Le moratoire sur les transmissions électroniques a été renouvelé par l’Organisation mondiale du Commerce (OMC) à la dernière minute de la session de négociation du vendredi 1er mars, elle-même ajoutée au dernier moment. Cette décision est présentée comme la seule réussite de la 13e réunion ministérielle des pays membres de l’OMC (MC13), à Abu Dhabi.
L’Inde, l’Indonésie et l’Afrique du Sud ont milité sans succès pour la fin du moratoire
La directrice générale de l’OMC, Ngozi Okonjo-Iweala, avait prévenu en amont de la semaine de discussion entre les 164 pays participants « qu’il serait difficile d’obtenir des résultats » tant la situation géopolitique mondiale est tendue et que l’année est quasi inédite par le nombre d’élections en cours.
Inscrivez-vous à la newsletter
En vous inscrivant vous acceptez notre politique de protection des données personnelles.
Si, diplomate, elle a présenté le sommet comme réussi, l’avis unanime est plutôt inverse, à l’exception du commerce électronique. En 1998, la question du « commerce électronique » a été introduite au sein de l’OMC au cours de la seconde réunion ministérielle de l’organisation. C’est cette même année qu’a été décidée la mise en place d’un moratoire sur les transmissions électroniques, sans cesse renouvelé depuis.
Tough last moments for the Ministerial Conference. Negotiating to the wire. But finally, a great ending with great results! We didn’t get everything we wanted, but we got a lot.
⁃E Commerce Moratorium extended
⁃Least Developed Countries graduation issues solved
⁃Review of… pic.twitter.com/VXMYt7N8ab— Ngozi Okonjo-Iweala (@NOIweala) March 2, 2024
Ce moratoire interdit d’imposer des droits de douane sur les flux numériques : logiciels, données électroniques, médias transmis par canaux électroniques… L’objectif était alors de favoriser la croissance mondiale d’Internet.
Aujourd’hui, les grandes entreprises, notamment américaines, plaident pour le maintien de ce moratoire, voire de faire graver cette règle dans le marbre. L’Union européenne, en la personne du commissaire en charge du Commerce, Valdis Dombrovskis s’est déclaré « très soulagé » par le prolongement du moratoire. Le vice-président de la Commission explique qu’il permet « de maintenir le libre-échange des services en ligne, tels que le transfert de musique, de film, de jeux, de logiciels ou de mises à jour d’applications ».
Au contraire, certains pays, l’Inde, l’Indonésie et l’Afrique du Sud, estiment perdre des revenus importants sans ces droits de douane, au bénéfice des géants de la Tech.
L’OMC à la recherche d’une solution durable
Une situation qui s’accentue avec la multiplication des échanges numérisés, le streaming, etc. Environ 25 % du commerce mondial s’effectue sous forme numérique. Selon la Chambre de commerce international, relayée par Nikkei Asia, les flux de données transfrontaliers devraient représenter 11 000 milliards de dollars d’ici 2025.
Seule l’Indonésie a déjà une législation pour imposer les biens numériques. Le niveau d’imposition est nul du fait du moratoire de l’OMC, rappelle Reuters. Il existe une bataille de chiffre sur les pertes estimées. Une telle mesure douanière n’ayant jamais réellement existé il est difficile d’en estimer les conséquences. Une incertitude pointée par les entreprises dépendantes de données et de services numériques. Autrement dit une très grande partie d’entre elles de nos jours.
Ce « succès » de la MC13 sera de retour sur la table pour la 14e réunion ministérielle, prévue pour 2026. Au niveau européen Valdis Dombrovskis s’est engagé dans la poursuite des efforts pour « créer un système commercial mondial plus inclusif, prévisible et fondé sur des règles, adapté à l’économie numérique » et la recherche d’une « solution à long terme pour les droits de douane sur les transmissions électroniques ». Une issue plus qu’incertaine devant les difficultés de l’institution.