Pour concurrencer Nvidia sur le terrain de l’intelligence artificielle, Intel a choisi de l’imiter, non pas sur le plan technique, mais sur la stratégie. Le géant des semi-conducteurs a révélé lors d’une conférence de presse à Pékin le 11 juillet la sortie prochaine de son processeur spécialisé dans l’IA, Gaudi2, en Chine. Comme son rival, l’entreprise va toutefois restreindre ses performances pour passer entre les mailles du contrôle à l’export américain.
Intel veut montrer que Nvidia n’est pas seul dans la course à l’IA
Les champions américains des semi-conducteurs ne veulent pas abandonner l’immense marché chinois, malgré Washington. Lorsque le gouvernement américain a interdit à Nvidia (et AMD) de vendre ses composants les plus performants en Chine, l’année dernière, l’entreprise ne s’est pas laissée abattre. Elle a développé une nouvelle version de son processeur graphique (GPU) le plus performant et apprécié pour la formation d’IA, le A100, bridé. Le A800 a été conçu spécifiquement en lien avec ce contrôle à l’export, pour la Chine. De même pour la génération suivante, le H100 et sa version allégée, le H800.
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Intel vient d’imiter son concurrent en dévoilant un Gaudi2 spécial pour la Chine. En pointe dans l’intelligence artificielle, avec de grandes entreprises Tech, l’Empire du Milieu est un marché naturel à conquérir pour le géant américain.
Depuis le printemps 2022, la société de feu Gordon Moore, tente de convaincre qu’elle est capable de faire aussi bien pour l’entrainement des grands modèles de langage que Nvidia. Fin juin elle a relayé une étude de MLCommons, une organisation qui mesure les performances de l’IA, affirmant que Gaudi2 surpasse l’A100. Elle déplorait que « le récit actuel de l’industrie est que l’IA générative et les grands modèles de langage (LLM) ne peuvent fonctionner que sur les GPU Nvidia ».
La Chine peut constituer un terrain idéal pour battre en brèche ce narratif. Sandra Rivera vice-présidente exécutive d’Intel et directrice générale des divisions Centre de données et intelligence artificielle, déclarait qu’Intel « abaisse les barrières à l’entrée pour l’IA et renforce la capacité des clients à déployer cette technologie essentielle » ajoutant vouloir « aider à construire l’avenir de l’IA en Chine ».
Inspur, l’un des plus grands fournisseurs de serveur du pays, en propose déjà un système avec la technologie d’Intel. H3C et xFusion, d’autres acteurs majeurs y travaillent selon les propos rapportés par le communiqué de l’américain.
Washington va-t-il siffler la fin de la récré ?
Au-delà de l’évolution de la compétition Nvidia – Intel en terre chinoise, la question est plutôt : pourra-t-elle vraiment avoir lieu ? Les États-Unis, en privant Pékin de semi-conducteurs avancés, veulent entraver les progrès technologiques du pays et dans l’IA en particulier. Si les deux entreprises respectent à la lettre les directives du département du Commerce, elles n’en respectent peut-être pas l’esprit.
Selon la presse américaine, une mise à jour du contrôle à l’export américain serait imminente. Le Bureau de l’industrie et de la sécurité (BIS), dont c’est la mission au sein du ministère, viserait à boucher les lacunes des mesures déjà prises contre Pékin. La principale cible est la location par des entités chinoises de capacités avancées pour former des IA auprès d’acteurs du cloud comme Amazon Web Services ou Microsoft Azure. Les GPU spéciaux de Nvidia seraient également concernés. Si cela devait être avéré, le Gaudi2 modifié d’Intel risquerait de faire partie du lot.