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Aux États-Unis, l’avenir de TikTok n’a jamais été autant remis en question. Une proposition de loi pouvant mener à son interdiction semble avancer rapidement dans le processus législatif. Le texte prévoit un ultimatum : ByteDance, maison mère du réseau social, aura 6 mois pour le vendre, sous peine d’interdiction. Tous les regards se tournent vers le Sénat, prochaine institution à devoir s’exprimer. Toutefois de nombreuses interrogations subsistent, la réaction de la Chine et la résistance de la plateforme sont autant d’éléments à prendre en compte. Avec Mathilde Velliet, chercheuse au Centre Géopolitique des technologies de l’Ifri, Siècle Digital a questionné la probabilité de voir ce projet aboutir.

TikTok a encore plusieurs cartes en main

Outre Atlantique, TikTok compterait 170 millions d’utilisateurs. Malgré son importance dans les usages numériques des Américains, Washington tente de l’interdire depuis des années. Dès 2020, à la fin du mandat de Donald Trump, il y a eu de « premières actions de l’administration Trump. D’abord en août, le président essaye d’interdire par décret présidentiel. Ensuite, il lance aussi une procédure via le comité de contrôle des investissements entrants aux États-Unis », rappelle Mathilde Velliet. Le Montana a également tenté sa chance. En mai 2023, son gouverneur a adopté une loi visant à bannir TikTok de l’État. Le réseau social l’a immédiatement contestée en justice et a obtenu gain de cause.

Le nouveau projet de loi, lui, avance vite. Le Sénat doit désormais se prononcer, mais un flou demeure quant à sa position. « Ce projet de loi a été proposé le 5 mars à la Chambre. Ensuite, il a été voté à l’unanimité en Commission. Plus récemment, il a été voté avec une écrasante majorité à la Chambre des représentants », explique la spécialiste. Malgré ces premiers votes positifs, l’adoption par le Sénat n’est pas garantie. « Actuellement, il y a beaucoup de débats liés à ce texte », affirme-t-elle. Des doutes portant notamment sur une possible violation du premier amendement de la Constitution, garantissant la liberté d’expression. Selon la chercheuse, il reste néanmoins possible « qu’une autre version de ce texte soit adoptée ».

Même en admettant que le Sénat adopte le texte, il resterait bon nombre d’obstacles. Le premier d’entre eux étant TikTok. « C’est à peu près sûr qu’il y aura des batailles juridiques acharnées. L’histoire le montre ces derniers temps, TikTok est à chaque fois parvenu à mettre en pause l’application d’interdictions le concernant », à l’instar de ce qu’il s’est passé dans le Montana, note-t-elle. Le dernier obstacle, et pas des moindres, se trouve être Pékin. Il y a fort à parier que le gouvernement chinois s’opposera à une vente de TikTok à une entreprise étrangère. En 2020, « les autorités chinoises ont soumis les algorithmes au contrôle des exportations chinoises. Par conséquent, pour que TikTok puisse être vendue à des entreprises non chinoises avec son algorithme, il faudra un accord du gouvernement chinois. Ça, ce n’est pas du tout sûr », confirme Mathilde Velliet.