Au mois de septembre dernier, Steve Wozniak, cofondateur d’Apple, a annoncé la création d’une startup baptisée Privateer en partenariat avec Alex Fielding. Si l’on sait que la firme veut s’attaquer au fléau des débris spatiaux, de plus en plus d’informations émergent sur les plans concrets de l’entreprise spatiale.

Répertorier tous les débris spatiaux

Lors d’une interview accordée au média TechCrunch, Alex Fielding a en effet révélé que Privateer souhait créer « le Google Maps de l’espace ». L’entreprise ambitionne ainsi de documenter tous les débris spatiaux se trouvant en orbite terrestre, à savoir leur taille, leur localisation, leur forme, leur matière, etc. Si certaines de ces informations seront mises à disposition du public gratuitement, elles pourront également être vendues à des acteurs privés.

L’ensemble de ces données permettront aux opérateurs de satellites et aux autres membres de la communauté spatiale de mieux évaluer la menace que représentent les débris, et d’améliorer leurs prévisions quant à la durée pendant laquelle les débris resteront en altitude, explique de son côté Moriba Jah, qui a récemment été embauché en tant que chef scientifique de la startup.

Ainsi, à la manière d’un SpaceX pour les lancements de la NASA, Privateer pourrait largement aider les agences spatiales dans le secteur des débris spatiaux.

Un danger toujours plus important

Car il s’agit d’un problème de plus en plus important. Selon l’Agence spatiale européenne (ESA), il existe près de 36 500 objets de plus de 10 cm en orbite terrestre et plus d’un million de débris faisant plus de 1 cm et allant à 10 cm. Enfin, l’agence estime le nombre de débris spatiaux faisant plus d’1 mm et allant jusqu’à 1 cm à plus de 330 millions. Il est important de savoir qu’une collision avec des objets, même de petites tailles, peut représenter un réel danger pour la vie des astronautes se trouvant à bord des stations spatiales… Et le nombre croissant d’objets en orbite augmente largement le risque d’accidents.

Au mois de mai par exemple, un minuscule impact a été observé sur un bras robotique équipant l’ISS. Si cet incident est mineur, il suggère que le débris en cause était trop petit pour être répertorié par la Space Force. Plus récemment, le test d’une arme antisatellite par la Russie a créé plus de 1 500 débris spatiaux en plus, causant par la même occasion un léger mouvement de panique pour les agences spatiales, craignant pour l’ISS.

À la présence déjà immense, et qui s’accroît de jour en jour, de ces objets, viennent s’ajouter les grandes constellations de satellites comptant des milliers d’appareils, à l’instar de Starlink de SpaceX ou du Projet Kuiper d’Amazon. De plus en plus de scientifiques craignent que nous atteignons le syndrome de Kessler, un scénario durant lequel le nombre de débris augmente de façon exponentielle à force d’entrer en collision les uns avec les autres. Certains estiment d’ailleurs que c’est d’ores et déjà le cas…

Steve Wozniak.

Steve Wozniak a fondé Privateer avec Alex Fielding. Photographie : Wikimédia / Michael Förtsch / CC BY-SA 4.0

Premier lancement en février 2022

L’ambition de Privateer est de prévenir le scénario catastrophe. Afin de documenter les débris spatiaux, la startup veut lancer progressivement des centaines de satellites. D’ailleurs, le tout premier, baptisé Pono 1, quittera la Terre le 11 février prochain. D’une toute petite taille, il sera équipé de quarante-deux capteurs, dont douze sont des caméras optiques. Le corps du satellite sera fabriqué en fibre de carbone et imprimé en 3D, selon une approche qui permet d’obtenir une pièce unique et solide ayant la même rigidité que le titane ; au lieu d’être propulsé, le satellite sera orienté à l’aide de torques magnétiques, un petit dispositif qui génère du courant électrique pour le contrôle d’attitude.

Après quatre mois passés en orbite, Pono 1 viendra se détruire dans l’atmosphère terrestre. Son successeur, Pono 2, devrait être lancé en avril 2022. Si l’on ignore avec quelle entreprise Privateer a établi un partenariat pour ses lancements, on sait qu’elle va collaborer avec Astroscale, une startup de logistique et de services orbitaux qui se concentre sur le développement d’un satellite capable d’enlever les débris spatiaux. La firme de Steve Wozniak a également passé un accord avec l’U.S. Space Force.

Les ambitions de Privateer sont louables et nécessaires. Reste désormais à voir combien de temps la startup prendra pour documenter les débris, en espérant que son travail permettre d’éviter le pire en orbite terrestre, où le cosmos est littéralement pollué par les restes de nos objets spatiaux.