Les 3 Kits Apéro de la start-up, concoctés par Maison Plisson, Julhès et Cul de Cochon, devraient animer les afterworks parisiens d’ici à la fin de l’été. Réunissant sur sa market place les meilleurs commerces de bouches alentour, elle garantit une livraison de leurs produits dans l’heure. Un coup de projecteur salutaire pour ces commerçants de quartiers.

Lancée à l’automne 2016, epicery s’est invitée dans le paysage (déjà bien dense) de la food-delivery, mais sur un créneau encore inexploité. Le service présente ainsi le double avantage de fournir les parisiens pressés en produits frais et de qualité, et d’offrir aux petits commerces de nouveaux canaux de ventes à moindres frais (le cofondateur Edouard Morhange parle de 30% de chiffre d’affaires supplémentaires pour chacun d’entre eux). Avec en toile de fond, la volonté de créer/renforcer le lien entre habitants et commerçants.

Le pari de la digitalisation des commerces de bouche

Pour ces derniers, déléguer la création de leur identité digitale, c’est aussi se décharger d’un poids qui n’est, par essence, pas une priorité. Contrairement aux commerces de retail, qui pour certains ne survivent que via leur market place, difficile d’imaginer poissonniers et autres bouchers du coin alimenter un site web au quotidien.

[…] difficile d’imaginer poissonniers et autres bouchers du coin alimenter un site web au quotidien.

Les pouvoirs publics semblent avoir pris conscience du problème, et ont d’ailleurs lancé en Septembre dernier le Connect Street, premier forum consacré à la digitalisation des commerces de proximité. L’enquête lancée à cette occasion a d’ailleurs permis de mettre en lumière leurs difficultés : moins d’un sur deux est présent sur le web (contre 75% pour leurs plus gros concurrents). La méconnaissance des outils et le manque d’accompagnement ont également été soulevés : deux freins levés d’emblée par epicery, qui promet un véritable partenariat dans la durée avec chacun d’entre eux.

Concurrence « par le haut » et par « le bas »

Pour la start-up comme pour ses fournisseurs, la concurrence s’annonce pourtant féroce, sur un marché de la food-delivery qui tend à se concentrer.

« Par le haut », on a vu ces derniers mois Carrefour emboîter le pas de Franprix et Monoprix, en phagocytant une panoplie de services dans leurs enseignes de quartier. Relais Poste, conciergerie, pressing, réseau de voisinage, … les intégrations se multiplient avec un objectif de rétention maximal du client. Pour parer à sa volatilité, les grands groupes ont donc pris le parti de la centralisation.

« Par le bas », la concurrence est au contraire éclatée dans un panel d’acteurs aux offres bien distinctes, et certains attaquent déjà un second cycle de croissance. Pour les livraisons de repas, Deliveroo a dû changer son algorithme de répartition des commandes, celles-ci ayant été multipliées par sept en l’espace d’un an. De son côté, Nestor et ses repas livrés au bureau revendique haut et fort sa rentabilité après deux ans d’existence.

Autre formule en vogue, les paniers recettes (à cuisiner chez soi) de Quitoque ont franchi le cap des 100 000 commandes/semaines. Enfin, pour s’approvisionner en produits locaux, les circuits courts de La Ruche qui dit oui viennent de souffler leur 3eme bougie, et disposent d’un maillage déjà conséquent sur le territoire. Bref, que vous optiez pour un plat cuisiné, un panier recette ou un vrac de légumes du maraîcher du coin, vous trouverez bien un cycliste/un Uber sur Paris pour vous livrer.

Entre initiatives décentralisées et inspirations

Toujours est-il que pour assurer leur survie, les commerces de quartier peuvent s’appuyer sur une tendance de fond : le « mieux consommer » qui ramène les français vers une consommation de proximité. De façon décentralisée, on a d’ailleurs vu des initiatives prises en ce sens sur le territoire. Pour en citer quelques-unes, dans la même lignée qu’epicery, le site web Marché Privé permettra dès la rentrée prochaine aux Rouennais de commander en ligne les produits de leurs commerçants de quartier préférés. Même constat à Valenciennes, où la Chambre de Commerce a elle aussi mis en place une vitrine en ligne pour ses commerces locaux.

La digitalisation des commerçants de quartier est donc en marche. Et si un mouvement coordonné à grande échelle devait voir le jour, il pourra toujours s’inspirer de celui des librairies indépendantes, qui collaborent désormais en ligne pour contrer la force de frappe d’Amazon.