L’industrie des semi-conducteurs est par nature cyclique, les périodes de fortes croissances succèdent aux creux et ainsi de suite. Alors que le milieu est encore englué dans un de ces moments de moins bien, il y a un acteur incontournable qui semble imperméable à la crise, ASML. Lors de la publication de ses résultats annuels, elle a surpassé toutes les estimations avec 27,6 milliards d’euros de chiffre d’affaires.

ASML, centre du monde des semi-conducteurs

Pour fabriquer des puces avancées, celles qui vont dans les smartphones, les ordinateurs et autres produits high-tech, ASML est un passage obligé. L’entreprise néerlandaise est la seule au monde à construire et vendre des systèmes à lithographie extrême ultraviolets (EUV) qui produise ces puces hautes performance. Il est question de processus de gravure de moins de 14 nanomètres. Aujourd’hui la plupart des appareils derniers générations sont à 5 nm, voire 3.

ASML, qui a dépensé 4 milliards d’euros de recherche et développement en 2023, a même sorti une machine EUV de nouvelle génération, High NA. Elle pourrait permettre d’aller sous la barre des 2 nm. Intel, qui a pris un retard technologique sur ses concurrents Samsung et Taiwan Semiconductor Manufacturing Company (TSMC) est la première avoir reçu ce condensé de technologies.

En 2023, l’entreprise a vendu 53 EUV et en a livré 42, pour 9,1 milliards de revenus. Si le calcul est approximatif, car dépend de variables qui ne sont pas forcément connues, le prix d’un système peut donc être estimé entre 170 et 216 millions d’euros. Technologie plus mature, mais tout de même avancée, 396 DUV ont été écoulés pour 12,4 milliards d’euros. Au total, les ventes d’EUV ont augmenté de 30 % en 2023 et de DUV de 60 %.

Roger Dassen, directeur financier d’ASML attribue cette explosion à un pays en particulier, « l’activité en 2023 avec la Chine a été très, très forte ». Depuis la commercialisation des EUV, ASML n’a jamais pu en vendre en Chine. Ce n’était pas le cas pour les DUV. Or, les versions les plus performantes ont également été soumises à des restrictions à l’export par les Pays-Bas, sous la pression des États-Unis.

Les entreprises chinoises de semi-conducteurs semblent avoir voulu anticiper ces mesures. Le pays représentait 8 % des ventes au premier trimestre 2023, 46 % au troisième trimestre et encore 39 % au quatrième tout juste achevé. Ce sont ces performances qui ont permis à ASML de surnager en 2023.

2024, année de transition

Peter Wennink, PDG du groupe pour encore quelques mois, le rappel « L’incertitude demeure sur le marché en raison d’un certain nombre de préoccupations macroéconomiques mondiales, tandis que l’industrie des semi-conducteurs se trouve actuellement en bas de cycle ». Il prévient que 2024 ne sera pas aussi flamboyante pour ASML. L’entreprise, qui a confirmé perdre 10 à 15 % de ses revenus en Chine, s’attend à rester au même niveau que 2023.

Un mal pour un bien, car « nous considérons 2024 comme une année de transition en vue de la forte demande attendue en 2025 » révèle le PDG. Au cours de l’année, ASML va augmenter ses capacités de productions de machines, notamment celle des High NA EUV.

De cette façon, l’entreprise espère être prête à une explosion de la demande en 2025, « Nous devons nous préparer au nombre important de nouvelles fabs qui sont en d’être construites dans le monde entier », confirme Peter Wennink. Plus d’une vingtaine de projets de fabriques vont être lancés en 2024 et 2025 (aucune en Europe), le tout soutenu par les nombreux plans de soutiens à travers le monde, les Chips Act.

projets fabs semi-conducteurs dnas le monde

Crédit : ASML

La demande finale de semi-conducteurs est aussi appelée à bondir. L’électrification de la mobilité, la transition énergétique, l’intelligence artificielle, tous ses secteurs sont particulièrement gourmands en puces. Une bonne nouvelle pour l’incontournable ASML qui vise entre 30 et 40 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2025 et 44 à 60 milliards d’euros en 2030.