Mark Rutte, Premier ministre des Pays-Bas, a dressé sur X, anciennement Twitter, un bilan de sa rencontre avec le président chinois Xi Jinping le 27 mars. Géopolitique, droits de l’Homme, relation commerciale, et sans surprise, semi-conducteurs : « bien sûr, nous avons parlé du secteur des semi-conducteurs, dans lequel les Pays-Bas et la Chine sont tous deux des acteurs majeurs ».

Un sommet Chine – Pays-Bas sous l’ombre des États-Unis

« Créer artificiellement des barrières technologiques et couper les chaînes industrielles et d’approvisionnement ne mènera qu’à la division et à la confrontation », a prévenu Xi Jinping selon le média officiel chinois CCTV. Une référence aux semi-conducteurs où les Pays-Bas occupent une position centrale via l’entreprise ASML. Une position qui lui vaut d’être coincé au milieu de la rivalité entre Pékin et Washington.

Pour leur politique visant à priver la Chine de la capacité de puces avancées, les États-Unis font pression sur La Haye. ASML détient le monopole mondial sur les machines de lithographie à ultraviolet extrême (EUV), la plus à la pointe du marché. Son exportation vers la Chine n’a jamais été autorisée depuis sa commercialisation en 2019.

Ce n’est pas le cas pour les modèles à ultraviolet profond (DUV), qu’ASML a longtemps eu le droit de vendre en Chine. En 2023 le gouvernement néerlandais a restreint l’export des versions les plus récentes de ces appareils. Désormais, selon les informations de Bloomberg et du Financial Times, les États-Unis veulent aller plus loin en poussant les Pays-Bas à interdire l’entretien et la réparation des outils déjà vendus en Chine.

Avant même la visite commencée le 26 mars, Reuters rapportait notamment que le Premier ministre chinois Li Qiang désirait obtenir l’assurance que de nouvelles restrictions ne seraient pas décidées auprès du ministre au Commerce néerlandais, Geoffrey van Leeuwen.

Des déclarations emplies de sous-entendus concernant ASML

Toujours selon les médias chinois, Xi Jinping aurait proclamé que « Le peuple chinois a également des droits légitimes au développement, et aucune force ne peut arrêter le rythme des progrès scientifiques et technologiques de la Chine ». Il aurait appelé Mark Rutte de « fournir un environnement commercial juste et transparent aux entreprises chinoises ».

Lorsque les États-Unis ont demandé aux Pays-Bas de restreindre l’export de machines DUV vers la Chine, l’initiative avait suscité quelques réticences au sein du Parlement et du gouvernement. La nouvelle démarche diplomatique suscite autant de grincements. La Chine est l’un des premiers marchés d’export d’ASML. Et La Haye ne souhaite pas froisser sa pépite qui menace de partir à cause de potentielles lois anti-immigration liées au succès de l’extrême droite aux dernières élections.

L’entreprise, tout en affirmant se conformer aux décisions politiques et confirmant qu’elles n’ont qu’un impact limité, plaide pour éviter un découplage. Ultra-mondialisée, la chaîne de valeur des semi-conducteurs peut difficilement se scinder en branche autonome, régionalisée. Xi Jinping lui-même à agiter cette menace, ce à quoi Mark Rutte aurait acquiescé, « puisque tout acte portant atteinte aux intérêts de développement de la Chine ne fera qu’un effet de boomerang ».