L’émergence de l’intelligence artificielle (IA) dans l’industrie musicale soulève de nombreuses questions juridiques. Une chanson peut être protégée par des droits d’auteur, ce qui n’est pas le cas pour la voix d’un artiste. Alors, à qui reviennent les droits d’auteur lorsque son timbre est utilisé pour produire des musiques via l’IA ?

Universal Music a décidé de s’emparer de ce sujet épineux. La major du disque est entrée en discussion avec Google pour réguler les titres générés à l’aide de cette technologie, et surtout obtenir sa part du gâteau. Warner Music Group, le troisième plus grand label de musique au monde, a rejoint la danse.

Un outil pour créer légalement des chansons à l’aide de l’IA

Frank Sinatra qui reprend la chanson de hip-hop “Gangsta’s Paradise”, Johnny Cash qui chante “Barbie Girl”… Des mélanges improbables conçus de toutes pièces par des internautes grâce à la puissance de l’IA. Les titres comptabilisent tous les deux des millions d’écoutes en ligne. Face à la popularité de ce type de reprises, généralement conçues sans le consentement ni de l’ayant droit ni a fortiori de l’artiste, les géants de l’industrie musicale veulent imposer un cadre juridique aux créateurs en herbe.

Universal Music et Google souhaitent concevoir un outil pour que les fans puissent créer, légalement, des chansons dans lesquelles l’IA imite la voix d’un artiste. Les détenteurs des droits seraient ainsi rémunérés. Pour le moment, aucun détail n’a été donné quant au fonctionnement de cette solution, ou aux tarifs qui seront pratiqués.

Le consentement de l’artiste sera essentiel

Certains artistes ont déjà complètement intégré l’IA à leur carrière, comme la chanteuse Grimes, qui permet à n’importe quel internaute d’utiliser sa voix à condition qu’il lui verse la moitié des droits des nouveaux titres.

Cependant, tout le monde ne voit la chose de cet œil. En avril dernier, un morceau produit par l’IA imitant les voix de Drake et de The Weeknd est devenu viral en ligne. Universal Music s’était alors empressé de la supprimer des plateformes de streaming pour violation des droits d’auteur. Quelques mois plus tard, Drake pointe du doigt une seconde fausse chanson, la qualifiant de « goutte d’eau qui fait déborder le vase ».

L’IA est loin de faire l’unanimité dans l’industrie musicale. Les artistes pourront accepter ou refuser de prêter leur œuvre au processus imaginé par Universal Music et Google.

« L’IA pourrait permettre aux fans de rendre le plus grand hommage à leurs idoles à travers un nouveau niveau de contenu généré par l’utilisateur, y compris de nouvelles reprises et mash-ups. Mais certains [artistes] pourraient ne pas l’apprécier, et c’est totalement compréhensible », a souligné Robert Kyncl, PDG de Warner Music, dans une note adressée à des investisseurs.

Ce projet permettrait aux labels de musique de contrôler davantage les processus de création via les nouvelles technologies et d’obtenir une manne de revenus supplémentaires. De son côté, Google renforcerait sa position sur le marché de l’IA, dominé par OpenAI et son partenaire Microsoft. L’entreprise de Mountain View s’est déjà attaquée au secteur musical avec MusicLM, une IA qui compose des chansons d’après un prompt.