Gaia-X, le projet d’infrastructure européenne de la donnée visant à garantir une certaine indépendance de l’UE vis-à-vis des GAFA et BATX, a accueilli 212 nouveaux membres dont des entreprises chinoises et américaines. Une annonce étonnante pour un projet qui se veut souverain.

Gaia-X : un projet encore mal compris

Annoncé en juin 2020 à l’initiative de la France et de l’Allemagne, le projet Gaia-X n’est pas un projet de cloud européen dont l’ambition serait de créer un acteur capable de concurrencer les GAFA et autres BATX. Il s’agit plutôt d’une infrastructure européenne commune des données visant à établir des standards européens sur le traitement des données : principes de sécurité, interopérabilité, et portabilité. La mise en place d’un label Gaia-X, permettra en outre de donner une plus grande visibilité aux services de cloud qui existent chez les acteurs européens.

L’ensemble de ces standards vise à garantir à l’Europe la maîtrise de ses données pour éviter que des données stratégiques européennes ne se retrouvent sous juridiction américaine, notamment. Une initiative qui bénéficiera également au consommateur puisqu’elle lui permettra d’éviter de se retrouver prisonnier d’un acteur américain, ou chinois.

Les entreprises chinoises et américaines s’invitent à la table

Gaia-X annonçait fin mars accueillir 212 nouveaux membres (pdf) dont plusieurs grands noms américains tels que Microsoft, Google, ou Salesforce, mais aussi 3 géants chinois : Huawei, Alibaba, et Haier. Une annonce qui a soulevé de nombreuses critiques de la part de ceux qui se demandent comment assurer sa souveraineté si l’on permet aux entreprises étrangères de faire partie des discussions.

Le conseil d’administration de l’association européenne Gaia-X a donc tenu à rappeler certains points. Tout d’abord la gouvernance est hautement verrouillée par les 22 membres fondateurs, composés à 50/50 par des entreprises et institutions françaises et allemandes. Par ailleurs, les membres étrangers ne constituent que 8% du nombre total. D’après Hubert Tardieu, le président du conseil d’administration de Gaia-X, il était toutefois nécessaire d’inviter les entreprises étrangères au projet : « 75% de l’offre cloud est faite par les Gafa. Par conséquent, ne pas les avoir à bord, nous condamne à être un acteur qui complémente une offre mais dont il n’a pas le contrôle ». Effectivement, comment assurer l’interopérabilité entre les plateformes si ceux qui possèdent la donnée ne sont pas invités aux discussions.

Les entreprises américaines et chinoises sont donc plus là pour prendre le pouls et se préparer aux futures annonces du projet. Les fournisseurs étrangers devront en effet s’adapter aux normes européennes et non l’inverse. En cas de refus, ces derniers ne pourront proposer des offres labellisées Gaia-X. Ils pourront tout de même continuer à commercialiser leurs solutions sur le marché européen en dehors de cette structure, mais prennent le risque de perdre certains clients.

Les premières solutions labellisées Gaia-X devraient apparaître en décembre 2021. En attendant, un dernier point épineux doit encore être traité. Actuellement, et en vertu du Cloud Act américain, les autorités américaines peuvent ordonner la divulgation de données stockées en Europe par des entreprises américaines. Un point embêtant pour une Europe qui se veut maîtresse de sa donnée. L’association travaille donc actuellement sur un label qui « qui permettrait de s’assurer que les données ne peuvent pas quitter le territoire européen ».