Amazon souhaite garder une longueur d’avance sur les libraires. Le géant de l’e-commerce a annoncé, ce 27 juin, déposer un recours devant le Conseil d’État. Il attaque une mesure qu’il qualifie d’« excès de pouvoir » destinée à augmenter les frais de port sur les livres.

Amazon s’intéresse au pouvoir d’achat des Français

Le 4 avril dernier, la ministre de la Culture, Rima Abdul Malak, et le ministre de l’Économie et des Finances, Bruno Le Maire, ont cosigné un arrêté sur la tarification minimum de la livraison de livres. À partir du 7 octobre 2023, le coût devrait être de minimum 3 euros pour les commandes de livres inférieures à 35 euros. L’objectif du gouvernement est d’appliquer la loi du 30 décembre 2021 sur l’économie du livre, qui avait pour but d’inciter les acheteurs à se rendre en librairie, afin d’éviter ces frais de port.

D’après Amazon, la mesure serait « contraire au droit et à l’intérêt des consommateurs ». Frédéric Duval, directeur général d’Amazon France, déclare dans le communiqué que « cet arrêté va pénaliser les lecteurs, les auteurs et la lecture en général et nous appelons à faire valoir le droit dans l’intérêt des consommateurs. » Il ajoute que « cette mesure va porter un coup sévère au budget des Français et limiter leur accès aux livres à un moment où le pouvoir d’achat est une de leurs préoccupations premières ». Amazon assure que son offre en ligne et celles des libraires sont en « réalité complémentaires ». D’après l’entreprise, près d’un livre sur deux vendu par Amazon est expédié vers des petites villes et campagnes, « c’est-à-dire vers des territoires souvent dépourvus de librairies ».

Dans son communiqué, Amazon justifie son action en invoquant l’avis très critique rendu en février par la Commission européenne. Elle estime que le gouvernement français ne lui a pas démontré comment l’augmentation des frais de port servirait son objectif de maintenir un réseau dense et diversifié de librairies et la diversité autant que la qualité de l’offre éditoriale. Bruxelles avait déploré le manque d’alternatives moins restrictives de la part de Paris. Le géant de l’e-commerce appuie son argumentaire sur ce dernier point : « pour soutenir un réseau dense de librairies, des alternatives existent en effet qui ne pénaliseraient ni la lecture, ni le pouvoir d’achat des Français – par exemple la mise en place d’un tarif postal dédié, qui existe déjà pour les expéditions de livres vers l’étranger. »

Ce n’est pas la première fois qu’Amazon affronte le gouvernement français dans ce domaine. En 2014, le gouvernement français a mis en place une loi empêchant les entreprises de vendre des livres avec des frais de port gratuit. Les géants de l’e-commerce ont rapidement trouvé la faille en fixant la livraison à un centime.