En 2014, une nouvelle pratique émerge : le nocode. Son principe est simple, il consiste à créer sa plateforme sur le web sans utiliser une seule ligne de code. Le secteur, représentant plusieurs milliards d’euros, a eu son sommet à Paris, ce vendredi 30 septembre. Le moment opportun pour Siècle Digital d’échanger avec un acteur de cet environnement, Fabien Rozzi, responsable des ventes aux entreprises chez Make.

Siècle Digital : Quelle est votre vision du nocode ?

Fabien Rozzi : Nous voyons dans le nocode une révolution qui vient du bas avec une nouvelle génération de type d’employés : ils ont une capacité à intégrer de nouveaux outils très rapides. C’est une communauté incroyable et nous voyons ça comme une solution pour continuer de grandir.

Le potentiel du nocode est, d’un côté, pour les start-up pour construire un paysage informatique très rapidement sans avoir la main-d’œuvre nécessaire. Mais aussi, de l’autre, pour les entreprises qui ont déjà ce paysage en place, avec de la gestion des ressources, de la gestion de la relation client, ou encore un système d’achat et de facturation. Celles-ci sont souvent face à un problème de communication par exemple, le système d’achat va utiliser son outil, le service financier va utiliser le sien…

Nous voyons dans ces situations du potentiel pour une plateforme qui va pouvoir connecter tous les systèmes et éviter beaucoup de travail manuel, où l’employé va devoir noter les informations d’un système à un autre. Le nocode est assez nouveau pour ces organisations, mais la nouvelle génération encourage ce type de solution. Les départements IT dans les entreprises, avec la pénurie de développeurs, ne peuvent pas créer une solution pour chaque cœur de métier.

SD : Le nocode a-t-il une limite pour les utilisateurs ?

FR : La technologie avance et progresse donc je dirais que nous ne voyons aucune limite pour le nocode. C’est-à-dire qu’aujourd’hui, les limitations purement techniques ne vont pas s’ancrer dans le temps. Les seules limitations seront l’organisation et la mentalité. Les entreprises sont toujours réfractaires aux nouvelles choses, mais les écoles de nocode qui se créent peuvent amener leur connaissance dans ce monde. Pour en revenir à l’IT, avec le low code, les équipes compétentes vont pouvoir développer des solutions beaucoup plus rapidement.

SD : Les services IT avec Make ont-ils un outil de gouvernance ?

FR : Les équipes IT peuvent administrer, gouverner, donner des droits d’accès spécifiques aux différents métiers. Chaque service pourra avoir sa propre organisation. Les équipes ont aussi des accès pour développer des solutions en fonction de leurs besoins. Mais aussi, pour créer des briques de nocode réutilisables par d’autres services. L’IT peut devenir un activateur d’innovation.

SD : Le nocode est-il totalement sécurisé ? Si chaque employé peut créer sa solution, n’y a-t-il pas un risque de faille ?

FR : Les solutions utilisées sont les mêmes que les outils à l’origine. Dans le cas de Make, nous prenons les informations d’un système, éventuellement nous les transformons, et pour finir, nous les injectons dans un autre système. Make ne récupère aucune information. Un client peut décider d’ajouter un module qui va connecter un système d’un stockage de données dans un datacenter, mais c’est l’espace de stockage qui va contenir l’information.

SD : L’entreprise Make, respecte-t-elle les encadrements RGPD ?

FR : Make est une société européenne. Notre technologie tourne sur l’architecture Amazon Web Service (AWS) de Celonis. Elle répond à ces standards, sachant que l’on fonctionne sur la même architecture que les clients de Celonis, qui sont de gros clients comme la BPCE, des militaires, des ministères ou encore Airbus. Celonis ne peut pas se permettre d’avoir une faille.

SD : En février 2021, Celonis a racheté Integromat pour un nouveau nom : Make. Quels sont les nouveaux objectifs de l’entreprise ?

FR : Le rachat a aidé à avoir des moyens financiers qu’Integromat n’avait pas. C’était une volonté des fondateurs de vouloir amener la plateforme à davantage d’utilisateurs et continuer de répondre aux besoins des 500 000 déjà présents, dont 40 000 en entreprise. Make veut surtout pouvoir aider les départements des entreprises, nous utilisant, à communiquer entre eux.

SD : Les plateformes de nocode dans le futur ne risquent-elles pas de se cloner les unes avec les autres ?

FR : Quand une nouvelle technologie émerge, il y a toujours un portefeuille immense de nouveaux acteurs qui se lancent. Mais derrière, il y a toujours une consolidation du marché et des technologies qui vont persévérer. Actuellement, il y a très peu de gros acteurs qui percent réellement, ce sont surtout les petites entreprises du marché qui vont se faire racheter.

SD : Utiliser le nocode représente-t-il un avantage pour l’écologie ?

FR : Je pense à la maison mère de Make, Celonis, qui est vraiment dans la durabilité et l’environnement. Les chaînes de distribution aujourd’hui ne sont pas optimisées, en termes de ressource, il y a énormément de déchets. Toutes activités supplémentaires qui peuvent prolonger un processus, qui sont manuelles ou superflues, les augmentent. Par exemple, 40% de la nourriture livrée dans le monde est perdue rien que dans la distribution par manque d’optimisation. Make se voit alors comme un créateur de flux, le nocode va permettre de perfectionner la distribution et les processus. Également, Make, a l’idée d’être plus léger, souhaite limiter le nombre de redondances, de tâches répétitives, c’est pour cela que nous laissons les équipes IT avoir un contrôle global sur chaque création des employés.