Cruauté envers les animaux, actes de tortures, mineurs dénudés, cadavres, voilà à quoi les modérateurs des réseaux sociaux sont exposés parfois quotidiennement. TikTok ne fait pas exception. Aux États-Unis, deux anciens modérateurs de la plateforme ont décidé de porter plainte contre un tribunal fédéral le 24 mars, révèle le média npr.

Les conditions de travail déplorable des petites mains du web

TikTok c’est un milliard d’utilisateurs actifs mensuels pour environ 10 000 modérateurs à travers le monde. Ces femmes et ces hommes sont chargés de filtrer, bloquer les contenus contrevenant aux règles d’utilisation de la plateforme passées entre les mailles de la modération automatisée.

Deux d’entre eux, employés par deux sous-traitants de TikTok, accusent la plateforme et sa maison mère ByteDance de ne pas les avoir suffisamment protégés des vidéos « hautement toxiques et extrêmement dérangeantes » auxquels ils ont été exposés.

Ils estiment que la plateforme ne les a pas préservés des risques de traumatisme émotionnel, de l’anxiété, de la dépression, du stress post-traumatique, en infraction avec le droit du travail californien.

Au contraire, TikTok a choisi de privilégier la quantité de vidéo traitée, en imposant des quotas extrêmement exigeants : plus de 80% de précision dans les décisions prises après un examen de 25 secondes d’une vidéo. Un seuil élevé incitant de repasser plusieurs fois un même extrait pour éviter les erreurs.

Le salaire des deux plaignants était lié à leur efficacité dans le traitement des contenus. Leurs journées duraient douze heures avec deux pauses de quinze minutes et une heure de pause déjeuner. L’accompagnement proposé par ailleurs a été pointé du doigt, jugé très insuffisant. La plainte note également qu’un accord de non-divulgation interdisait aux employés de partager ce qu’ils enduraient avec leurs proches.

TikTok n’est pas le seul réseau social accusé de maltraiter les ouvriers du web 2.0, indispensable pour les plateformes. En 2020, Facebook a accepté un règlement de 52 millions de dollars à 11 000 de ses modérateurs pour ces mêmes raisons. Les mêmes avocats qui s’occupaient du recours collectif contre Facebook sont en charges de ce nouveau cas.

TikTok assure mettre tout en œuvre pour protéger ses modérateurs

Il se trouve que les entreprises de sous-traitances pour lesquels travaillaient les plaignants collaboraient également avec Google et Facebook. Il semble cependant que ces deux dernières appliquent les recommandations du National Center for Missing and Exploited Children.

Cette organisation non lucrative a mis au point des astuces visuelles pour épargner les modérateurs autant que faire se peut. TikTok, pour des raisons d’efficacité, selon la plainte, n’appliquerait pas ces conseils.

Sollicité par npr, TikTok assure que l’entreprise « s’efforce de promouvoir un environnement de travail bienveillant pour ses employés et ses sous-traitants ». Elle a expliqué avoir mis en place « une gamme de services de bien-être afin que les modérateurs se sentent soutenus mentalement et émotionnellement ». À la justice américaine de trancher.