Alors que de nombreuses entreprises technologiques un peu partout dans le monde s’immiscent dans le marché de l’intelligence artificielle générative, l’Inde ne semble pas vouloir manquer le coche. Néanmoins, dans cette course effrénée, l’écosystème technologique du pays le plus peuplé du monde va devoir jouer des coudes afin de rattraper les leaders mondiaux en la matière.

L’Inde ne tente pas de faire face aux géants de l’IA alors qu’elle aurait les moyens d’y parvenir

Pour l’heure, aucune entreprise indienne n’a pris le lead afin de contester la domination des entreprises spécialisées dans l’IA générative. Selon les propos des analystes de Sanford C. Bernstein recueillis par TechCrunch, « l’Inde est toujours en train de perdre la bataille de l’innovation en IA, alors qu’il existe plus de 1 500 start-up spécialisées dans l’intelligence artificielle qui ont réussi à lever plus de 4 milliards de dollars de financement ».

En novembre 2022, OpenAI proposait ChatGPT, son agent conversationnel basé sur une version améliorée de son modèle de langage GPT-3. La sortie de cet outil peut être considérée comme l’évènement majeur ayant lancé l’engouement autour de l’IA générative. Tout d’abord, c’est Microsoft qui a renforcé son partenariat avec OpenAI pour utiliser ses solutions dans ses propres outils, à l’instar de son moteur de recherche Bing.

De la même manière, Google avait lancé une alerte rouge et mobilisé toutes ses équipes R&D pour mettre au point Bard, une IA équivalente à ChatGPT et basée sur LaMDA, le modèle de langage de la firme de Mountain View. Enfin, même Elon Musk a investi des millions de dollars dans un projet d’intelligence artificielle générative sur Twitter.

La main-d’œuvre indienne manquerait malgré tout de compétences

Toujours selon les analystes de Bernstein, les start-up spécialisées en IA sont confrontées à une pénurie des talents et des compétences. Ils précisent que « parmi les 5 millions d’employés du secteur, l’informatique en Inde compte toujours un grand nombre d’employés de bas de gamme comme le BPO ou la maintenance du système ».

Composition des types d'employés dans les principales entreprises technologiques indiennes.

La part des employés peu, moyennement et hautement qualifiés au sein des entreprises TCS, Infosys, Wipro et HCL. Graphique : Sanford C. Bernstein.

En Inde, cette forte concentration de travailleurs peu qualifiée peut être vue comme un frein à la transformation des entreprises. Dans le secteur agricole ou de l’industrie manufacturière, plus de 40 % des employés ne sont pas diplômés. Il est difficile pour le pays de les mettre au chômage, sous prétexte qu’il est possible d’automatiser les tâches qu’ils réalisent au quotidien.

Avec le déploiement de l’IA, le marché de l’emploi dans de nombreux secteurs d’activité pourrait être perturbé. Toutefois, les spécialistes affirment qu’avec une mise à niveau rapide des compétences et une optimisation des ressources, l’Inde aurait toutes les clés pour propulser un ou plusieurs de ses acteurs technologiques au sommet de l’intelligence artificielle, et de sa branche générative.

Les géants technologiques indiens tentent quelques incursions dans l’IA générative

Les géants technologiques en Inde en sont d’ailleurs conscients. En avril dernier, Infosys, entreprise indienne spécialisée en services numériques (ESN), a annoncé qu’elle travaillait sur plusieurs projets d’IA générative pour traiter des tâches spécifiques liées à l’activité de ses clients. TCS qui est également une ESN, explorerait des solutions intersectorielles afin de créer des solutions Low-Code/No-Code grâce à l’IA générative.

Pour soutenir les entreprises qui souhaitent faire ce type d’incursion au sein de l’IA générative, le gouvernement indien a d’ores et déjà annoncé qu’il ne réglementerait pas le secteur, du moins pour l’instant. Cette stratégie diffère de celle adoptée par l’Union européenne, ou des deux superpuissances chinoise et états-unienne qui réfléchissent à réglementer l’intelligence artificielle générative, mais qui sont bien plus avancés en la matière que l’Inde.

Rajeev Chandrasekhar, ministère indien de l’électronique et de l’informatique, a déclaré que « L’IA était un catalyseur cinétique de l’économie numérique et de l’écosystème de l’innovation. Le gouvernement souhaitait exploiter le potentiel de l’IA pour fournir des services personnalisés et interactifs centrés sur les citoyens via des plateformes publiques numériques ». Pour l’heure, il est impossible de dire que l’Inde s’est concrètement lancé dans la course dans l’IA générative. Néanmoins, tout laisserait à croire qu’un effort conjoint des start-up, des géants technologiques et des instances publiques permettrait à l’Inde d’être un des leaders de cette technologie.