« J’accueille avec inquiétude la version « Lite » de l’application mobile de partage de courtes vidéos « TikTok » », a écrit sur Twitter, Marina Ferrari, secrétaire d’État chargée du numérique, jeudi 11 avril au soir. Sur les versions Android, le réseau social de ByteDance a mis en place un système de récompenses. En visionnant des vidéos et en interagissant sur la plateforme, les utilisateurs gagnent désormais des pièces virtuelles qui sont échangeables en cartes cadeaux et en NFT.

« Le mécanisme de rémunération proportionné au temps de visionnage – bien que plafonné à une heure et interdit aux mineurs – est une dérive contestable de notre espace numérique », pointe Marina Ferrari, qui indique avoir « demandé à [s]es services d’étudier avec la plus grande attention les mécanismes de l’interface proposée aux utilisateurs ». Elle invite l’Union européenne à en faire de même.

TikTok Lite est disponible en France depuis fin mars. Son lancement a fait le tour des médias le 11 avril, au lendemain de la publication d’un article du Monde. Les inquiétudes se sont tout de suite fait savoir, principalement sur les risques quant à l’augmentation du temps d’écran.

TikTok Lite donne chaque jour des objectifs à l’utilisateur, un système de quêtes faisant penser aux jeux vidéo. Bien que des seuils de récompense quotidiens soient fixés, l’incitation à l’usage est là. Regarder cinq minutes de vidéo permet de gagner 750 pièces, liker trois vidéos 150… Chaque 100 pièces valent un centime d’euros, il faut donc du temps de visionnage pour avoir quelque chose à dépenser.

Un mécanisme de récompenses comparé à l’addiction aux jeux d’argent

Ces craintes peuvent être accentuées chez les plus jeunes par le fait que l’interdiction aux mineurs prend uniquement la forme d’une vérification de l’identité lors de la conversion des pièces en bons d’achat. Ce qui n’est pas très dissuasif, comme en témoignent des adolescentes interrogées par RMC.

« On va essayer, c’est un bon moyen de se faire de l’argent, parce que c’est facile et on ne fait rien », reconnaissent deux lycéennes qui pointent pourtant que « c’est comme si on nous achetait, et en plus ça donne envie […] moi je n’ai pas envie de passer mon temps à faire ça ».

L’association e-Enfance s’inquiète également de TikTok Lite. Sa directrice générale, Justine Atlan, est intervenue dans plusieurs médias. Elle compare le système de récompense à l’addiction aux jeux d’argent. Sur RMC, elle alerte : « on est proche des addictions aux substances. Et là, ils ajoutent une autre notion qu’on sait addictive : l’excitation de pouvoir gagner de l’argent ». Au Monde, elle pointe des « injonctions très contradictoires par rapport aux récents messages de prévention sur le temps d’exposition aux écrans ».