus de 8 000 personnes réparties dans dix pays différents. L’entreprise explique dans un communiqué « avoir la conviction que l’espace apporte une nouvelle dimension à l’humanité pour bâtir une vie meilleure et durable sur Terre ». Dans cette optique, ses équipes « conçoivent et délivrent des solutions innovantes pour les télécommunications, la navigation, l’observation de la Terre et la gestion de l’environnement, l’exploration, les sciences et les infrastructures orbitales », précise-t-elle.

Les systèmes satellitaires proposés par Thales Alenia Space sont très convoités par les institutions, les gouvernements et les entreprises : sur les dix contrats octroyés par des opérateurs pour des satellites de télécommunications géostationnaires attribués en 2022, l’entreprise en a remporté six, la positionnant en tête du secteur. Par ailleurs, « douze lancements clefs embarquant les technologies Thales Alenia Space » ont eu lieu l’année dernière, « pour des missions emblématiques, notamment au service de la connectivité et du climat ».

L’évolution rapide du secteur spatial a généré de profondes mutations dans le domaine des télécommunications, avec des clients confrontés à la nécessité de développer des services de pointe et de saisir de nouvelles opportunités commerciales.

Des satellites reconfigurables à souhait

Avec sa nouvelle plateforme Space Inspire (INstant SPace In-orbit REconfiguration), Thales Alenia Space répond à ces nouveaux enjeux. Les satellites issus de cette ligne de produits sont définis par logiciel et entièrement reconfigurables : à tout moment, n’importe où et quelle que soit la forme d’onde, les opérateurs peuvent lui attribuer de nouvelles capacités.

La gamme Space Inspire vient s’ajouter aux autres offres de la société, à savoir la plateforme entièrement électrique Spacebus NEO qui fournit des solutions numériques et très haut débit, ainsi que la solution régionale Spacebus 4000 B2. Thales Alenia Space offre en outre la possibilité d’ajouter une charge utile à la plateforme Space Inspire, ce qui la rend plus flexible. Cette technologie est particulièrement appréciée : sur les six contrats remportés par l’entreprise, cinq intègrent Space Inspire. La ligne de produits a été choisie par des leaders du marché des satellites de télécommunications, à l’instar d’Eutelsat, d’Intelsat ou encore de SES.

Si la firme est aussi performante dans ce domaine, c’est parce qu’elle maîtrise le « Digital Transparent Processor » (DTP), un équipement clé pour les satellites définis par logiciel. Il assure l’aiguillage et la redistribution des signaux entre les faisceaux de manière flexible et donc reconfigurable. En général, ses concurrents sous-traitent cette activité ; Thales Alenia Space en est, elle, déjà à la sixième génération de ce processeur ultra puissant.

Un satellite de la gamme Space Inspire.

Le satellite FlexSAT, basé sur Space Inspire. Image : Thales Alenia Space.

Thales Alenia Space au service du spatial européen

L’Union européenne a récemment accordé un budget de 16,9 milliards de dollars à l’Agence spatiale européenne (ESA) pour les trois prochaines années, soit une hausse de 17 % par rapport à la somme allouée en 2019. Une bonne nouvelle pour l’agence, dont Thales Alenia Space est partenaire sur de nombreuses missions différentes.

Par exemple, l’entreprise est impliquée dans le développement de cinq des six missions de Copernicus Expansion, la nouvelle génération de satellites du programme d’observation de la Terre de la Commission européenne et de l’Agence spatiale européenne (ESA). Elle sera le maître d’œuvre pour trois d’entre elles (CIMR, ROSE-L et CHIME) et fournira les charges utiles pour les deux autres (CO2M et CRISTAL). Ces nouveaux satellites permettront notamment de mesurer les émissions de dioxyde de carbone atmosphériques produites par l’activité humaine, de contrôler l’épaisseur de la banquise et de la neige la recouvrant et de soutenir de nouveaux services optimisés de gestion durable de l’agriculture et de la biodiversité.

Thales Alenia Space possède également un rôle essentiel dans Galileo, le système européen de navigation par satellite (GNSS), l’équivalent du GPS américain. En 2022, elle a intégré « un nouveau satellite au segment sol de mission GMS (Ground Mission Segment) de Galileo, qui permettra d’améliorer le service de positionnement au profit de 3,3 milliards d’utilisateurs ».

Dans les années à venir, l’entreprise va poursuivre, pour le compte de l’Union européenne, le développement de six satellites faisant partie de la deuxième génération de la constellation Galileo. Les premiers engins, dotés de technologies d’avant-garde, seront placés en orbite d’ici la fin de l’année 2024. Ils permettront d’améliorer la précision du système Galileo, ainsi que sa robustesse face aux interférences et au brouillage.

Thales Alenia Space co-développe en outre Space Rider, une mini-navette spatiale automatisée et réutilisable qui offrira à l’Europe la capacité d’accéder régulièrement à l’orbite terrestre basse et d’en revenir pour accomplir un large éventail de missions. Elle va par ailleurs s’occuper de la production de la chaîne de sauvegarde de la fusée Ariane 6, le système qui permet de neutraliser le lanceur dans le cas où la trajectoire suivie mettrait en péril des personnes ou des biens.

Aussi, la société vient d’être sélectionnée en tant que maître d’œuvre du projet TeQuantS1, qui vise à développer les technologies de communications quantiques entre l’espace et la Terre. Celui-ci s’inscrit dans le cadre du programme de recherche ARTES de l’ESA, dont l’objectif est de maintenir l’industrie européenne à la pointe du marché très concurrentiel des satellites de télécommunications.

