Le 15 décembre à partir de 15h00, Thierry Breton et Margrethe Vestager présenteront un pack de lois visant à encadrer l’avenir numérique de l’Europe. Baptisé Digital Services Act (DSA) et Digital Market Act (DMA), ils doivent réguler les marchés numériques européens, qualifiés de “zone de non-droit” par les commissaires. Au-delà de la régulation de ce secteur, c’est une volonté de moderniser l’approche numérique européenne pour les décennies à venir.
Mise à jour 16/12/20 : Le DSA et DMA ont été présentés, 6 questions pour comprendre ces deux textes.
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Digital Services Act, Digital Market Act, quelles différences ?
Ces deux textes composent le pack de lois qui sera dévoilé à 15h, ce mardi 15 décembre, par les deux poids lourds du numérique et de la Commission, Thierry Breton et Margrethe Vestager. Pas de différences de nature donc : ce sont tous deux des volets d’une législation visant à réguler internet. Ils interviennent dans le contexte de la stratégie européenne pour le numérique, manifestée sur les réseaux par le hashtag #DigitalEU.
Aux côtés de l’intelligence artificielle, des données, de la régulation de la haine en ligne et de la garantie à la concurrence, le pack de lois que composent le DSA et le DMA souhaite ériger de nouvelles règles pour le continent. Toutes plateformes comptant au moins 45 millions d’utilisateurs seront soumises à ces nouvelles règles.
Alors quelle différence entre Digital Services Act et Digital Market Act ? Elle tient au contenu et à l’approche de mêmes objets : les grandes plateformes en ligne et les réseaux sociaux.
Le Digital Services Act apporte des réponses sur la responsabilité des plateformes, la haine en ligne et la modération de contenus, en passant par la gestion des données des utilisateurs. Elle condamne ces mêmes plateformes à des amendes, si les nouvelles règles concernant la transparence, la publicité, les contenus illicites ou la gestion des données ne sont pas respectées. Par exemple, celles-ci pourraient se voir infliger une pénalité pour “apport d’informations incorrectes, incomplètes ou trompeuses”.
La loi sur le marché numérique, appelée Digital Market Act, propose quant à elle une série d’interdictions ex ante (par anticipation) aux plateformes manoeuvrant dans l’Union Européenne, telles que Google ou Facebook. Avec son “outil d’enquête sur le marché”, l’UE prévoit de détecter les phénomènes de monopole et les pratiques anticoncurrentielles, habituelles pour les GAFAM.
Quels domaines sont concernés ?
Le numérique étant un domaine où la transversalité des phénomènes n’est plus à prouver, de nombreux aspects de nos vies pourraient s’en voir affectés. En bien, en mal? Reste à voir les détails du règlement, que l’on découvrira dans quelques heures.
Pour sûr, les GAFAM sont dans le giron de la Commission Européenne. Si ça n’était pas prévu au départ, elle pourrait à présent aller jusqu’au démantèlement, en cas d’incompatibilité flagrante avec des principes fondamentaux, comme l’explique Thierry Breton sur France Inter.
Les grandes plateformes seront tenues d’agir rapidement pour supprimer le contenu illégal, défini par l’UE comme comprenant le discours de haine, le harcèlement, la contrefaçon, l’utilisation de matériels protégés par le droit d’auteur, le contenu terroriste, discriminatoire, pédophile, ou encore le dévoilement d’images privées. À défaut d’une action rapide et efficace, les plateformes devront prouver leur méconnaissance des faits afin d’échapper à l’amende.
La publicité est également un des domaines visés. La transparence des publicités en ligne est un domaine primordial pour l’Europe, qui a vu de nombreux scandales ou événements non désirés prendre place à cause de campagnes en ligne. On pense ainsi au Brexit. De nouvelles règles proposeront ainsi des informations immédiates sur les sources des publicités, comme le budget, l’auteur ou la raison de l’argumentaire utilisé.
La sphère politique des pays membres de l’UE pourrait être modifiée, puisque le texte semble proposer qu’un “coordinateur des services numériques” soit nommé dans chaque administration. Ce dernier, au rôle central pour l’application du nouveau pack de règles, sera chargé de surveiller les plateformes en ligne, qui devront lui fournir accès à leurs données. Il mettra également à jour tous les six mois la liste de celles concernées par la réglementation (devant avoir plus de 45 millions d’utilisateurs).
L’économie est évidemment l’un des secteurs concernés, et pas des moindres. Avec la loi pour le marché numérique, la Commission souhaite redynamiser l’écosystème des petites et moyennes entreprises, leur offrant un accès plus large au marché européen. Les grandes entreprises technologiques comme Google, elles, pourraient faire face à des restrictions de leurs activités commerciales, étant par exemple forcées de partager les données récoltées sur les utilisateurs.
La mise en place du pack de lois du Digital Services Act s’avère hautement stratégique pour l’avenir du numérique en Europe. Et pour cause, la dernière initiative allant dans ce sens date de 2000. Une époque où bon nombre des entités qui structurent Internet aujourd’hui n’existaient pas. Aujourd’hui, l’objectif du DSA et du DMA n’est pas de combler les lacunes des 20 dernières années, mais de renforcer la position de l’Europe sur les 20 à venir.
Éducation, travail, communication, divertissement, publicité, concurrence… Le Digital Services Act s’annonce ainsi une clé de voûte de l’organisation de l’espace numérique dans lequel nous évoluerons demain.