L’Union européenne (UE) exhorte Twitter d’embaucher davantage de modérateurs, alors que l’entrée en vigueur du Digital Services Act (DSA) approche à grands pas.

De nombreux modérateurs de Twitter licenciés

Ce texte obligera les grandes plateformes technologiques à appliquer une modération bien plus agressive pour détecter les contenus illégaux ou la désinformation. Les entreprises ne respectant pas le DSA s’exposeront à des amendes pouvant aller jusqu’à 6 % de leur chiffre d’affaires global, elles ont jusqu’à septembre pour se préparer.


Twitter ne semble toujours pas prête pour l’entrée en vigueur de cette législation pionnière. Elon Musk, qui a racheté la société en octobre dernier pour 44 milliards de dollars, a en effet procédé à d’importantes vagues de licenciements, réduisant ses effectifs de plus de moitié. Les modérateurs du réseau social ont particulièrement été touchés. Depuis ces licenciements massifs, de nombreux analystes ont constaté une recrudescence des discours haineux et de la désinformation sur la plateforme.

En décembre dernier, le commissaire européen au marché intérieur, Thierry Breton, mettait déjà en garde Twitter quant au DSA : « Il y a encore un énorme travail à faire, car Twitter devra mettre en œuvre des politiques d’utilisation transparentes, renforcer considérablement la modération des contenus et protéger la liberté d’expression, s’attaquer à la désinformation avec détermination et limiter la publicité ciblée », déclarait-il lors d’un appel avec Musk. À l’époque, le milliardaire s’était voulu rassurant et affirmait que Twitter allait se soumettre à la législation.

Musk préfère l’IA

Selon le Financial Times, les choses ne se sont pas vraiment arrangées depuis. Les régulateurs européens ont fait savoir à Musk qu’ils n’étaient pas très emballés par l’approche de ce dernier pour modérer le contenu. Il privilégie en effet l’utilisation de l’intelligence artificielle et l’aide de bénévoles pour y parvenir, et n’emploie pas de vérificateurs de faits comme c’est le cas de Meta, par exemple.

Les dirigeants l’ont ainsi exhorté à recruter davantage de modérateurs, ce qui complique les efforts de Musk à restructurer l’entreprise déficitaire, et à réduire au maximum ses dépenses. Selon Melissa Ingle, experte en mégadonnées et licenciée de chez Twitter où elle faisait partie de l’équipe d’intégrité civique, les modérateurs humains sont essentiels pour intercepter la désinformation et les contenus haineux. « Il y a 30 millions de tweets par heure ou 500 millions par jour. Il faut des humains parce que même si j’aimerais dire que nos algorithmes sont bons, il y a toujours beaucoup de choses qui passent », explique-t-elle à Euronews.

Les grandes plateformes comme Twitter éprouvent, en outre, des difficultés pour la modération de contenus non anglophones, tendance qui s’accroît avec le manque de personnel. « Nous avons l’intention de nous conformer pleinement à la loi sur les services numériques et avons eu plusieurs discussions productives avec des responsables de l’UE sur nos efforts dans ce domaine », rassure Twitter.

« Nous continuerons à utiliser un mélange de technologie et de personnel spécialisé pour détecter et supprimer de manière proactive les contenus illégaux, tandis que les notes de la communauté (Ndlr : la participation de volontaires) permettront aux gens d’en savoir plus sur les fausses informations potentielles d’une manière informative, transparente et digne de confiance », continue l’entreprise. Difficile, donc, de savoir si elle compte embaucher davantage de modérateurs, mais elle ferait mieux de se plier aux exigences des régulateurs, au risque de devenir l’une des premières victimes du DSA.