Fondée en 2007, la plateforme de streaming et de téléchargement musical Qobuz vient de boucler un tour de table à hauteur de 10 millions d’euros. Ce sont ses investisseurs historiques qui ont choisi de renouveler leur confiance dans la stratégie d’expansion internationale. La société Nabuto et le Groupe Québecor (géant du divertissement outre-Atlantique) ont donc remis la main à la poche, avec enthousiasme.

« Une opportunité commerciale commune existe », relève Georges Fornay directeur général délégué du service de streaming français. Québecor possède des stations radio, un opérateur télécoms et une plateforme de visionnage de vidéos… mais pas de service de streaming musical. Nous opèrerons le sien et il nous aidera à nous imposer sur le marché nord-américain. »

Qobuz vise la niche des audiophiles exigeants en matière de qualité sonore

Lorsqu’on évoque le marché du streaming musical, les premiers noms qui viennent en tête sont forcément le français Deezer et le suédois Spotify. Qobuz, la start-up basée à Pantin en Île-de-France, grandit depuis 2007 dans l’ombre des deux géants, mais se démarque en s’appuyant sur des éléments très différenciant.

Qobuz mise en effet sur une qualité sonore supérieure pour les titres qu’elle héberge. Ceux-ci sont en Hi-Fi (qualité CD) et haute résolution (hi-res). Le Français a ainsi construit son identité autour de critères audio qui lui permettent de se distinguer des géants du secteur. Les passionnés s’y retrouveront, le son proposé est au plus proche de la qualité des studios d’enregistrement. « On atteint les limites de ce que peut distinguer l’oreille humaine » explique Georges Fornay, qui a tout récemment rejoint l’équipe Qobuz.

Une proposition de valeur qui impacte aussi le profil type du client de start-up. Celui-ci a autour de 50 ans, et les genres musicaux les plus plébiscités sont le jazz et le rock. Mais Qobuz voit pointer sur ses radars la montée en puissance de l’électro, et un rajeunissement de sa clientèle, à mesure qu’elle continue de pénétrer le marché. Des audiophiles de tout âge, signe d’une accélération de l’intérêt pour une qualité sonore supérieure.

D’ailleurs, en juin dernier, la start-up déclarait arrêter le format MP3. Un choix stratégique que détaillait le PDG de Qobuz, Denis Thébaud pour Les Numériques : « On ne peut pas continuer à proposer une qualité inférieure au CD, un standard vieux de presque 40 ans ! L’iPod a beaucoup participé dans les années 2000 à la généralisation des formats compressés par son côté pratique. Mais cela ne rend pas honneur au travail des artistes et des ingénieurs. Nous avons donc d’abord décidé d’arrêter complètement le MP3 aux États-Unis, en novembre 2019. Le test a été concluant, et nous étendons donc la décision aux autres territoires. »

Des investissements en marketing et R&D pour supporter l’internationalisation

Les chiffres ne mentent pas. Qobuz annonce avoir enregistrer une croissance de 45% au cours de sa dernière année fiscale. En août 2019, la plateforme de streaming musical française avait levé 12 millions d’euros. Sur l’année écoulée, il est clair que la pandémie de Covid-19 a changé la donne en terme d’habitudes d’écoute. « Le confinement a joué sur le nombre de téléchargements de morceaux », précise Georges Fornay. « Ils ont le temps et l’argent, car les Français ont épargné en début d’année. »

Avec davantage de temps et d’argent, il semblerait donc que les audiophiles tournent leur attention vers la qualité sonore de leur écoute musicale. Denis Thébaud abonde dans ce sens : « Dans l’offre de téléchargement aujourd’hui, on trouve encore beaucoup de plateformes qui proposent seulement des fichiers compressés. Or, il est normal que les gens qui achètent de la musique « pour toujours » souhaitent acheter de la haute qualité. Et pas seulement de la qualité sonore, mais aussi de la qualité de service : nous mettons en avant les albums complets plutôt que des titres individuels ou des playlists, nous fournissons le livret avec les téléchargements. »

Pour attirer de nouveaux clients, Qobuz peut se targuer d’avoir un catalogue de 60 millions de titres, soit l’équivalent de ceux d’Amazon Music, Apple Music, ou Spotify. Pour les abonnements annuels, ils vont de 199,99€ à 299,99€. La plateforme a également mis sur pied quelques 300 000 critiques d’albums et 130 000 textes biographiques retraçant la carrière des artistes disponibles. « Nous sommes le seul service de ce type à proposer du téléchargement dans les offres de base, sans surcoût. Cela représente 13 années de travail pour mettre sur pied une offre taillée pour les connaisseurs », indique Georges Fornay.

Qobuz, fondé par Alexandre Leforestier et Yves Riesel, est disponible dans 12 pays d’Europe, dont l’Allemagne, l’Espagne, l’Italie, le Luxembourg et le Royaume-Uni. La start-up a également ouvert un bureau aux États-Unis en 2019. L’équipe est forte de 70 salariés à temps plein, et fait appel à 20 indépendant pour la rédaction de ses contenus éditoriaux.

Avec cette nouvelle levée de fonds, Qobuz voit grand. « Nous ouvrirons six nouveaux pays d’ici à la fin décembre 2020. Il va s’agir d’évangéliser, en montant de grandes opérations marketing, tout en investissant dans la R&D. » explique Georges Fornay.

Denis Thébaud, le CEO, commentait : « Nous sommes très fiers de cette nouvelle levée de fonds auprès de nos actionnaires historiques, qui témoigne de leur confiance dans notre modèle. Cette fin d’année s’annonce riche de projets exaltants pour Qobuz. Nous sommes également très heureux de l’arrivée de Georges Fornay, Céline Gallon et d’autres professionnels expérimentés qui ont à cœur de porter les ambitions de notre marque. Nous sommes prêts à accélérer notre présence internationale ».