Depuis quelques semaines, Apple a entamé une nouvelle étape de son plan visant à délocaliser une partie de sa production de Chine vers l’Inde et le Vietnam. Le géant du smartphone est implanté dans l’Empire du Milieu depuis plus de 10 ans, 80% de ses iPhones y sont fabriqués. Cupertino a été récemment ébranlé par la politique Zéro covid de Pékin et les manifestations inédites qu’elle a suscitées chez son principal fournisseur, Foxconn.

Apple veut sortir de sa dépendance chinoise

Depuis quelques années, Apple ne cache pas son désir de quitter, ou, a minima de moins produire en Chine. Elle a récemment demandé à ses fournisseurs d’accélérer le transfert de l’assemblage de ses produits sur d’autres sites en dehors de l’Empire du Milieu. La société de Tim Cook a pour objectif d’être moins dépendante du plus gros site d’assemblage d’iPhone du monde, situé à Zhengzhou. Les 300 000 salariés de la manufacture produisent plus de 200 millions de téléphones par an. L’usine de Foxconn fabrique plus de 85% de la gamme d’iPhone Pro.

L’entreprise avait communiqué, le 6 novembre, sur le ralentissement de la production de l’usine géante du Centre-Est de la Chine. Le gouvernement chinois avait mis en place des restrictions sanitaires. Fin novembre, les problèmes se sont accumulés pour le géant américain. En réaction aux restrictions et au comportement de Foxconn, de violentes manifestations ont éclaté sur le site Zhengzhou. Les travailleurs étaient mécontents des salaires impayés de 5 dollars par heure. Ces événements ont réduit à seulement 20% la capacité de production d’iPhone City, le surnom donné à l’usine géante.

Selon des experts, témoignant anonymement dans le Wall Street Journal, Apple veut délocaliser sa production depuis plusieurs années. Selon eux, l’entreprise de Tim Cook, pour réussir son transfert, devra s’aider de nombreux sous-traitants. Des sociétés chinoises comme Luxshare et Wingtech seraient en passe d’obtenir des contrats plus importants.

En début d’année, Luxshare, entreprise spécialisée dans l’assemblage d’objets technologiques, a fait un appel aux investisseurs. Les dirigeants ont affirmé que de grands clients, sans citer Apple, s’inquiétaient des difficultés de la chaîne d’approvisionnement en Chine. Ils ont ajouté que des clients avaient demandé à la société de les aider à sortir du pays.

Afin d’amener ses chaînes de production ailleurs, la marque à la Pomme doit engager des sous-traitants supplémentaires. Néanmoins, dans un contexte économique morose, le géant réduit ses coûts et le nombre d’entreprises engagées. Les usines indiennes et vietnamiennes reçoivent plus tardivement les instructions nécessaires pour que les employés travaillent sur les nouveaux produits. Si les sites de production en dehors de la Chine veulent devenir des acteurs majeurs de la production, les sous-traitants devront être plus efficaces.

L’objectif à long terme d’Apple est d’expédier 40 à 45% des iPhones depuis l’Inde selon Ming-Chi Kuo, analyste pour TF International Securities. Actuellement, les sites vietnamiens fabriquent des produits secondaires de Cupertino comme les Airpods, l’Apple Watch ou encore les MacBook et bientôt ses iPad.

Apple devra revoir sa stratégie pour s’implanter en Inde et au Vietnam

Les problèmes de production d’Apple se répercutent sur les consommateurs. Les clients ne seront pas nombreux à avoir leurs iPhone 14 Pro à noël. En effet, seuls 70 millions de smartphones sur les 85 millions habituels seront expédiés au quatrième trimestre. Selon Ming Chi Kuo, la marque à la Pomme ne rattrapera jamais ses ventes d’iPhone ainsi perdues. Entre les fêtes et le contexte économique pesant, les acheteurs préféreront se tourner vers d’autres options.

Malgré cela, la situation s’embellit pour Apple. Pour le mois de décembre, Foxconn a promis que les capacités de production s’amélioreront de 20%. Toutefois, cette amélioration ne signifie qu’un potentiel de fabrication de 40%. Un retour à la normale est prévu pour début janvier. Pour parvenir à rétablir la situation, Foxconn a offert des primes de 1 800 dollars aux travailleurs et un dédommagement de 1 400 dollars pour les démissionnaires. L’entreprise espère que ses efforts éviteront de nouvelles perturbations.

Un potentiel départ d’Apple serait un véritable coup dur pour l’économie chinoise. En 2021, le groupe Foxconn affirme représenter 3,9% des exportations de la Chine. La décroissance de la production à Zhengzhou serait aussi compliquée pour les 300 000 salariés employés. De près comme de loin, Apple en Chine représenterait plus d’un million d’emplois.

Le Vietnam et l’Inde ont l’occasion de profiter des difficultés chinoises pour attirer l’activité d’Apple et de ses sous-traitants. Pour le premier, frontalier de la Chine, les sites de production à pleine capacité peuvent atteindre 60 000 personnes. L’industrie manufacturière dans le pays connaît une croissance rapide. En 2021, le secteur de l’assemblage électronique au Vietnam a rapporté plus de 100 milliards de dollars dont 41 milliards d’exportations de téléphones portables.

L’Inde, deuxième pays le plus peuplé du monde, à la main-d’œuvre nécessaire pour Apple. Le problème est de réussir son intégration dans le pays. Chaque État a ses propres lois à prendre en compte. La société de Tim Cook devra s’adapter à chaque pays où elle produira, néanmoins les experts précisent que ces nouvelles manufactures ne produiront pas autant que la Chine.