C’est un petit événement pour le secteur numérique chinois. Tencent, le groupe le plus puissant du pays, a annoncé le 17 août une baisse de son chiffre d’affaires au second trimestre 2022 par rapport à l’année précédente. Il s’agit d’une première depuis l’introduction en Bourse de l’entreprise en 2004.

La fin de la croissance infinie pour la Tech chinoise

Depuis 2004 la croissance de Tencent s’écrivait avec deux voire trois chiffres. Cette formidable ascension s’est ralentie au dernier trimestre 2021, en pleine période de répression des géants numériques par la Chine. Entre avril et juin 2022, le chiffre d’affaires du groupe a baissé de 3 % pour s’établir à 19,78 milliards de dollars.

La chute des bénéfices est encore plus marquante, puisqu’elle est de 56 %, toujours par rapport au second trimestre de 2021. Ils atteignent 2,8 milliards de dollars. Pour la première fois depuis 2014 Tencent est contraint de licencier. Environ 5 500 employés vont perdre leur emploi sur un total de 116 000.

L’autre géant de la Tech chinoise, Alibaba, a également enregistré une baisse de revenus. Plus anecdotique, 0,1 %, mais tout aussi symbolique. Pour le Wall Street Journal une ère de croissance sans faille s’achève pour les grands groupes numériques chinois.

Cette situation s’explique par plusieurs facteurs. D’une part l’économie en Chine, connaît un ralentissement généralisé. Au second trimestre, la croissance du produit intérieur brut est limitée à 0,4 %. La politique zéro-covid de Pékin a beaucoup joué dans cette situation, entraînant la paralysie de toute activité dans de nombreuses villes, dont Shanghaï l’un des pôles économiques les plus importants du pays ou Shenzen, la ville de Tencent.

Déjà évoquée, l’activité de Tencent a aussi, et peut-être surtout, été affectée par la répression du régime contre ses géants du web, qui dure depuis plus d’un an et demi. L’une des activités principales de Tencent a été touchée de plein fouet, le jeu vidéo.

Tencent encore entravée par Pékin

L’entreprise la plus puissante dans le domaine a dû faire face à plusieurs réglementations entravant son expansion. Les autorités ont tout d’abord fortement limité le temps de jeux des mineurs. Ces derniers n’ont droit qu’à 3 heures de jeux en ligne par semaine sur des créneaux prédéfinis depuis l’été 2021.

À la même période, Pékin a complètement stoppé l’octroi d’autorisation pour la sortie de nouveaux jeux jusqu’en avril 2022. Cet assouplissement n’a pas profité à Tencent ni à son petit concurrent NetEase, aucun de leurs jeux n’a été approuvé depuis.

Sans nouveauté, même les licences phares comme PUBG Mobile ou Honor of Kings, finissent par s’essouffler. En conséquence les revenus de l’entreprise ont baissé de 1 %. Ceux au niveau national représentent 4,7 milliards de dollars, à l’international ils atteignent 1,58 milliard. Martin Lau, président de Tencent, a affirmé lors d’une conférence téléphonique qu’il s’attendait à obtenir une autorisation des autorités dans « un avenir proche ».

L’activité publicitaire de Tencent est la plus touchée par le marasme économique ambiant. Les annonceurs ont tendance à être plus près de leurs sous et cela se ressent avec une baisse de revenus de 18 %, à 2,74 milliards de dollars. Tencent mise sur sa nouvelle plateforme de vidéo courte, intégré à son réseau social dépassant le milliard d’abonnés, WeChat, pour générer rapidement de nouveaux revenus. L’entreprise a décidé d’aller chasser sur les plates-bandes de ByteDance et de Douyin, le pendant chinois de TikTok.

La direction du groupe tente de rassurer

La catégorie FinTech et Business agrégeant les revenus de WeChat Pay et du cloud computing affiche une croissance en baisse, à 1 %. Elle génère 6,22 milliards de chiffres d’affaires. Tencent rapporte que « La croissance des revenus des services FinTech a été plus lente par rapport aux trimestres précédents, car la résurgence du COVID-19 a temporairement affecté les activités de paiement commercial en avril et mai ».

Pony Ma, PDG et fondateur de Tencent a tenté de rassurer les investisseurs. Il a insisté sur les mesures prises par son entreprise face à cette situation délicate, « nous avons activement abandonné les activités non essentielles, resserrées nos dépenses de marketing et réduit les dépenses d’exploitation ». Les activités éducation en ligne et certaines parties du cloud jugé non rentable en ont fait les frais. Pony Ma estime que ces décisions permettront à la croissance de faire son retour, même si les revenus du groupe n’évoluent pas dans le bon sens.