Selon des informations exclusives de Mediapart, Deliveroo se trouve dans une situation très délicate en France. La plateforme de livraison de repas à domicile fait l’objet d’une double procédure menée d’une part par la justice, et de l’autre par l’Urssaf. L’ardoise réclamée pourrait bien lui être fatale.

Une ardoise de 100 millions d’euros pour Deliveroo ?

Déjà condamnée le 2 septembre 2022 à verser 9,7 millions d’euros à l’Urssaf pour travail dissimulé, l’entreprise fondée en 2013 à Londres par Will Shu est aujourd’hui une nouvelle fois dans le viseur des régulateurs. La double procédure dont il est aujourd’hui question porterait sur une période allant de 2018 à mi-2021. En comparaison aux « 2 000 emplois dissimulés » entre 2015 et 2016, cette fois-ci les faits reprochés sont d’une grande ampleur. La justice et l’Urssaf parlent de 60 000 emplois cachés.

D’après les informations de Mediapart, Deliveroo a même sollicité auprès du tribunal de commerce de Paris, la mise en place d’une procédure spéciale « pour l’aider à négocier ». Deliveroo avait aussi été condamné en juillet 2022 suite à la plainte d’un livreur qui avait réussi à caractériser sa mission comme « emploi fictif ». Seulement cette fois-ci, l’Urssaf pourrait réclamer plus de 100 millions d’euros, « voire plusieurs centaines de millions d’euros » comme l’explique Mediapart. Avec un chiffre d’affaires en France de 219 millions d’euros en 2020, on comprend que cette procédure pourrait être fatale à Deliveroo.

Depuis plusieurs années, c’est toujours le même problème : la plateforme se voit reprocher de faire travailler comme des indépendants les livreurs et livreuses qui utilisent sa plateforme. Pourtant, la justice a déjà considéré à plusieurs reprises que ces travailleurs devraient être considérés « comme des salariés classiques », avec un contrat de travail et tous les avantages liés. Un sujet qui a poussé la Commission européenne à publier un projet de directive en décembre 2021 pour établir une présomption de salariat.

Selon Margrethe Vestager, commissaire européenne en charge de la concurrence, « les faux indépendants concernés par la directive sont les travailleurs qui fournissent leurs services par le biais d’une plateforme numérique, qui travaillent aux côtés de travailleurs classiques et qui sont économiquement dépendants d’une seule et unique partie. Ces travailleurs pourraient donc prétendre au salariat ». Cette fois-ci, Deliveroo est vraiment dans l’embarras.

L’entreprise a même sollicité cet automne un « mandat ad hoc ». Une pratique souvent exercée lorsqu’il y a une possibilité de faillite. Deliveroo a également mandaté FHBX, l’un des plus gros cabinets français d’administrateurs judiciaires.