Les jeunes pousses du secteur des nouvelles technologies ont un quotidien des plus désastreux en Chine. Ils s’impliquent tellement dans leur vie professionnelle qu’ils en renoncent à leur vie personnelle. Cela à des conséquences. En effet, le manque conjugué de vie sociale et de vie sexuelle associé au manque de sommeil entraine un âge moyen du premier burnout inférieur à la trentaine.

Ce constat nous provient d’un article du South China Morning Post, qui n’hésite pas à nous partager quelques terribles exemples pour nous donner une idée de la charge de travail que les spécialistes de la technologie s’imposent. On apprend ainsi que des couples n’arrivent pas à concevoir à cause de la fatigue, ou encore que certains travailleurs dorment parfois à peine deux heures par nuit. Pour établir ce constat, le South China Post s’est appuyé sur l’interview de nombreux travailleurs de Zhongguancun et d’autres quartiers de Pékin formant la « Silicon Valley Chinoise ».

La lutte contre l’épuisement professionnel est au coeur du quotidien des jeunes du milieu de la tech, mais d’autres facteurs aggravent la pression et donc le risque de burnout lié à leurs conditions de travail. Ainsi, on apprend qu’ambiance de travail sexiste et inquiétude constante d’une mise à pied font partie du quotidien au sein de la Silicon Valley chinoise.

Alors que le temps libre des employés est compté, un autre problème est venu réduire encore le peu de temps dont ils disposent pour eux-même ces dernières années. À cause de la hausse des prix et de la surpopulation à Zhongguancun, de plus en plus d’entreprises installent leurs bureaux dans des endroits très éloignés du centre de Pékin. La conséquence, c’est que les employés se retrouvent à passer jusqu’à deux heures et demie dans les transports en commun pour aller à leur travail. Yang, un jeune de 33 ans vivant cette situation, nous explique qu’il s’y est fait et qu’après son départ à 6 heures du matin, il arrive à dormir « tant qu’il a un siège » même « si il y’a des bosses et de la foule ». Ceux réussissant à trouver un appartement près de leur travail dans ces zones éloignées ne sont pas forcément mieux lotis. Les loyers sont très chers et les distractions inexistantes.

En général, les entreprises chinoises de technologie attendent de leurs employés qu’ils travaillent de longues heures pour prouver leur dévouement, dans le cadre de ce qu’on appelle le programme 996. La journée débute à 9 heures du matin et finit à 9 heures du soir, 6 jours sur 7. Des conditions de travail difficiles qui ne vont pas en s’améliorant. Certaines entreprises, comme ByteDance qui gère TikTok, attendent désormais de leurs employés qu’ils travaillent un dimanche sur deux.

Pour essayer d’atténuer l’impression d’être toujours au travail, les entreprises chinoises mettent en place tout un tas d’avantages sur place pour que leurs employés se sentent dans un espace de loisir. Ainsi, les repas, les gymnases pour s’exercer au sport, ou encore les salons de coiffure, et bien d’autres services sont accessibles sur place, parfois gratuitement.

Cela n’incite pas pour autant leurs employés à rester longtemps. En moyenne, ils leur faut moins de 2,6 ans avant de plier bagages selon les données de Maimai, le LinkedIn chinois. Une décision vitale, au sens propre du termes. En effet, plusieurs cas de jeunes gens foudroyés par un arrêt cardiaque ont été recensés l’année dernière. Tous les médias locaux font le lien avec l’excès de travail.

Selon Jelte Wingender, un cadre supérieur chez Innoway (incubateur soutenu par le gouvernement) cette situation ne peut plus durer. Actuellement, la durée de travail est élevée car l’État et les fonds d’investissement placent des capitaux un peu partout et sont avides de résultats. Mais selon lui, ces investissement devraient être concentrés sur les meilleurs projets, de sorte que les résultats seraient meilleurs avec moins de travail. De plus, il rajoute que les startups chinoises prometteuses n’ont pas compris que pour former une entreprise vraiment durable, « faire effectuer des horaires insoutenables à ses employés pendant des années n’est pas une solution, car ils deviendront fous ».

Les nouvelles qui nous parviennent aujourd’hui par le South China Morning Post sont loin d’être les premières à mettre à mal l’image de la Chine. En effet, rien qu’au début du mois, la fuite des données de surveillance de l’État Chinois nous a démontré à quel point la vie privée n’est pas respectée dans le pays, dans des proportions encore plus gigantesques que ce que l’on imaginait. Dans cette situation, le pays aura beau continuer à faire des progrès spectaculaires sur la recherche spatiale et l’intelligence artificielle, il ne fera jamais rêver le plus grand nombre.