À 32 ans, Lina Khan, officiellement à la tête de la Federal Trade Commission (FTC) depuis une quinzaine de jours, imprime déjà son style. Le 1er juillet, lors de la première réunion publique de l’agence depuis une vingtaine d’années, une initiative amenée à devenir mensuelle, la FTC a adopté plusieurs mesures visant à étendre ses pouvoirs, rapporte The Verge.

La FTC se donne plus de libertés

La plus importante d’entre elles met fin à la « déclaration de politique générale ». Ce système, mis en place sous l’administration Obama en 2015, limitait les pratiques anticoncurrentielles que la FTC pouvait contester. Sans cette déclaration, l’agence pourra aller plus loin que les lois anticoncurrentielles en vigueur, le Sherman Act et le Clayton Act qui, respectivement, encadrent les monopoles et les fusions illégales.

Pour Lina Khan, la déclaration de 2015 « a doublé les échecs de longue date de l’agence à enquêter et poursuivre de concurrence déloyale ». Selon The Verge, la défaite récente en justice de la FTC contre Facebook pourrait être liée à cette déclaration.

Dans l’article du Yale Law Journal qui a lancé sa carrière en 2017, « Amazon’s Antitrust Paradox » Lina Khan pointe du doigt les limites du cadre existant. Ce dernier est fondé sur le bien-être du consommateur, souvent perceptible par les prix appliqués et donc inadéquats avec les services gratuits ou presque des géants de la Tech. Un cadre tout aussi contraignant pour poursuivre les entreprises monopolistiques du numérique qui possèdent les plateformes que doivent utiliser leurs rivaux.

Les autres mesures votées par la FTC visaient surtout des changements procéduraux, lever des restrictions bureaucratiques pour simplifier le processus d’élaboration des règlements ou rationaliser les enquêtes de l’agence.

La guerre entre l’agence et les géants de la Tech commence fort

La commissaire démocrate Rebecca Kelly Slaughter s’est félicitée de ces mesures, « Nous voulons envoyer un signal que la FTC d’aujourd’hui est prête à relever le défi de l’économie moderne ». Rohit Chopra, autre commissaire démocrate, s’est réjouie de la fin de « l’impuissance perçue » de la FTC. Le son de cloche est sensiblement différent du côté des deux commissaires républicains : ils ont voté contre les mesures mentionnées plus haut.

Pour les entreprises, c’est le groupe d’influence TechFreedom qui a prévenu avant le vote qu’une « nette majorité de la Cour suprême a exprimé son intention de raviver la doctrine de non-délégation, selon laquelle seul le Congrès peut faire des lois ». Le communiqué ajoute que « la FTC pourrait bien se retrouver comme le premier test de cette doctrine depuis longtemps en sommeil si elle s’écarte des principes clairs développés par les tribunaux dans le cadre de la loi antitrust ».

Cette annonce, celle d’une guerre juridique perpétuelle entre la FTC et les géants du numérique, ne surprend déjà plus. Au cours de la semaine, Amazon a lancé l’offensive en exigeant de Lina Khan sa mise en retrait dans toutes les procédures concernant le géant. Le bras de fer entre la FTC et les entreprises américaines les plus puissantes n’en est qu’à ces débuts, mais commence sur les chapeaux de roues.