Depuis le mercredi 9 novembre, les utilisateurs disposant de produits Apple achetés en Chine devront réactiver la fonctionnalité Airdrop toutes les dix minutes lorsqu’ils voudront partager des fichiers avec des destinataires ne faisant pas partie de leur liste de contacts.

Ce changement introduit par la mise à jour iOS 16.1.1 interroge sur une volonté potentielle d’Apple d’agir conformément aux volontés autoritaristes du gouvernement chinois.

En effet, les manifestants pro-démocratie chinois, qu’ils se situent à Hong-Kong ou en Chine continentale se ré-approprient régulièrement les outils numériques (dont Airdrop) pour mener leur lutte, souvent clandestine, contre l’autoritarisme de l’État chinois. De nombreux cas avérés ont dévoilé que la fonctionnalité Airdrop permettait de partager des slogans anti-gouvernementaux et autres documents interdits en contournant la censure matérialisée par le système du « Grand Firewall » (ou Grand Pare-Feu).

Les raisons justifiant la restriction du fonctionnement d’Airdrop, ne concernant que le territoire chinois, n’ont pas été explicitées par Apple. La collusion avec le pouvoir chinois est donc une piste tangible, d’autant que des critiques similaires émergent déjà depuis plusieurs années. Dès 2019, le drapeau de Taïwan disparaissait des claviers pour les utilisateurs chinois, face aux revendications territoriales chinoises sur ce territoire insulaire de presque 24 millions d’habitants. D’autres éléments auraient été volontairement invisibilisés tels que les mots « démocratie » et « droits humains ». Une enquête du New York Times datant de 2021 dénonçait l’accès illimité du gouvernement chinois aux données iCloud des citoyens chinois, accordé par Apple.

Les intérêts économiques semblent donc justifier la stratégie de « real politik » économique adoptée par Apple, dans un contexte ultra-concurrentiel sur le marché chinois des produits électroniques, où des entreprises comme Huawei et Oppo gagnent graduellement en importance. L’évolution des rapports entre l’entreprise dirigée par Tim Cook et les États souverains dont la Chine interroge donc inévitablement sur le champ d’action politique des géants du numérique : sont-ils des entités apolitiques ou de réels décideurs politiques ?