Pas un jour ne passe – ou presque – sans que l’écosystème publicitaire ne fasse l’écho d’un mouvement stratégique dans le retail media. Cette branche du marché qui consiste à placer des publicités tout au long du parcours d’achat du consommateur (des sites web de retailers en passant par leurs applications mobiles ou marketplaces, jusqu’aux affichages numériques hors et dans les magasins), semble en effet porter de bien belles promesses, à un moment où les consommateurs sont en quête de reconnexion et où la publicité numérique amorce une nouvelle transformation.

Pourquoi un tel engouement pour le retail media ?

La croissance du retail media s’explique par la conjonction de différents facteurs. En premier lieu, la pandémie de Coronavirus a accéléré la croissance du e-commerce à l’échelle mondiale, entraînant des millions de nouveaux clients à acheter en ligne. Selon IAB France, le marché du e-commerce grand public pèse désormais près de 640 millions d’euros et devrait poursuivre son ascension au cours des prochaines années.

En outre, avec la suppression des cookies tiers, la dépréciation des identifiants dans les secteurs de l’affichage et du mobile oblige les spécialistes du marketing à repenser leurs stratégies. Les propriétaires des data first-party sont courtisés, et les retailers disposent d’un grand nombre de ces données tout au long du cycle de vente. De plus, les programmes de fidélisation client viennent s’ajouter à cette mine d’or de données, qui peuvent désormais être activées et partagées avec des partenaires via des clean rooms dans lesquelles spécialistes du marketing et retailers peuvent faire matcher leurs données anonymes.

Enfin, le retail media semble être l’un des moyens les plus prometteurs d’atteindre le graal tant espéré depuis tant d’années : réussir à “boucler la boucle” entre les données de vente et de marketing. Le retail media permettant en effet aux marketers de démontrer plus efficacement le ROI de leurs investissements média, tout en respectant la vie privée des consommateurs.

Même si le retail media n’en est clairement plus à sa phase expérimentale, ce secteur est encore à ses prémices et devrait considérablement bouleverser l’Ad-Tech dans les prochains mois. À l’avenir, l’affluence de données sur le retail devrait permettre un ciblage plus précis des consommateurs. Les engagements de ces derniers envers de nouveaux formats publicitaires conduiront à une meilleure compréhension et une meilleure optimisation.

Une évolution basée sur la data

Si le retail media semble promis à un bel avenir, certains de ses contours restent encore à définir. Retailers et marketers sont actuellement confrontés à des pressions importantes, comme la dépréciation des identifiants ou la pénurie de profils compétents, et il est peu probable qu’ils étendent leurs ressources déjà limitées au retail média tant qu’ils ne sauront pas clairement dans quoi ils investissent et comment leurs données circuleront et s’intégreront à l’écosystème du retail média.

Pour justement permettre à deux parties de partager des données sur leurs utilisateurs, de manière sécurisée et anonyme, des data clean rooms ont été créées, chiffrant les données first party avant de les mettre en correspondance avec les autres données agrégées. Il en existe deux types: les clean rooms pour les médias (tels que Google Ads Data Hub et Amazon Marketing Cloud), et les clean rooms pour les partenaires, à travers lesquels deux entités (par exemple un éditeur et un annonceur) peuvent partager et combiner leurs données.

Cette technologie suscite naturellement de l’intérêt dans la mesure où elle offre la possibilité de combiner les données des retailers avec celles des spécialistes du marketing tout en respectant la vie privée des consommateurs.

Vous avez dit ROI ?

Le ROI est un enjeu fort du retail media, et notamment la progression du retour sur investissement publicitaire (ROAS), qui s’attend à devenir une mesure plus importante pour les marques et les agences au sein du circuit fermé. Du fait de la protection de la vie privée, le ciblage individuel tend à laisser place aux analyses de groupe. Il peut s’agir d’analyses de type “nouveaux acheteurs VS clients existants », ou encore d’analyses concurrentielles afin de déterminer les performances des autres acteurs du marché.

En plus d’offrir une bonne compréhension des audiences et des habitudes de consommation, le retail media promet également aux marketers de toucher un public plus large en faisant passer une opportunité essentiellement basée sur le ROI à une stratégie en entonnoir complet. L’objectif du retail media n’est pas uniquement de vendre, car les données recueillies peuvent être utilisées pour perfectionner les nouveaux produits ainsi que leurs modes de commercialisation avant leurs lancements. Elles peuvent également servir à renforcer la relation entre les retailers et leurs marques partenaires.

Selon la logique, l’activation des données s’opère de préférence dans la clean room des marques ou des retailers afin de tirer parti de la proximité entre les données relatives aux ventes et aux médias. L’activation et l’optimisation se poursuivront au niveau des SSP et au sein de l’ad-stack du retailer afin de gérer correctement la demande programmatique, les signaux contextuels entrants (mots-clés) et l’inventaire direct vendu.

Un futur sous le signe de la collaboration

Dans un futur déjà enclenché, une approche collaborative est nécessaire avec les équipes internes de la marque, ainsi qu’avec les agences et les partenaires technologiques, pour soutenir les marques dans ce changement de ressources et s’assurer qu’elles ne manquent de rien.

Si les géants comme Amazon ont l’envergure nécessaire pour développer des solutions de retail media à grande échelle, les alliances peuvent offrir aux acteurs plus récents un moyen de gérer un programme retail media personnalisé sans avoir à embaucher de nouvelles ressources. Ces partenariats peuvent aller d’un service complet à une aide dans les domaines où les capacités font actuellement défaut – par exemple, dans la gestion de la demande de vidéo et/ou d’affichage programmatique.

En ce qui concerne plus particulièrement l’Europe, la nature fragmentée du paysage du retail est une incitation supplémentaire à tirer parti du retail media. Les enseignes nationales sont finalement plutôt agiles et il est très probable que nous verrons émerger prochainement les nouveaux leaders de ce marché.