Des représentants du Congrès ont rendu publique le 8 décembre une lettre adressée aux directeurs généraux de Nvidia et Intel. Ils demandent, dans cette lettre, aux deux entreprises américaines de s’expliquer sur la vente de puces à une entreprise chinoise. Elles ont servi à construire un superordinateur utilisé pour surveiller et persécuter la population ouïghoure et autres minorités musulmanes de la région autonome du Xinjiang. Une relation d’affaires gênante révélée fin novembre.

Les puces vendues avant le placement sur liste noire du constructeur du superordinateur

Marc Rubio président de la sous-commission des relations étrangères du Sénat et Jim McGovern, président de la Commission executive du Congrès sur la Chine, ont décidé de prendre la plume pour poser quelques questions à Nvidia et Intel. Le New York Times avait révélé que des puces des deux entreprises américaines sont utilisées dans le superordinateur du « Urumqi Cloud Computing Center », un complexe installé dans la province du Xinjiang.

Ce superordinateur, le 135e plus puissant au monde, pose un sacré problème. Il est utilisé par la Chine pour mener une « police prédictive », anticipant les délits, faire de la reconnaissance faciale, vocale et visuelle ciblée contre la population ouïghoure et les musulmans de la région à l’extrême Nord-Ouest du pays. L’entreprise qui l’a conçu, avec l’aide de la technologie d’Intel et Nvidia, Sugon est réputée proche du pouvoir chinois et a été placée sur liste noire par les États-Unis en 2019. L’accord avec les sociétés américaines a été conclu quelques années auparavant.

L’appareil de surveillance de Sugon, c’est le volet numérique de la répression que mène la Chine depuis 2013 contre les Ouïghours, qui s’est accélérée en 2017. Selon des chiffres des nations unies plus d’un million de personnes seraient enfermées dans des camps en plein désert. Ces camps Pékin les désignent sobrement « centres de formation professionnelle » : ils serviraient à aider la population à obtenir un emploi pour éviter de tomber dans l’extrémisme islamiste. Pour les États-Unis et un certain nombre de pays et organisations internationales, ils sont surtout synonymes de violation des droits de l’homme, travail forcé, détention arbitraire, le tout visant à réprimer violemment la culture ouïghoure.

Les réponses de Nvidia et Intel très attendues par le Congrès

Naturellement, la participation indirecte d’entreprises américaines à la surveillance généralisée dont souffre cette population a de quoi interroger le Congrès américain. Jusqu’ici Nvidia s’est refusé à tout commentaire, expliquant tout juste ne pas être au courant de cette application de sa technologie. Intel, à la suite du courrier des deux élus, a ajouté via un porte-parole qu’elle ne tolère pas l’usage de ses produits pour violer les droits humains et qu’elle cesse ou restreint ses activités lorsqu’elle réalise qu’ils sont utilisés ainsi.

Une réaction qui ne répond, pour le moment, que très partiellement aux interrogations de Marc Rubio et Jim McGovern. Ils souhaitent en savoir plus sur les revenus qu’a rapportés le marché, sur leurs activités en Chine, sur les mesures de prévention contre l’utilisation de leurs produits en violation des droits de l’homme. Ils se demandent également si Nvidia et Intel avaient conscience de vendre des produits à une entité jugée à « risque pour la sécurité nationale ».

Les élus ont conclu leur missive avec cette phrase, « Nous attendons avec impatience vos réponses », ce ne sont probablement pas les seuls.