9 milliards de dollars, voilà le coût estimé de l’usine polyvalente de haute technologie que Foxconn, le fabricant des iPhone d’Apple, pourrait construire en Arabie saoudite. Le Wall Street Journal a révélé l’existence de négociations entre l’entreprise taïwanaise, de son vrai nom Hon Hai Precision Industry et le royaume depuis au moins 2021.

Des objectifs convergents

Diversification, voilà le mot-clé de cette affaire. D’un côté, l’Arabie saoudite, sous la férule de son tout-puissant prince héritier Mohammed ben Salmane ou MBS, souhaite s’extraire de sa dépendance à l’or noir. Le prince cherche à attirer des investisseurs étrangers pour développer un secteur industriel avancé sur ses terres.

De l’autre, Foxconn veut s’extirper de sa dépendance à la Chine et de son principal client, Apple. Avec la montée des tensions commerciales entre les États-Unis et l’Empire du Milieu, la marque à la pomme conseille à son fournisseur de regarder vers le Vietnam ou Taïwan pour implanter ses usines. Cela compensera, ainsi, les mauvaises surprises telles que la fermeture des lignes de Foxconn à Shenzhen dû fait de la politique 0 covid de Pékin.

Foxconn cherche également à étoffer ses activités. Le fournisseur s’est notamment tourné vers les véhicules électriques. Il a passé plusieurs contrats avec des constructeurs, Jeep, Chrysler Stellantis, pour fournir des pièces comme des semi-conducteurs. L’usine qui valait 9 milliards devrait justement fabriquer des puces, des composants pour les voitures électriques, des écrans et autres produits électroniques.

L’Arabie saoudite en concurrence avec ses voisins

D’après les informations du Wall Street Journal, la teneur des négociations entre l’Arabie saoudite et Foxconn est assez classique. L’entreprise, réclame des financements, des exonérations fiscales et des subventions d’électricité et d’eau. Ses discussions pour implanter une autre usine dans la région, aux Émirats arabes unis, représentent un argument de poids pour obtenir satisfaction.

Pour le moment, Ryad est prêt à proposer un co-investissement direct, des prêts de développement industriel, un endettement avec un faible taux d’intérêt auprès de banques locales, des crédits d’exportation…

Le royaume a également ses exigences. Il demande que la future usine consacre les deux tiers de sa production à la chaîne d’approvisionnement de Foxconn. Une façon de s’assurer des débouchés pour la réussite du projet et sa rentabilité.

Foxconn va-t-elle s’installer dans la future ville intelligente de Neom ?

L’une des attentes de Mohammed ben Salmane risque également de devenir tout à fait centrale : en un mot, Neom. Neom, c’est le nom de la ville intelligente voulue par le prince héritier, sur les rivages de la mer Rouge, à l’entrée du Golfe d’Aqaba. Il espère que Foxconn ira s’y établir.

Vue satellite de la mer rouge

Quelques bâtiments administratifs, un aéroport et un centre d’expérimentation, voilà Neom aujourd’hui. Crédit : Google Earth

Symbole des réformes, de la modernité voulue par MBS pour l’Arabie saoudite, le projet démesuré de cité sortie du désert est estimé à près de 500 milliards de dollars. Pour aboutir, le prince a besoin d’investissements étrangers, par exemple celui de Foxconn dont les produits pourront être en partie destinés à la future ville.

L’Arabie saoudite peine, malgré ses moyens, à attirer. Au-delà de son image très négative, vis-à-vis du droit des femmes, du pouvoir autocratique, de l’assassinat du journaliste Jamal Khashoggi en 2018, le pays souffre d’un marché intérieur limité, d’une main-d’œuvre coûteuse et d’un environnement compliqué.

Attirer Foxconn apparaît comme particulièrement intéressant pour le régime et ses plans à long terme. L’entreprise taïwanaise en est probablement parfaitement consciente et jouera son avantage pour obtenir les meilleurs termes possibles. De là à la convaincre de s’installer sur le site de Neom ?