Scaleway, filiale cloud d’Iliad, a organisé ce vendredi, la première édition de l’ai-PULSE, une conférence européenne sur l’intelligence artificielle (IA). L’occasion pour Xavier Niel, son dirigeant, de revenir sur ses ambitions en matière d’IA, en présence du ministre du Numérique Jean-Noël Barrot, par message enregistré du président de la République Emmanuel Macron et de pointures du secteur.
Kyutai : un OpenAI version originale à la française ?
Le lancement d’un laboratoire de recherche en intelligence artificielle européen et indépendant, annoncé il y a plusieurs semaines par Xavier Niel était attendu. Désigné sous le nom de code Sphère lors de sa préparation, le projet a finalement adopté le nom de Kyutai, traduction japonaise du nom initial et jeu de mots commode pour « cute AI », jolie IA en anglais.
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Initialement doté de 100 millions d’euros par le milliardaire français, Xavier Niel a réussi à trouver 200 millions d’euros supplémentaires. « Grâce à des amis, nous sommes passés à 300 millions d’euros de dotation, » précise le dirigeant d’Iliad. Les relations en questions : Rodolphe Saadé, le PDG du géant de la logistique CGA-CGM, ainsi qu’Eric Schmidt, ancien PDG de Google. Ce dernier a commencé à s’entretenir avec Xavier Niel en janvier dernier, lui faisant part très rapidement de son intérêt pour le projet. Les trois hommes ont déjà investi ensemble dans l’IA, permettant notamment à Mistral AI de boucler son tour de table de 105 millions d’euros en juin dernier.
Les chercheurs, qui viennent tous des plus grandes entreprises de la tech, Meta, DeepMind (Google), Apple, Microsoft, auront pour objectif de démocratiser l’IA générale, dont les modèles sont capables d’apprendre et d’effectuer des tâches cognitives à la manière d’un être humain. Dans un premier temps, l’équipe de scientifiques se reposera sur ses acquis en se penchant sur de la recherche fondamentale en IA, passant par la création de grands modèles de langages, capables de générer du texte, ainsi que des modèles multimodaux, générant son et image.

L’équipe scientifique de Kyutai est composée, de gauche à droite, de Neil Zeghidour, un ancien de DeepMind, d’Edouard Grave, chercheur en IA pour Meta, de Laurent Mazaré, d’Hervé Jégou, également ancien de DeepMind, de Patrick Perez, directeur de l’IA chez Valeo, et d’Alexande Defossez. Photographie : Kyutai.
Un laboratoire open science à but non lucratif
Kyutai publiera l’ensemble de ses travaux de recherche en « open science », c’est-à-dire en accès libre et gratuit. Xavier Niel, Rodolphe Saadé et Eric Schmidt ont longuement insisté sur ce caractère non lucratif, à l’instar d’OpenAI à ses débuts, avant son revirement de stratégie en 2019. « Il ne faut pas opposer activité commerciale et activité à but non lucratif, » a tout de même ajouté Rodolphe Saadé, estimant que l’un nourri l’autre. Néanmoins, le laboratoire n’est pas fait pour concevoir des produits ou de servir de base technologique pour ses financiers. « Nous sommes dans un pays où la philanthropie n’existe pas, » a ironisé Xavier Niel, en appuyant qu’ici c’était bien le cas, agir « pour le bien commun ».
Kyutai pourra s’appuyer sur un conseil scientifique auquel siégera l’informaticien français Yann Le Cun, le directeur français de l’IA chez Meta, connu comme l’un des pères du deep learning. Il sera accompagné de l’allemand Bernhard Schölkopf, directeur de recherche au Max Planck Institute, et de la sud-coréenne Yejin Choi, directrice de recherche de l’Allen Institute for AI. Leur rôle sera purement consultatif.
L’initiative impulsée par Xavier Niel a pour objectif de conserver ou de faire revenir les meilleurs chercheurs français dans le but de faire de Kyutai un grand de l’IA. L’homme d’affaires a conclu amusé en lançant lors d’une conférence de presse pleine à craquer ne rien avoir « contre le fait qu’on parle un jour de l’impérialisme français dans l’IA ». C’est l’un des autres traits de ce laboratoire, son statut européen, dans la lignée des questions de souveraineté actuellement en vogue sur le continent. Durant son intervention, Jean-Noël Barrot a souligné ce point, déclarant que « la France avait certes perdu une baille de l’ère numérique, mais pas la guerre ».
Scaleway multiplie les partenariats
Parallèlement à l’annonce de lancement de Kyutai, Scaleway a profité de la conférence qu’il organise pour dévoiler plusieurs partenariats . Tout d’abord, celui avec Nvidia, en présence d’un Jensen Huang à distance, finalement retenu aux États-Unis par la venue du président chinois Xi Jinping, dans le cadre de la réunion annuelle de la Coopération économique pour l’Asie-Pacifique.
Ce partenariat « vise à donner accès aux GPUs, au logiciel Nvidia AI Enterprise et aux services pour accélérer le développement des grands modèles de langage (LLM) et de l’IA générative pour les start-up européennes, » précise le géant américain des puces IA dans un communiqué. Nvidia travaille avec Scaleway dans le but d’étendre l’accès au calcul accéléré souverain eu sein de l’Union européenne et permettre aux entreprises de déployer des applications d’IA. Les clients de Scaleway pourront profiter de la puissance des 1 016 GPU H100 présents dans Nabuchodonosor, le dernier supercalculateur IA de l’entreprise.
Toujours en matière d’intelligence artificielle, la filiale cloud d’Iliad s’est rapprochée de la société spécialisée dans les semi-conducteurs Ampere. Ensemble, ils ont annoncé le lancement de nouvelles instances virtuelles pour aider les développeurs à tester leurs solutions. Elles fonctionneront à l’aide des processeurs Ampete Altra, basés sur l’architecture ARM.
Enfin, Scaleway fait son entrée dans le monde de l’informatique quantique en concluant un partenariat avec Quandela dans le but de lancer un service quantum-as-a-service (QaaS), propulsé par un simulateur de circuit, un type d’ordinateur quantique, utilisant les puces H100 de Nvidia. « Chez Scaleway, nous aidons les entreprises à anticiper l’arrivée de la technologie quantique et la révolution qu’elle apportera, » assure Damien Lucas, le PDG de Scaleway.