Dans le cadre de la proposition de loi relative à l’encadrement des activités commerciales des influenceurs sur les réseaux sociaux, Magali Berdah, « la papesse des influenceurs », a été auditionnée, le 13 avril, par la Commission des affaires économiques du Sénat. Elle félicite l’initiative de créer un statut légal pour le secteur de l’influence en France, mais estime que le texte a des carences sur l’accompagnement, et notamment sur les formations au métier d’influenceur.

La « papesse des influenceurs » prend la parole

« Votre expérience nous intéresse, particulièrement sur votre vision du secteur, son évolution et la proposition de loi qui est actuellement discutée » entame Amel Gacquerre, sénatrice et rapporteure de la proposition de loi. Magali Berdah est à la tête de Shauna Events, une agence d’influenceurs fondée en 2016. C’est à cette période, grâce à son « regard plus business », qu’elle commence à accompagner des candidats de téléréalité pour monétiser leurs placements de produits.

Pour elle, tout le monde peut devenir influenceur « à partir du moment où la personne à un talent pour fédérer une communauté ». Si l’Union des Métiers de l’Influence et des Créateurs de Contenu, un regroupement des acteurs du secteur, chiffre les influenceurs à 150 000 en France, Magali Berdah s’étonne. « Je n’arrive pas à savoir comment ils peuvent le calculer alors qu’il n’est pas possible de les identifier légalement », souligne-t-elle. À ce jour, il n’existe pas de code APE relatif à ce genre d’activités professionnelles. Un vide juridique que la proposition de loi de l’Assemblée nationale cherche à combler.

Différencier le métier d’influenceur de celui de mannequin

Interrogée sur les activités de Shauna Events, Magali Berdah avoue avoir « des fois été dépassée ». Elle confie avoir contacté, à plusieurs reprises, l’Autorité de Régulation Professionnelle de la Publicité (ARPP), et ce dès 2017, pour accompagner ses clients. Entre autres, elle leur a demandé la différence entre un mannequin, payé pour tourner une publicité, et un influenceur, rémunéré pour promouvoir un produit. La dirigeante explique que les deux métiers ne répondent pas aux mêmes exigences. Elle assure qu’à la différence du mannequin l’influenceur possède une plus grande « liberté d’expression » et n’est pas obligé de s’en tenir au script communiqué par les marques.

À ce propos, Magali Berdah affirme qu’il est nécessaire de séparer les règles entourant les contenus commerciaux sur les réseaux sociaux de ceux présents sur les médias traditionnels. Elle souligne qu’avant d’être diffusée à la télévision, une publicité doit être validée par l’ARPP, « ce n’est pas le cas pour les contenus d’influence commerciale et cela prouve que nous avons besoin d’explications beaucoup plus claires ».

Sur la question des mineurs, elle soutient que l’influence commerciale ne doit pas s’adresser aux jeunes. Elle avance qu’ils ne sont pas la cible, ne possédant pas le même pouvoir d’achat qu’une ménagère, le type de clientèle recherchée par les marques.

La nécessité des formations

Pour éviter les dérives au sein du secteur de l’influence, Magali Berdah appuie sur l’importance de créer des formations pour accompagner les influenceurs. Elle rappelle que leurs activités sont rattachées au code de la consommation « qui est très grand, pas tout le monde ne le connaît par cœur », entraînant des « dérives par méconnaissance ». Citant les différents cas d’arnaques au drop-shipping ou au compte CPF, elle signale qu’« il y aura toujours des personnes malveillantes sur Internet pour trouver une faille, nous devons être accompagnés là-dessus ».

En cas de promotion frauduleuse, la patronne de Shauna Events considère que « chacun doit prendre ses responsabilités ». Elle précise que si le placement a été recommandé à un influenceur par son agence, c’est à elle de se porter garant, auquel cas la responsabilité retombe sur la personnalité publique. S’il y a des erreurs de conduite, « il doit y avoir des avertissements ». Elle évoque même une possible radiation si les manquements sont trop importants.

Pour conclure, elle qualifie de « très bien » la proposition de loi malgré les manquements aux besoins de formation. Adoptée le 31 mars dernier par l’Assemblée nationale en 1re lecture, celle-ci doit être débattue en séance publique au Sénat le 9 prochain.