Son rôle dans le programme Artemis de la NASA

2022 est une année à marquer au fer rouge pour le secteur spatial, notamment avec le succès de la mission Artemis I, la première étape du programme du même nom qui verra l’être humain retourner sur la Lune et s’y installer de manière permanente. Thales Alenia Space a participé à la conception du Module de service européen (ESM) du vaisseau spatial Orion, qui a fait ses preuves lors de la mission et dans lequel séjourneront les astronautes. L’ESM assurera les fonctions essentielles de la capsule, telles que le système de propulsion jusqu’à la Lune, ainsi que « tout ce qui est nécessaire à la survie des astronautes », explique l’ESA. Le prochain vol d’Orion, propulsé par le lanceur SLS, est pour l’instant prévu en 2024.

En plus de son travail sur ce module, l’entreprise fait aussi figure de partenaire industriel de premier ordre pour la station Lunar Gateway, qui sera en orbite autour de la Lune. Elle sera chargée du développement du module d’habitation international I-HAB, future base de vie européenne en orbite lunaire, ainsi que du module ESPRIT. Celui-ci aura pour mission de transporter des marchandises vers la station, de servir d’espace de stockage une fois amarré à celle-ci, de fournir du carburant à son système de propulsion, et offrira également une vue spectaculaire de l’espace et de la Lune à travers ses fenêtres.

Pour le concevoir, Thales Alenia Space peut se baser sur son expérience dans le domaine puisqu’elle est à l’origine de la célèbre coupole de la Station Spatiale internationale, qui offre une vue panoramique sur la Terre grâce à ses six hublots. Enfin, la société se chargera également du module logistique et d’habitation HALO pour le compte de l’entreprise américaine Northrop Grumman. Il offrira le premier espace de vie de Lunar Gateway et servira de base pour les missions avec équipage à la surface de la Lune.

Thales Alenia Space cultive l’approche « New Space »

L’orbite terrestre basse va de plus en plus être exploitée de manière commerciale, et va donc offrir de nouvelles opportunités pour différentes industries. Thales Alenia Space veut capitaliser sur cette tendance et livrera, en 2024 et 2025, les deux premiers modules pressurisés de la station spatiale Axiom, première infrastructure orbitale commerciale au monde. Ils seront arrimés dans un premier temps à la Station spatiale internationale (ISS) et lorsque celle-ci sera officiellement mise hors service, les modules s’en détacheront pour devenir une station spatiale commerciale. Elle « accueillera des personnes, des activités de recherche et de fabrication qui conduiront au développement de nombreuses industries en utilisant des techniques qui ne sont disponibles qu’en microgravité », explique Axiom Space sur son site Internet.

Toujours dans une logique de commercialisation de l’orbite basse, Thales Alenia Space a signé, fin 2022, un contrat portant sur la première phase de conception et de production du véhicule REV1, considéré comme la première usine flottante de l’espace. Ce véhicule pressurisé « sera utilisé pour des missions spécifiques, en particulier dans les domaines de la biotechnologie, des produits pharmaceutiques, de l’agriculture et des nouveaux matériaux. REV1 sera capable de créer des conditions uniques de laboratoires », détaille Thales Alenia Space. Sa mise en service est prévue pour 2025.

« Ce contrat reflète pleinement l’approche “New Space” de Thales Alenia Space, qui consiste notamment à créer de plus en plus de synergies avec des start-ups et à proposer des solutions disruptives », explique l’entreprise. Avec l’entreprise QinetiQ, Thales Alenia Space va aussi ouvrir la voie aux nanosatellites multimissions en très basse orbite terrestre. Elle a ainsi signé un contrat d’étude avec l’ESA pour Skimsat, un concept visant à réduire le coût des satellites d’observation de la Terre.

En amont, la firme souhaite développer des solutions durables pour exploiter l’espace. Elle conçoit ainsi des missions intelligentes destinées à soutenir l’exploitation des satellites directement en orbite, afin d’étendre leur durée de vie opérationnelle, de limiter les débris spatiaux et de mieux gérer les flottes actuelles et futures. Dans cette optique, Thales Alenia Space et ses partenaires mènent le programme EROSS IOD pour la Commission européenne. Il a pour objectif de valider, au travers d’une première mission européenne de démonstration prévue d’ici à 2026, les technologies nécessaires aux futures opérations robotisées d’assistance en orbite, telles que le rendez-vous, la capture, l’arrimage, le ravitaillement et l’échange de charges utiles d’un satellite.

Le véhicule spatial REV1.

Le vaisseau REV1. Image : Thales Alenia Space.

Un secteur en plein boom

Selon le cabinet d’analyse ABI Research, le marché mondial des services de communication par satellite devrait atteindre la somme de 141 milliards de dollars d’ici à 2030, ce qui devrait profiter au leader du secteur. Par ailleurs, les ambitions grandissantes de l’Union européenne dans le spatial vont permettre aux entreprises locales de se développer encore davantage et d’innover. Thales Alenia Space jouera un rôle dans les nouvelles initiatives de l’UE, à l’image de la constellation Iris2, qui vise à renforcer la souveraineté et le leadership de l’Europe en matière de connectivité sécurisée.

L’espace est un enjeu stratégique mondial qui a son rôle à jouer dans tous les domaines d’applications, que ce soit pour faire face aux enjeux de souveraineté, de sécurité, de besoin en connectivité ou de protection de l’environnement. Mettant en avant des années d’expérience l’ayant faite participer à des programmes spatiaux et missions clés, Thales Alenia Space propose des solutions dans chacun de ces domaines et compte bien capitaliser et participer à la mutation du secteur spatial.