Le baromètre unifié du marché publicitaire (BUMP) du premier semestre 2021, publié le 14 septembre, montre le fort rebond de la publicité en France. Perturbés par la crise sanitaire, les médias connaissent tous une augmentation de leurs recettes publicitaires. Le niveau d’avant crise, soit celui du premier semestre 2019, a même été dépassé. Cependant, les médias ne sont pas égaux.

Ce baromètre a été réalisé par Kantar, l’IREP, et France Pub, en partenariat avec l’Observatoire epub SRI-UDECAM. Ses résultats portent sur 5 médias traditionnels (télévision, cinéma, radio, presse, affichage), ainsi que le courrier publicitaire, les imprimés sans adresse, et le digital. Ils incluent donc les recettes digitales des médias.

Des progressions disparates

Le montant des recettes publicitaires, pour la télévision, atteint 1,672 milliard au premier semestre 2021. C’est 33,3% de plus qu’à la même période en 2020, mais 2,4% de moins qu’en 2019. La télévision n’a donc pas encore atteint son niveau d’avant crise, malgré une situation sanitaire et économique en amélioration. Les spécialistes estiment d’ailleurs que sans le troisième confinement et les mois de mars – avril, le niveau d’avant crise serait déjà atteint.

La radio connaît quant à elle une belle croissance pour la publicité nationale et digitale. Le montant des recettes publicitaires net s’élève à 256 millions d’euros. Ce qui équivaut à une augmentation de 23,9% par rapport au premier semestre 2020, mais elles auraient pu être plus importantes. Le troisième confinement a pénalisé le média, « sur le premier semestre, la radio a subi très fortement le troisième confinement », explique Xavier Guillon, directeur général de France Pub. Il préfère se montrer positif, en affirmant que « hormis le confinement d’avril, on est quasiment revenus sur les volumes d’avant crise ».

Plus étonnant, la presse connaît aussi une croissance importante, à l’heure où la défiance envers elle est pourtant forte. Pas de quoi décourager les annonceurs, le montant net des recettes publicitaires au premier semestre 2021 se montant à 633 millions d’euros. Il s’agit d’une augmentation par rapport au premier semestre 2021, mais à une baisse comparée à celui de 2019.

Le volume d’affiches extérieures a, lui, augmenté (+19,7% en un an), mais n’a pas retrouvé son niveau d’avant crise (-33,4% par rapport à 2019). En revanche, la publicité extérieure digitale (DOOH), affiche un net regain en ce premier semestre 2021, avec une hausse de 17% par rapport à 2019. Le courrier publicitaire est aussi en pleine croissance, puisque le montant des recettes publicitaires atteint 334 millions d’euros. Des recettes qui restent en baisse de 18,9% par rapport à celles de 2019.

L’ensemble des médias étudiés connaissent donc une hausse sensible de leurs recettes publicitaires par rapport au premier semestre 2020. Toutefois, aucun n’a atteint son volume d’avant crise, la faute notamment à un troisième confinement en avril.

Une hausse de 33,3% des recettes publicitaires en un an

Globalement, le marché de la publicité dépasse tout de même le niveau d’avant crise. Les recettes publicitaires augmentent de 33,3% par rapport au premier semestre 2021, et de 6,5% par rapport au premier semestre 2019. Le montant de ces recettes au premier semestre 2021, atteint ainsi les 7,150 milliards d’euros.

Graphique du BUMP 2021 représentant les recettes publicitaires par média

Excepté le cinéma, tous les médias enregistrent une hausse de leurs recettes publicitaires au premier semestre 2021. Image : France PUB, IREP, et Kantar – BUMP 2021

Le marché des 5 médias progresse de 25,7% par rapport au 1er semestre 2020 mais reste en retrait de 12,5% en comparaison à celui de 2019. Le bilan est donc à nuancer, mais excepté le cinéma, tous présentent des résultats très positifs au premier semestre 2021. Cela confirme la bonne reprise entrevue au premier trimestre.

Le cinéma est le média qui a en effet le plus souffert de la crise. Le montant de ses recettes publicitaires n’atteint « que » 3 millions d’euros, ce qui est très peu comparé aux autres. C’est une baisse de 84,2% par rapport au premier semestre de 2020, et de pas moins de 94% par rapport à celui de 2019. Le cinéma reste donc en forte baisse et dans une situation difficile. Toutefois, avec le pic de fréquentation de juin, « on voit bien sa capacité à se relever », estime Christine Robert, directrice déléguée à l’IREP.

Si les recettes publicitaires augmentent dans tous les médias traditionnels par rapport au premier semestre 2020, elles restent toutefois en deçà de celles du premier semestre 2019. La plus grosse hausse des recettes est due au digital.

Les recettes publicitaires totales des seuls 5 médias atteignent ce semestre le montant de 3,546 milliards d’euros. Les recettes publicitaires totales concernant le digital (search, display, social), avoisinent quant à elles les 3,834 milliards d’euros nets. Soit plus que celles des 5 médias réunis. Cette croissance du digital vient en grande partie des GAF (Google, Amazon et Facebook). Cela veut aussi dire que le digital capte désormais une grande partie des annonceurs.

