Des iPhone, MacBook et autres appareils Apple « souillés par le sang du peuple congolais ». Ces mots, Tim Cook, le PDG de la marque à la pomme, les a lus dans une lettre écrite par les avocats de République démocratique du Congo (RDC), datée du 22 avril. Dans la lettre consultée par le Financial Times, le pays ravagé par la guerre accuse l’entreprise d’exporter illégalement des minerais et ainsi de financer des groupes armés.

Les avocats du gouvernement de la RDC indiquent avoir rencontré le président Félix Tshisekedi à Kinshasa en septembre. Ils ont été chargés d’enquêter sur les exportations de minerais dits « 3T », le tungstène, le tantale et l’étain, dont les chaînes d’approvisionnement sont contrôlées par divers groupes armés.

La ceinture minière congolaise, qui longe les frontières avec l’Ouganda et le Rwanda, fait notamment régulièrement l’objet de combats entre les forces gouvernementales et la milice M23. Ce groupe armé contrôle les principales routes commerciales qui mènent au Rwanda.

Le cabinet d’avocats américain Amsterdam & Partners LLP, qui représente la RDC aux côtés du cabinet parisien Bourdon & Associés, a publié un rapport dans lequel il apparaît que le Rwanda a travaillé avec des groupes rebelles. De l’argent provenant de « vastes quantités » de minerais stratégiques extraits au Congo aurait ainsi été blanchi. Les Nations unies, les États-Unis et l’Union européenne estiment également que le M23 est soutenu par le Rwanda.

Manque de « preuves concrètes et vérifiables » sur les vérifications de provenance

L’industrie minière à destination du secteur technologique a déjà été pointée pour ne pas respecter les droits de l’homme. Populations déplacées, sécurité drastiquement revue à la baisse, maladies liées aux rejets de métaux dans l’air, travail d’enfants… En 2016, Amnesty International avait sorti un rapport sur le travail d’enfants. En 2019, quatorze familles congolaises ont porté plainte contre Apple et d’autres géants de la tech pour avoir « aidé et encouragé » l’exploitation d’enfants.

Face à ces scandales, mais aussi devant d’autres, l’entreprise dirigée par Tim Cook a multiplié les investissements dans la responsabilité sociétale des entreprises (RSE). Dans son dernier rapport RSE portant sur l’année 2023, Apple indique avoir utilisé plus de 20 % de matériaux recyclés dans ses produits et d’avoir contrôlé 100 % des fonderies et raffineries de 3T.

Ce qui reste loin de l’objectif émis en 2014 de « cesser un jour d’exploiter les ressources minières de la terre ». Et apparemment pas la réalité du terrain. Les avocats du gouvernement congolais estiment que la vérification de l’origine des composants qu’Apple affirme réaliser « ne semble pas fondée sur des preuves concrètes et vérifiables ». Ils pointent notamment que la marque à la pomme travaille avec des entreprises rwandaises.

Un porte-parole d’Apple a refusé de commenter la lettre.