Aux États-Unis, une intelligence artificielle (IA) ne peut pas obtenir le statut d’inventeur sur un brevet officiel, selon la juge fédérale Leonie Brikema.

Il y a quelques jours, nous vous parlions d’une IA nommée Dabus, dont la mission principale est de générer des idées nouvelles et d’inventer. Elle est en effet devenue la première intelligence artificielle au monde à obtenir le statut d’inventeur, en Australie et en Afrique du Sud. La tâche est toutefois bien plus difficile outre-Atlantique, où Stephen Thaler, membre de l’Artificial Inventor Project, a poursuivi en justice l’U.S. Patent and Trademark Office, instance administrative chargée d’émettre des brevets et des marques déposées.

Celui-ci a en effet refusé la demande de brevet soumise par Thaler sur laquelle Dabus figure comme l’inventrice d’un nouveau type de feu clignotant et d’un récipient à boisson. Selon la loi américaine, un inventeur doit être un « individu » ; la juge Leonie Brikema, en charge de l’affaire, en déduit ainsi qu’il doit obligatoirement s’agir d’une « personne naturelle ». Elle justifie notamment cela par l’utilisation des mots « lui-même » ou « elle-même » dans le Patent Act, la loi américaine sur les brevets.

Un drapeau américain flotte devant un palais de justice.

Le bureau des brevets américain a refusé d’accorder le statut d’inventeur à une IA. Photographie :
Brandon Mowinkel / Unsplash

« Nous sommes respectueusement en désaccord avec le jugement et nous prévoyons d’en faire appel. Nous pensons que l’inscription d’une IA en tant qu’inventeur est conforme à la fois au langage et à l’objectif de la loi sur les brevets », a déclaré Ryan Abbott, professeur de droit qui supervise l’Artificial Inventor Project.

Selon Stephen Thaler, le fait de refuser le statut d’inventeur à une IA représente un véritable frein à l’innovation : « L’autorisation des brevets pour les inventions générées par l’IA se traduira par une plus grande innovation. Cela encouragera le développement de l’IA capable de produire des résultats brevetables en rendant ces résultats plus précieux… En revanche, refuser la protection par brevet des inventions générées par l’IA menace de saper le système des brevets en n’encourageant pas la production d’inventions ayant une valeur sociale ».

Pour les législateurs américains toutefois, les IA ne sont, pour le moment, pas en mesure d’inventer quelque chose sans intervention humaine, mais la juge Brikema n’exclut pas que cela soit le cas dans l’avenir : « Avec l’évolution de la technologie, il se peut qu’un jour l’intelligence artificielle atteigne un niveau de sophistication tel qu’elle puisse répondre aux définitions acceptées de l’invention. Mais ce moment n’est pas encore arrivé et, si c’est le cas, il appartiendra au Congrès de décider comment, le cas échéant, il souhaite étendre la portée du droit des brevets… ».

Cette affaire illustre parfaitement les défis juridiques qui seront de plus en plus fréquemment soulevés avec l’avènement de l’intelligence artificielle. Il est par ailleurs important de noter que l’Union européenne et le Royaume-Uni ont également refusé d’accorder le brevet d’invention à Dabus.