La réactivité de la Chine sur le terrain des monnaies numériques pourrait-elle déstabiliser l’hégémonie du dollar en guise monnaie de réserve ? La question mérite d’être posée alors que l’Empire du milieu s’impose comme un précurseur en matière de monnaies en ligne.

Car si près de 80 pays (dont la Chine et les États-Unis, précise CNBC) développent la Central Bank Digital Currency (ou CBDC, une monnaie réglementée mais exclusivement numérique), la Chine, elle, a déjà une longueur d’avance : son yuan numérique (qui a la même valeur que le yuan papier) est utilisé dès à présent par plus d’un million de citoyens chinois.

La Chine essaye, les États-Unis observent

Côté américain, les choses vont moins vite. Les États-Unis se concentrent en effet sur la recherche, par le biais des travaux conduits, notamment, par la MIT Digital Currency Initiative et la Federal Reserve Bank de Boston. Les deux entités travaillent à définir ce que le concept de monnaie digitale pourrait représenter pour les américains. Avec les problématiques de la sécurité et de l’accès à cette future monnaie dématérialisée pour principales préoccupations. Une démarche réfléchie qui veut aussi tirer partie de l’observation des premiers pas du e-yuan, testé par les autorités chinoises depuis mars.

« Je pense que s’il y a un dollar numérique, la vie privée sera une partie très, très importante de ce dollar », indique Neha Narula, le directeur de la Digital Currency Initiative, interrogé par CNBC. « Les États-Unis sont un pays très différent de la Chine ». Et pour cause, Outre-Atlantique la question de l’usage d’internet se pose plus qu’en Chine.

D’après un rapport du Pew Research Center, 7% des américains déclarent ne pas utiliser internet. Un chiffre qui monte à 9% dans la communauté noire-américaine et à 25% chez les plus de 65 ans. Les américains souffrant d’un handicap seraient quant à eux trois fois plus susceptibles de ne pas utiliser internet d’après l’étude. De quoi mettre en évidence la problématique de l’accès à un éventuel dollar numérique par les différents types de populations. En réponse, Neha Narula précise que la plupart des travaux menés « supposent que la CBDC coexistera avec l’argent physique et que les utilisateurs pourront toujours utiliser de l’argent physique s’ils le souhaitent ». Un pré-requis important alors qu’aux États-Unis les paiements en liquide restent très courants.

Permettre au dollar de maintenir sa prépondérance dans l’économie mondiale

« Les États-Unis ne doivent pas se reposer sur leur leadership actuel [sur le plan monétaire]. Ils doivent aller de l’avant et développer une stratégie claire pour rester très forts et profiter de la force du dollar », explique pour sa part Darrell Duffie, professeur en finance à l’université de Stanford. Et ce sera l’un des enjeux du déploiement de la CBDC : apporter une réponse au yuan numérique.

Une nouvelle monnaie menaçante pour Kyle Bass, analyste pour cité lui aussi par CNBC : « Le yuan numérique est la plus grande menace pour l’Occident à laquelle nous ayons été confrontés au cours des 30 ou 40 dernières années. Il permet à la Chine d’avoir une emprise sur les Occidentaux et d’exporter son autoritarisme numérique ».