Le Japon et les Pays-Bas se sont entendus avec les États-Unis pour commencer à restreindre les exportations d'équipements de pointe destinés à la fabrication de semi-conducteurs vers la Chine. Une étape supplémentaire vient donc d’être franchie dans la guerre commerciale qui oppose les deux puissances.

Un accord qui se prépare depuis plusieurs mois

Le Japon et les Pays-Bas sont des acteurs stratégiques dans l’économie mondiale des semi-conducteurs. En plus de quelques acteurs américains, des entreprises issues de ces pays développent et fournissent du matériel essentiel à la fabrication de semi-conducteurs de pointe. C’est notamment le cas de la firme néerlandaise ASML Holding ou encore du géant nippon Nikon.

Depuis plusieurs mois, les Américains tentent de convaincre les dirigeants des deux pays d’imposer des limitations aux exportations de leur matériel vers la Chine, arguant que celui-ci permet à l’Empire du Milieu de renforcer son secteur militaire. Ce vendredi 27 janvier, les hauts responsables de la sécurité nationale des trois pays se sont finalement entendus sur un accord. Celui-ci intervient après une décision prise par Washington en octobre, alors que les deux pays se vouent une guerre commerciale sans merci, d'imposer des restrictions étendues à l'exportation sur les semi-conducteurs et les équipements de pointe fabriqués par des entreprises américaines vers la Chine.

Pour l’heure, l'accord n'a pas été officiellement annoncé par l'un des trois pays, ce qui s'explique par les préoccupations du Japon et des Pays-Bas quant à d'éventuelles représailles de la Chine, rapporte le Wall Street Journal.

La Chine et le Japon marchent sur des œufs

Depuis 2019, le gouvernement néerlandais interdit à ASML Holding d'exporter sa technologie de lithographie par rayonnement ultraviolet extrême vers la Chine, mais l’entreprise continuait d’y acheminer des systèmes de lithographie de qualité inférieure, un équipement essentiel pour développer des puces électroniques de pointe. Ce nouvel accord impose de nouvelles restrictions sur l'exportation de celui-ci en Chine. Ces restrictions ciblent également l’entreprise Nikon, qui travaille sur des technologies similaires.

Il s’agit d’un contexte particulier et tendu pour le Japon et les Pays-Bas. Les deux pays dépendent fortement de la Chine dans différents domaines, ce qui les incite à la prudence dans la mise en œuvre de politiques qui restreignent leurs entreprises. De son côté, l’Empire du Milieu s’est montré clair : « Nous espérons que les pays concernés feront ce qu'il faut et travailleront ensemble pour faire respecter le régime commercial multilatéral et préserver la stabilité des chaînes industrielles et d'approvisionnement mondiales. Cela servira également à protéger leurs propres intérêts à long terme », a déclaré le porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, Wang Wenbin, au début du mois.

De manière globale, il va falloir attendre de longs mois, voire même des années, avant de voir ces restrictions prendre concrètement forme. En effet, le Japon et les Pays-Bas ne disposent pas du même cadre judiciaire que les États-Unis pour imposer de telles mesures : ils auront encore besoin d'un certain temps pour apporter des modifications à leurs lois et règlements.

L’Union européenne est-elle en train de s’allier davantage avec les États-Unis au regard de la Chine ?

La décision des Pays-Bas de s’aligner avec la politique américaine reflète des propos récents de Thierry Breton, commissaire européen au Marché intérieur. Ce vendredi, il a affirmé que les États-Unis bénéficieraient de l’engagement total de l’UE pour bloquer l’industrie chinoise des semi-conducteurs. « Nous sommes entièrement d'accord avec l'objectif de priver la Chine des puces les plus avancées », a-t-il déclaré au Centre d'études stratégiques et internationales.

Visiblement, la guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine s’intensifie et touche, sans surprise, les technologies clés et considérées comme essentielles pour l’avenir. Reste à voir quelles seront les répercussions de l’accord sur l’industrie chinoise, mais également des autres pays concernés. En effet, les Néerlandais et les Japonais pourraient se faire doubler par des concurrents étrangers sur le marché chinois, tandis que l’Empire du Milieu pourrait lui-même développer les technologies dont il a besoin. Bien sûr, cela devrait prendre un temps conséquent mais, au final, pourrait s’avérer encore plus préjudiciable pour les États-Unis et leurs alliés sur le long terme.