Faut-il imposer un droit d’auteur sur internet ? Cette question, qui doit être tranchée par les députés européens, divise les partisans d’un internet libre et les défenseurs d’une plus juste rémunération des artistes et auteurs.

Mise à jour : la loi, Directive Copyright, a été rejetée par le parlement vendredi 7 juillet 2018.

Aujourd’hui, jeudi 5 juillet, le parlement européen se prononce sur la révision de la directive droit d’auteur. Défendue par la France, cette révision vise à moderniser le droit d’auteur afin de l’adapter à la révolution numérique. En effet, la dernière législation sur le sujet date de 2001, bien avant l’émergence des géants du numérique. La réforme a déjà fait l’objet d’un débat houleux en commission des affaires juridiques, avant d’être adoptée de justesse avec 14 voix pour, 9 contre et 2 abstentions. Le projet doit désormais être entériné en séance plénière par le parlement.

Deux articles font particulièrement débat. L’article 11 qui vise à créer un « droit voisin » pour les éditeurs de presse. Ces derniers pourraient ainsi réclamer une rémunération aux agrégateurs d’informations comme Google News, qui utilisent leurs contenus. Il ne serait ainsi plus possible de présenter des liens hypertexte d’articles sans l’accord de l’éditeur.

Autre texte particulièrement décrié, l’article 13. Une fois adopté, il obligerait les hébergeurs à filtrer de manière automatique les contenus mis en ligne avant même leur publication et ce à l’aide d’outils de filtrage comme Content ID déjà mis en place sur YouTube. Or la première crainte émise par les opposants à cet article, serait une possible censure mécanique faite par des outils technologiques qui ne feraient pas la différence entre le droit de citation, le droit de parodie et le plagiat effectif.

En première ligne de cette bataille les GAFA (Google, Apple, Facebook et Amazon), déjà dans le viseur de l’europe, et autres géants d’internet qui se sont largement mobilisés contre ce texte. D’après eux, ce projet favoriserait les grands groupes de presse au détriment des médias indépendants et des start-up, au risque de réduire la liberté d’expression. L’ADIMA, groupe de pression, qui rassemble entre autres les GAFA, a appelé dans un communiqué les eurodéputés à « sauver l’internet » en rejetant le projet de réforme.

Les partisans de cette réforme dénoncent les pressions exercées sur les députés. « Les eurodéputés ont été littéralement bombardés de plus de 35 000 courriels et messages téléphoniques automatisés par des entreprises désireuses d’empêcher que les droits d’auteur soient adaptés à l’ère numérique« , affirme un organisme d’éditeurs de presse. Dans une tribune publiée par Le Monde, 70 artistes ont critiqué une « campagne de désinformation au service des grandes puissances du numérique« , qui « répand l’idée que ce texte met en péril l’exercice des libertés fondamentales sur Internet« .

Cette loi mettrait également en péril l’accès aux contenus de Wikipedia, farouchement opposé à ce projet.

Nous pensons que l’adoption de cet ensemble de droits d’auteur réduira considérablement la quantité de contenu qui sera librement accessible à tous à travers le monde. Les coûts liés au filtrage préventif du contenu qui peut violer les conceptions générales du droit d’auteur sont également susceptibles d’entraîner une concentration des décisions relatives au contenu dans un petit nombre de grandes plates-formes.