La directive européenne visant à accorder des avantages salariaux aux travailleurs de la gig economy vient de franchir une importante étape. Grâce à ce texte, ils pourraient bénéficier, entre autres, d’une couverture de sécurité sociale.


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Une liste de critères à remplir pour être considéré comme salarié

Ce projet, annoncé par l’exécutif européen à la fin de l’année 2021, constituerait une première mondiale. Il s’inscrit dans le cadre d’un ensemble de mesures législatives visant à garantir des conditions de concurrence équitables entre les entreprises en ligne et traditionnelles.

« La gig economy a apporté de nombreux avantages à nos vies, mais cela ne doit pas se faire au détriment des droits des travailleurs. L’approche du Conseil établit un bon équilibre entre la protection des travailleurs et la sécurité juridique pour les plateformes qui les emploient », a commenté Paulina Brandberg, ministre suédoise de l’égalité des genre et de la vie professionnelle, qui a présidé les discussions à Luxembourg. Le texte vient d’être approuvé par le Conseil européen, qui réunit tous les États membres de l’Union européenne (UE).

Actuellement, la grande majorité des 28 millions de travailleurs issus de la gig economy au sein de l’UE, tels que les chauffeurs de taxi, les employés domestiques et les livreurs de repas, sont considérés comme des travailleurs indépendants. Cependant, environ 5,5 millions d’entre eux doivent respecter les mêmes règles et restrictions qu’un employé classique.

Le Conseil vise à résoudre ces cas de mauvaise classification et à faciliter la requalification de ces travailleurs en salariés pour qu’ils bénéficient des droits du travail et de la protection sociale accordés aux employés en vertu des lois nationales et européennes, explique-t-il dans un communiqué.

Selon l’approche générale du Conseil européen, les travailleurs seront présumés être des salariés des plateformes numériques sur la base d’au moins trois des sept critères énoncés dans la directive. Ces critères comprennent des limites sur les revenus, des restrictions concernant le refus de travail et des règles régissant l’apparence ou le comportement des travailleurs.

Les grandes plateformes pas convaincues

Comme le note le Financial Times, certains pays étaient moins enthousiastes que d’autres. Huit États, dont l’Espagne et les Pays-Bas, ont expliqué que la proposition adoptée était « moins ambitieuse et moins efficace » que les précédentes de la Commission européenne. Leur abstention témoigne d’un manque d’unanimité entre les pays membres, et d’un risque de division à mesure que les négociations progressent.

Par ailleurs, les plateformes concernées se sont montrées en désaccord avec le texte. « Comme l’ont démontré de nombreux pays d’Europe, il existe de meilleures façons de respecter les valeurs sociales européennes sans supprimer l’indépendance et la flexibilité que la majorité des travailleurs des plateformes disent souhaiter », a déclaré Anabel Diaz Calderon, vice-présidente d’Uber.

Delivery Platforms Europe, qui compte Bolt, Deliveroo, Delivery Hero, Glovo, Uber et Wolt parmis ses membres, ne semble pas convaincu non plus. « Bien que le texte approuvé aujourd’hui apporte plus de clarté que la proposition initiale, il ne parvient toujours pas à tracer une ligne suffisamment claire entre l’emploi et le travail indépendant et ne fait pas grand-chose pour améliorer la situation des véritables travailleurs indépendants », assure le groupe.

Réglementation de l’utilisation de l’IA sur le lieu de travail

L’accord comprend également les premières règles de l’UE sur l’utilisation de l’intelligence artificielle sur le lieu de travail. Il fait valoir que les travailleurs doivent être informés de l’utilisation d’algorithmes dans les processus de prise de décision, lorsque celles-ci les concernent. De même, une surveillance humaine est requise pour les systèmes automatisés de prise de décision.

Les pays membres de l’UE, les législateurs et la Commission doivent désormais peaufiner les détails du texte avant qu’il ne puisse devenir une législation.