S’appuyant sur la formation d’une nouvelle entité, Ant Group, la filiale financière d’Alibaba, modifie ses conditions d’octroi de prêts. D’après le Wall Street Journal, le 3 juin 2021, la Commission de réglementation des banques et des assurances chinoise (CBIRC) a donné à Ant Group son aval pour la création d’une nouvelle structure.

Cette décision de la CBIRC incarne la première étape de la restructuration demandée par Pékin en décembre 2020. À cette date, le groupe avait été sommé de revoir ses services de prêts, d’assurances et de gestion du patrimoine. Par ailleurs, en janvier 2021, une enquête sur la concurrence a visé Ant. Si dans un premier temps, Ant avait annoncé le retrait de certains de ses services pour se conformer aux demandes de son gouvernement, en avril une restructuration supervisée par la banque centrale chinoise a été annoncée. La création de cette nouvelle fintech s’inscrit dans ces démarches.

À l’actionnariat de la nouvelle filiale d’Ant se trouvent des banques traditionnelles

La nouvelle filiale d’Ant est baptisée Chongqing Ant Consumer Finance Co. Elle sera détenue à 50% par Ant Group. Le reste des parts est réparti entre 6 actionnaires. Parmi eux, la Nanyang Commercial Bank, une filiale rattachée à une banque publique, possède 15,01% des actions. L’entreprise de gestion d’actifs China Huarong détient 4,99% des parts. Acteur éloigné du secteur bancaire, l’entreprise de production de batteries de lithium pour les véhicules électriques, Contemporary Amperex Technology, participe à l’actionnariat à hauteur de 8%.

Les quelque 20% restants sont répartis entre une filiale d’une banque taïwanaise implantée en Chine continentale, une entreprise de services de transports et de surveillance, et un fabricant d’appareils médicaux. Alibaba, le groupe auquel Ant est rattaché, possède une participation minoritaire dans l’entreprise de transports et de surveillance.

Basée au sud-ouest de la Chine à Chongqing, la nouvelle entreprise récupère certains services d’Ant. Notamment les offres de prêts Huabei et Jiebei, utilisés par un demi-milliard de personnes en Chine. Huabei signifie « dépenser simplement » et fonctionne sous le modèle d’une carte de crédit virtuelle. Jiebei se traduit par « il suffit d’emprunter » et propose des prêts à la consommation sur une durée maximale de 12 mois.

Lors de l’octroi d’un prêt, davantage de risques reposent désormais sur Chongqing Ant

Chongqing Ant vise à « répondre aux besoins des consommateurs pour continuer à améliorer la qualité des services financiers et les capacités de gestion des risques », affirme Ant Group. L’objectif est d’inscrire davantage les activités d’Ant sur le modèle des banques traditionnelles.

Dorénavant, l’entreprise emprunte de l’argent aux institutions financières et paie les prêts qu’elle accorde. Dans certains cas, en s’appuyant sur des traitements de données, Chongqing Ant orientera les consommateurs vers des banques traditionnelles. Par ailleurs, des prêts communs à la fintech et à des banques vont également voir le jour. Dans ce cas, la fintech apportera 30% des fonds. Ces co-prêts seront comptés dans les offres Huabei et Jiebei.

Auparavant, la branche financière de l’empire de Jack Ma s’appuyait sur une stratégie lucrative comprenant peu de risques : se positionner en intermédiaire entre les banques et les clients. Ant n’octroyait donc pas de prêt et se rémunérait avec des commissions pour la mise en relation du consommateur avec la banque. Étant donné que l’attribution du prêt venait de la banque, les risques y étant liés, comme un impayé, reposaient sur l’institution financière accordant le prêt. Ils demeuraient donc très limités pour Ant. En juin 2020, près de 271 milliards de dollars de prêts transitaient par Ant. Une situation représentant un risque pour la vitalité du secteur bancaire chinois.

La collecte et le traitement de données personnelles font également partie intégrante du modèle économique de la branche financière d’Alibaba, ce qui intéresse d’ailleurs grandement le gouvernement chinois.