Intel, société américaine spécialisée dans les semi-conducteurs, a annoncé l’arrivée prochaine d’une nouvelle puce quantique basée sur une nouvelle technologie, le Tunnel Falls. En parallèle, plusieurs partenariats avec des instituts de recherche et des laboratoires ont été dévoilés le 15 juin 2023 afin d’accélérer sur la création de modèles quantiques performants.
En informatique quantique, tout l’enjeu consiste à atteindre le qubit parfait. La quasi-majorité des ordinateurs quantiques conçus à l’heure actuelle proposent des qubits qui peuvent comporter des erreurs. C’est la raison de la course au qubit : plus leur nombre est conséquent, plus il est facile de transporter une information sans qu’elle rencontre une erreur. De son côté, Intel compte sur sa nouvelle technologie pour remporter ce marathon.
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Le Tunnel Falls ou, ou comment se démarquer
Ce nouveau procédé s’appuie sur les technologies CMOS également exploitées dans la production de processeurs classiques. Afin de réduire ses coûts de production et assurer la reproductibilité à grande échelle de ses composants quantiques, Intel se base sur un procédé industriel qu’elle maîtrise.
James Clarke, directeur de la division quantique d’Intel, a repris les propos d’Owain Vaughan, chercheur spécialisé dans le quantique, en affirmant que « le silicium pourrait être le matériau ayant le plus grand potentiel pour fournir une informatique quantique à grande échelle ». En partant d’un transistor à base de silicium, les chercheurs ont réussi à concevoir un qubit de spin.
Ce type de qubit est considéré par les spécialistes comme les plus intéressants pour mettre au point des puces quantiques. A une température extrême, 1,6 degré Kelvin, soit -271,55 degrés Celsius, les chercheurs piègent un à un des électrons, particule élémentaire d’un atome afin de les transformer en qubit.
Grâce à cette méthode, Intel a réussi à concevoir des puces comprenant entre 4 et 12 qubits de spin. En associant un certain nombre de puces entre elles, un système quantique peut être mis au point, exploitant des centaines, voire des milliers de qubits de spin. À terme, l’objectif serait de proposer plus de qubits de spin dans ces puces, afin que les systèmes quantiques formés grâce à ces composants soient beaucoup plus performants.

Chaque agrandissement représente une partie de la galette (wafer) ayant été produit à l’aide de la technologie Tunnel Falls. De la gauche vers la droite, la puce test, la boîte quantique, et enfin, la zone où se situe un des qubits. Illustration : Intel.
Intel main dans la main avec la recherche
Pour performer dans ce secteur, et se démarquer de ses concurrents, Intel a décidé de bâtir un écosystème de recherché dédié à l’informatique quantique. L’entreprise a annoncé qu’elle collaborerait avec l’Université du Maryland, spécialisée dans l’informatique quantique.
Le laboratoire va pouvoir travailler avec les puces Tunnel Falls d’Intel pour mener de nouvelles expériences sur les qubits de spin en silicium. De la même manière, l’Université de Rochester, l’Université du Wisconsin-Madison, et les laboratoires Sandia dépendant du département de l’énergie des États-Unis auront accès à cette nouvelle technologie.
Grâce à ces partenariats, Intel a pour ambition sur le moyen terme d’améliorer les performances du Tunnel Falls afin de l’intégrer dans son Kit Quantum Software Development. Dévoilée en mars 2023, cette suite d’outils a pour objectif d’accompagner les développeurs à transiter de l’informatique classique vers l’informatique quantique.
Pour l’heure, les entreprises investissent à perte dans le secteur
Depuis le début de la décennie, les financements réalisés pour faire avancer l’informatique quantique n’obtiennent pas de gros retours sur investissements. Tout au long de la décennie 2020-2030, les gouvernements, les fonds d’investissement, ainsi que les entreprises, dont Intel via leur branche recherche & développement dépensent bien plus d’argent qu’ils n’en gagnent.

Ce n’est qu’en 2029 que les revenus commerciaux générés par l’informatique quantique seront égaux aux investissements réalisés. Graphique : IDC, Pitchbook, McKinsey.
L’informatique quantique n’en est qu’au stade des preuves de concepts. Si de nombreuses entreprises comprennent son utilité, notamment en termes de vitesse de calcul et d’exécution, peu d’entre elles franchissent le pas. Par conséquent, les résultats commerciaux ne sont pas satisfaisants, ce qui n’incite pas les entreprises à investir dans le secteur. Certains analystes pensent même que l’informatique quantique est en passe de vivre une traversée du désert.
Intel ne prend pas cette voie. L’année prochaine, la société proposera sa nouvelle génération de puces quantiques toujours basées sur le Tunnel Falls. Par la suite, le spécialiste des semi-conducteurs souhaite, grâce au développement de systèmes quantiques comportant des milliers de qubits, corriger les erreurs quantiques. De fil en aiguille, l’entreprise pourrait continuer à développer des puces quantiques de plus en plus fiables, atteignant un jour, les milliers puis les millions de qubits.
La firme de Pat Gelsinger espère à l’aube de la décennie suivante être à la base de toute l’informatique quantique grâce à Tunnel Falls. De nombreuses tâches en lien avec la cryptographie, la chimie, les modèles climatiques ou la dynamique des fluides pourront être réalisées bien plus rapidement qu’avec un ordinateur classique.