La Chine est un marché clé pour Apple, qui y produit tous ses iPhone et y réalise 15% de ses ventes. Voilà qui peut expliquer la succession de révélations embarrassantes pour la marque à la pomme. En quelques jours, on a appris que Apple avait retiré de son App Store une application de crowdsourcing utilisée par les manifestants hongkongais, mais aussi l’appli du site d’information américain Quartz de son store chinois, ainsi que l’émoji du drapeau taïwanais 🇹🇼 sur les téléphones hongkongais.

Apple a retiré mercredi 9 octobre HKmap.live, une application permettant de signaler les perturbations sur la route, utilisée massivement par les manifestants prodémocratie pour renseigner les positions de la police. Cette appli, lancée par des sympathisants de la cause, propose de remplir la carte avec différents emojis : 🐶 pour la police, 👷 pour les protestaires, 🦖 pour les forces spéciales de la police, ou 🗯️ pour le gaz lacrymogène.

HKmap.live, carte utilisée par les manifestants à Hong-Kong

Apple avait dans un premier temps refusé l’application sur son Store, avant de finalement l’accepter. Le Quotidien du Peuple s’en était ému il y a quelque jours dans un édito très critique contre l’entreprise américaine : « Est-ce qu’Apple a l’intention d’être complice des émeutiers ? ». Apple a préféré céder, plutôt que de s’attirer les foudres du pouvoir chinois.

La compagnie a expliqué sa décision dans un communiqué : « L’application montre les positions de la police et nous avons eu la confirmation auprès du Bureau hongkongais de cybersécurité et de lutte contre la criminalité technologique que l’app avait été utilisée pour cibler la police et lui tendre des embuscades, menacer la sécurité publique, et des criminels l’ont utilisée pour nuire à des habitants de zones où ils savaient qu’il n’y avait pas de forces de l’ordre ».

L’application de news Quartz censurée sur le territoire chinois

Apple aura plus de mal encore à justifier la décision de retirer l’application du site de news américain Quartz de son store chinois. Du fait de sa large couverture des événements à Hong-Kong, le site a déjà été bloqué par les opérateurs locaux sur tout le territoire chinois. Apple a envoyé récemment un avertissement au site d’information, lui signifiant que l’application >« contient du contenu illégal en Chine »

Le CEO de Quartz Zach Seward a fait parvenir un communiqué à The Verge : « Nous détestons ce genre de censure gouvernementale de l’Internet, et nous avons déjà plusieurs fois expliqué comment contourner de telles interdictions à travers le monde. » Zach Seward fait référence à l’utilisation de VPN, qui permettent de passer outre ces bannissements territoriaux. La frilosité d’Apple sur la question de Hong-Kong ne manque pas de rappeler celle de l’éditeur de jeu Blizzard qui a banni un joueur de ses tournois pour avoir montré son soutien à la cause hongkongaise.

La Chine applique une « tolérance zéro »

La censure prend parfois des formes moins brutales, mais tout aussi symboliques. Une des dernières mises à jour d’iOS, le système d’exploitation d’Apple a supprimé le drapeau taïwanais 🇹🇼 de la liste d’emojis disponibles pour les utilisateurs de Hong-Kong et de Macao. Le drapeau est encore visible s’il apparaît dans une conversation ou sur un site mais il n’apparaît plus sur le clavier. Taïwan est un « territoire indépendant » que la Chine considère néanmoins comme une de ses provinces.

Dans son virulent édito anti-Apple, le Quotidien du Peuple résume bien le nouveau problème posé aux multinationales en Chine : « Les entreprises étrangères ne comprennent probablement pas les sentiments et la façon de penser des Chinois. Nos ancêtres ont été persécutés. Mais aujourd’hui, nous sommes plus unis que jamais. Nous avons une tolérance zéro à l’égard des actes allant à l’encontre de nos principes. Donner une porte d’entrée à des « applications toxiques » blesse les sentiments du peuple chinois, déforme les faits concernant la situation à Hong Kong, et va à l’encontre des vues et des principes du peuple chinois ». Il semble qu’Apple ait bien compris le message.