Intel et Advanced Micro Devices (AMD) ont eu une fin de semaine passée compliquée. Le cours en bourse des deux entreprises américaines a baissé respectivement de 5,2 % et 4,2 %. Une réaction du marché à la révélation que Pékin a demandé à ses grandes entreprises publiques de télécommunication de ne plus utiliser de puces étrangères d’ici 2027.
La Chine s’active
Inspecter les réseaux, détecter la présence de puces étrangères, fixer un plan et un calendrier pour les remplacer. Voilà les instructions qu’auraient reçues China Mobile, China Telecom et d’autres de la part du ministère chinois de l’Industrie et des technologies de l’information (MIIT), d’après le Wall Street Journal. C’est ce même ministère qui aurait suggéré, fin 2023, aux agences de l’État et entreprises publiques d’utiliser des ordinateurs avec des puces fabriquées localement.
Inscrivez-vous à la newsletter
En vous inscrivant vous acceptez notre politique de protection des données personnelles.
Cette décision est une très mauvaise nouvelle pour Intel et à un degré moindre pour AMD. Ils fournissent chacun un grand nombre de processeurs de base pour les équipements réseau. Pour Intel, la Chine est son premier marché, devant les États-Unis, avec 27 % de son chiffre d’affaires de 2023. Pour AMD, l’Empire du Milieu représente 15 % de son chiffre d’affaires.
Un coup dur pour les deux entreprises, mais un risque qui était à prévoir. Les semi-conducteurs sont au cœur de la rivalité sino-américaine depuis plusieurs années. Les États-Unis ont dégainé les premiers en 2019 avec… les équipements réseau chinois. À l’heure du déploiement de la 5G, la Federal Communication Commission a décidé de priver de subvention les opérateurs américains dotés d’équipements Huawei ou ZTE.
Cette stratégie, engagée sous l’administration Trump, s’est poursuivie malgré l’arrivée au pouvoir de Joe Biden. En octobre 2022, une mesure touchant plusieurs aspects de la chaîne de valeur des semi-conducteurs a été prise pour bloquer les progrès chinois en composants avancés. Elle a été accompagnée par d’autres visant à limiter la vente de puces IA haut de gamme. Entre 2022 et 2023, la Chine a baissé de 7 % de part de chiffres d’affaires d’AMD du fait de ces décisions.
La guerre des puces
Naturellement, Pékin n’est pas resté les bras croisés. Le Wall Street Journal souligne que les initiatives du MIIT sont uniquement permises par une montée en gamme des puces fabriquées localement. Avec Huawei, sa branche de conception HiSilicon, sa fonderie partenaire Semiconductor Manufacturing International Corporation (SMIC), les groupes chinois ont déjà prouvé qu’il fabrique des composants plus avancés que prévu.
Il ne s’agit que d’un échantillon, médiatique, d’un réseau d’entreprises. En 2014, la Chine a créé le « Big Fund », un fonds d’investissement via lequel le gouvernement veut atteindre des objectifs d’autosuffisance fixés dans le plan « made in China 2025 ». Un but devenu tout à fait central avec la rivalité américaine.
Dans le secteur de la microélectronique, les objectifs initiaux du plan auront du mal à être atteints. Toutefois, par la force des choses et au prix d’immenses efforts, la Chine commence à se libérer de la technologie américaine. Les deux pays repoussent l’idée d’un découplage dans le secteur, c’est pourtant dans cette direction que les deux progressent.