Les autorités européennes et australiennes ont partagé leurs critiques à l’encontre de X, anciennement Twitter. Chacune fait état d’une situation délétère au sein de la plateforme, qui fait déjà l’objet d’une enquête formelle en vertu du Digital Services Act (DSA).

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L’investigation, la première réalisée dans le cadre de la nouvelle législation européenne, porte « sur le respect par X des obligations du DSA concernant la lutte contre la diffusion et l’amplification de contenus illégaux et la désinformation dans l’UE, la transparence des plateformes et la conception de l’interface utilisateur », a détaillé Thierry Breton, commissaire européen au marché intérieur.

Ce mercredi 10 janvier, la Commission européenne a publié ses griefs à l’encontre du réseau social, racheté par Elon Musk en octobre 2022. Les reproches concernent une bonne partie des mesures décidées par le milliardaire depuis qu’il a repris les rênes. De manière générale, X « a échoué à mettre en place des mesures de contrôle proportionnées et efficaces » du contenu haineux, estime le régulateur.

Il dénonce en outre les modifications apportées au système de vérification, mis de côté au profit de l’abonnement X Premium, qui octroie le badge de certification à tous les abonnés payants. Un dispositif qui « semble conçu […] pour tromper ou influencer les utilisateurs de X […] et limiter leur capacité à prendre des décisions libres et informées ».

Côté modération, les Community Notes, qui permettent à tous les utilisateurs d’apporter du contexte aux publications jugées incomplètes ou fausses, sont également remises en question par la Commission. De même, X ne prendrait pas assez en compte les spécificités linguistiques des pays non anglophones, en plus de manquer de réactivité pour agir suite à des signalements.

Un avis partagé par eSafety, le régulateur numérique de l’Australie. En vertu de la loi sur la sécurité en ligne, l’agence a publié les réponses de la plateforme à une série de questions portant sur ses efforts de modération. On apprend que depuis l’acquisition de Musk, X a licencié plus de 1 200 modérateurs, notamment des sous-traitants. Si l’entreprise a par la suite embauché de nouvelles personnes, car elle compte désormais 2 300 modérateurs sous-traitants contre 2 600 avant le rachat, elle a mené des coupes claires en se séparant de 80 % des ingénieurs évoluant dans cette division.

« La pire des situations »

« Retirer 80 % de ces ingénieurs spécialisés, c’est comme si Volvo, réputé pour ses normes de sécurité, se séparait de tous ses concepteurs ou ingénieurs », condamne Julie Inman Grant, commissaire d’eSafety et ancienne employée de Twitter. Selon elle, la réduction des équipes de modération, couplée au rétablissement de nombreux comptes suspendus pour contenu haineux ou désinformation, ont engendré « la pire des situations ».

Les régulateurs mettent X en garde depuis de nombreux mois. L’Union européenne (UE) a expressément demandé à la plateforme d’embaucher davantage de modérateurs, tandis que Thierry Breton a échangé à plusieurs reprises avec Elon Musk sur le sujet. Dans le cadre du DSA, X s’expose à une amende équivalente à 6 % de son chiffre d’affaires mondial.