L’Union européenne interroge actuellement les acteurs de l’industrie du jeu vidéo afin de déterminer si le rachat d’Activision Blizzard par Microsoft pose des risques pour la concurrence. Une nouvelle preuve de la méfiance des régulateurs quant aux importantes fusions d’entreprises.

Le rachat le plus important de l’histoire des jeux vidéo

La firme de Redmond a annoncé l’acquisition du studio Activision Blizzard en janvier 2022 pour 68,7 milliards de dollars. Avec des titres comme Call of Duty ou World of Warcraft à son actif, Blizzard est l’un des éditeurs les plus importants du secteur, et son rachat par Microsoft constitue sans aucun doute la plus grande opération de la sorte dans l’histoire du jeu vidéo.

La semaine dernière, Microsoft a soumis son projet d’acquisition auprès de la Commission européenne, cette dernière ayant jusqu’au 8 novembre pour l’autoriser. Dans le cas contraire, elle lancera une enquête qui devrait durer au moins quatre mois.

Dans ce contexte, l’agence de presse Reuters rapporte que les régulateurs ont envoyé un document d’une centaine de questions aux développeurs de jeux vidéo, aux éditeurs, aux distributeurs, aux systèmes d’exploitation concurrents de Microsoft, ainsi qu’aux fournisseurs de services cloud. Parmi eux, on retrouve Nvidia, Sony, Google Stadia, Amazon Luna ou encore Facebook Gaming.

Leur objectif : déterminer si le rachat aura un impact négatif sur la compétitivité des rivaux de la firme de Redmond.

Qu’a demandé l’UE aux concurrents de Microsoft ?

Le document demande aux entreprises spécialisées dans le gaming si Microsoft sera incitée à bloquer l’accès de ses rivaux aux jeux les plus vendus de Blizzard, et si l’acquisition affectera leur pouvoir de négociation concernant les conditions de vente de jeux pour consoles et PC via la Xbox et son offre de streaming de jeux en ligne, Game Pass.

Les régulateurs cherchent également à déterminer l’importance de la franchise Call of Duty pour les distributeurs de jeux pour consoles, les services tiers d’abonnement multi-jeux sur ordinateurs et les fournisseurs de services de streaming de jeux vidéo. Elle a ainsi demandé aux différents opérateurs s’ils pensaient que Microsoft rendrait les grosses franchises du studio exclusives à ses produits.

Des personnages issus des jeux d'Activision Blizzard.

Activision Blizzard compte plusieurs franchises très populaires à son actif. Image : Activision Blizzard

Leurs interrogations s’étendent au-delà de l’industrie du gaming. Ainsi, ils ont demandé si les clauses d’exclusivité du géant américain renforceraient le système d’exploitation Windows face à ses concurrents, et si l’ajout d’Activision à ce dernier, à ses services d’informatique cloud et à ses outils logiciels liés aux jeux allaient lui conférer un avantage dans le secteur des jeux vidéo.

Pour l’heure, Microsoft se veut rassurante : « L’examen de l’opération par la Commission européenne progresse conformément au calendrier et au processus réglementaires prévus, et nous restons confiants quant à la conclusion de l’acquisition au cours de l’exercice 2023 », a déclaré l’un de ses porte-paroles.

Les régulateurs se méfient d’une telle acquisition

Pourtant, l’Union européenne n’est pas la première institution à se méfier de l’acquisition. Si cette dernière devrait permettre à Microsoft de rivaliser avec les géants Sony ou Tencent, elle soulève de nombreuses questions. Le mois dernier, La Competition and Markets Authority britannique (CMA) a décidé d’ouvrir un examen approfondi sur le rachat après avoir constaté qu’il pourrait entraîner une « diminution substantielle de la concurrence » sur les marchés des consoles de jeux, des abonnements multi-jeux et du cloud.

La Federal Trade Commission (FTC), agence américaine chargée de surveiller les pratiques anti-concurrentielles, enquête elle aussi sur le dossier. Pour l’heure, Microsoft n’a pas détaillé ses projets pour Activision Blizzard ; on peut très grandement supposer que les jeux de l’éditeur seront inclus dans l’offre Game Pass, mais la grande question est de savoir s’ils deviendront exclusifs à Microsoft.

La firme de Redmond a minimisé l’acquisition par le passé en assurant que Blizzard n’avait pas de jeux incontournables à son actif, mais il n’est pas certain que les régulateurs soient du même avis.