Une digitalisation marquante de la publicité

La publicité, et les médias, se digitalisent. Les experts constatent une forte croissance de la publicité digitale. L’augmentation atteint 41,9% par rapport au premier semestre 2021. À eux seuls, les GAF connaissent une augmentation de 50%, là où les autres acteurs digitaux connaissent une augmentation de 26%. « Le digital média connaît une croissance accélérée », explique Christine Robert, directrice déléguée à l’IREP, qui évoque toutefois « un marché à deux vitesses », compte tenu de l’importance particulière des GAF.

Le secteur du digital média (qui inclut la télévision, la presse et la radio) connaît également une croissance accélérée ces derniers mois. Avec des recettes publicitaires atteignant 230 millions d’euros, il s’agit d’une augmentation de 46,7% par rapport au premier semestre de 2021.

La publicité digitale extérieure (DOOH) retrouve aussi sa forte dynamique d’avant crise, et pèse 60 millions d’euros en recettes publicitaires. Ajoutée aux recettes du digital média, cela donne un montant de 290 millions d’euros. Soit une augmentation de près de 5% par rapport à 2019, au-delà donc du niveau d’avant crise. « C’est comme si la crise n’était jamais passée par là », affirment les experts.

L’importance du digital ne s’arrête pas là. Il représente 5% des recettes de la télévision, et 12% des annonceurs radio sont également présents en audio digital. Les annonceurs qu’ils ont en commun n’étaient que de 8% au premier semestre 2019.

Graphique BUMP 2021 représentant les investissements publicitaires nets des 5 médias + le digital

Les investissements publicitaires nets des 5 médias sont bien aidés par le digital (display et search) mais accusent tout de même une baisse en avril 2021. Image : France PUB, IREP, et Kantar – BUMP 2021.

Dans le domaine de la presse, le digital gagne aussi en importance. Les supports digitaux lui permettent en effet de progresser. Le nombre d’annonceurs print, combiné au nombre digital, amène à une augmentation globale du nombre d’annonceurs de 2% depuis 2019. Le digital capte 66% de ces derniers au premier semestre 2021. « La crise a accéléré la digitalisation des médias », estiment les spécialistes.

Lorsque la partie digitale est prise en compte, les médias atteignent ou dépassent leur niveau de 2019. Avec la crise, les consommateurs ont de nouvelles pratiques, plus en ligne. Les annonceurs s’adaptent donc, en se digitalisant.

Une répartition des annonceurs et des investissements inégale

Xavier Guillon, parle également d’une « baisse spectaculaire en avril » concernant les investissements à la télévision. Le nombre d’annonceurs y est cependant en hausse par rapport à 2019 et 2020.

Une baisse qui se voit aussi dans les investissements publicitaires dans la radio, qui ont diminué de près de 10 millions d’euros ce mois-là. La quantité d’annonceurs pour la seule presse a aussi diminué de 21%, en l’espace de deux ans.

La radio, et d’autres médias, ont également connu une réduction de la durée publicitaire. Elle peut s’expliquer par la diminution du nombre d’annonceurs. De 2 230 en 2019, ce nombre est aujourd’hui de 1 546. Une forte diminution, plus prégnante notamment chez les radios musicales, où la diminution atteint 39% sur deux ans.

Les investissements dans la presse sont à l’image de ceux réalisés dans les autres médias. Après une augmentation, ils ont fortement diminué entre février et avril 2021, avant de connaître à nouveau une tendance à la hausse. Alors que la télévision ne cesse de gagner des annonceurs, la radio ne cesse d’en perdre. Cette tendance illustre bien les disparités entre les médias.

Des prévisions optimistes

Outre le cinéma, tous les médias retrouvent des couleurs. Ce premier semestre 2021 est placé sous le signe de la reprise. Tous les médias ont augmenté leurs recettes publicitaires, sans toutefois rattraper les volumes de 2019. Seule exception, le digital, qui a même dépassé son niveau d’avant crise.

Graphiques BUMP 2021 représentants les prévisions par catégorie de média pour le marché de la publicité en 2021 en France

D’après les spécialistes, seuls le digital devrait réellement rattraper son niveau d’avant crise en termes de publicités. Image : France PUB, IREP, et Kantar – BUMP 2021.

Chez les annonceurs et les distributeurs, la distribution est la grande gagnante, avec une progression de 56% sur un an, et de 14% sur deux ans. Certains secteurs sont naturellement désavantagés par les restrictions encore en cours. C’est le cas du tourisme, mais aussi de la culture et des loisirs. Ces deux derniers accusent une baisse de 50% en deux ans.

Malgré tout, les dix plus grands annonceurs plurimédias se portent bien, à l’image de E.Leclerc, numéro un. Il accuse une progression de 19% par rapport au premier semestre de 2020. Ces chiffres témoignent d’un grand dynamisme des distributeurs et des annonceurs. Ils montrent aussi que la crise n’a pas changé leurs comportements.

Toutefois, d’après le baromètre, la tendance d’avant crise ne sera rattrapée qu’en fin d’année. Concernant les 5 médias, ils prévoient tout de même une légère baisse de 9,3% par rapport à 2019. Pour les médias numériques, ils prévoient une hausse comparé à 2020 et 2019, de l’ordre de 18%. « Les 5 médias rattraperont les effets tendanciels et les volumes d’avant crise », estime malgré tout Xavier Guillon.

Ces différents chiffres montrent surtout que le marché de la publicité n’a pas pâti des nouvelles mesures sur les cookies. À l’image de l’App Tracking Transparency d’Apple, qui permet à un utilisateur de choisir s’il veut partager ses données avec une application, pour qu’elles soient utilisées à des fins publicitaires.