La transition numérique est depuis plusieurs mois le sujet dans toutes les bouches, qu’il s’agisse des dirigeants, des DSI, des directeurs marketing ou des DRH, chacun y voit une nécessité. Derrière les enjeux technologiques et d’usages existent des enjeux humains considérables. Les entreprises voient dans la transformation digitale de leur business un moyen de remettre le client au coeur de leur organisation, mais au-delà du client, c’est l’individu qui doit être mis au centre des préoccupations, et en premier lieu le salarié. Alors pourquoi ne faut-il pas négliger les collaborateurs dans cette nouvelle révolution industrielle ? Quels sont les risques à ne pas prendre en compte la formation dans un programme de digitalisation ? Quel type d’accompagnement envisager ?

Le collaborateur, première ressource de la transformation digitale

Comment envisager de positionner le client au coeur de la stratégie de l’entreprise grâce à l’avènement du numérique en laissant de côté l’actif le plus précieux de cette même entreprise, le salarié. En effet, ce sont les employés qui sont en contact avec les clients tout au long du processus de vente ou de gestion. Ces contacts se font soit physiquement en boutique, soit au téléphone ou par le biais de mails, chat, visio… et font donc déjà intervenir l’outil numérique dans la relation client. Et vous serez sûrement d’accord, il n’y a rien de plus désagréable que de s’entendre dire que votre demande ne peut être traitée par « la faute de l’informatique ». Méconnaissance des applications, démultiplication de celles-ci, mauvaise maîtrise du poste de travail, rejet de l’outil informatique sont autant de problèmes qui reviennent dans ce type de situation, problèmes qui pourraient être réglés grâce à de la formation. Et que constate-t-on ? Ces problèmes ne sont pas liés aux nouveaux usages ! Alors qu’en sera-t-il lorsqu’il s’agira de rentrer dans l’ère numérique à coup de tablettes, objets connectés, réseaux sociaux … ?

Vendre plus, vendre mieux, fidéliser et gérer efficacement les réclamations passent en premier lieu par une parfaite connaissance de l’environnement informatique actuel du salarié. Cela lui permettra de passer plus rapidement sur de nouvelles plateformes et, avec le bon niveau d’accompagnement, de les utiliser de manière optimale. La ressource humaine est donc bien le premier levier à actionner pour envisager de bénéficier à plein de toutes les opportunités liées au numérique.

La compétence numérique en quelques chiffres

Si l’on regarde les statistiques d’utilisation des réseaux sociaux, on constate de manière assez claire que plus les utilisateurs sont âgés moins ils les utilisent, tous réseaux sociaux confondus. Pour ce qui est du taux d’équipement des français en smartphones, en 2015 encore 34% de la population n’est équipé que d’un simple mobile et 8% n’ont pas du tout de téléphone portable. Si on prend les tablettes, seulement 35% des français en sont propriétaires, même si ce taux est en constante augmentation, les marges de progressions sont encore élevées. Enfin, le chiffre le plus consternant, encore 20% de la population française n’a pas accès à internet. Il s’agit là d’une bonne partie de l’explication du gouffre qu’il existe entre les salariés les plus performants dans un environnement complètement digitalisé et ceux qui sont en rupture avec l’outillage mis à leur disposition.

Parlons productivité, 67 % des actifs utilisent des outils informatiques professionnels (e-mail, Excel, PowerPoint, Word…) mais 63 % des utilisateurs déclarent perdre du temps du fait de leurs lacunes. Ces mêmes salariés sont confrontés régulièrement à des changements de leur environnement de travail souvent peu ou pas accompagné (mise à niveau de Windows ou de la suite Office, évolution de l’ERP, arrivée d’un nouveau CRM, déploiement de nouveaux ordinateurs ou de nouveaux matériels informatiques…) Selon une étude menée par Telecom École de Management auprès de 255 professionnels, 95,7% des individus passent par l’apprentissage digital informel ou autoformation. Il s’agit là d’une démarche volontaire, montrant un niveau de motivation élevé de la part de ceux qui la pratique, mais même là tout le monde n’est pas armé de la même manière pour trouver et exploiter la bonne information.

Le fossé se creuse donc tout de même entre ceux qui sont complètement opérationnels et suffisamment en maîtrise pour se débrouiller tout seul et le reste de la population. Cette rupture entre la population d’experts et celle des néophytes est génératrice d’écarts de performances importants. Car si l’on considère les difficultés à utiliser l’outillage de base tel qu’une simple suite bureautique, on peut comprendre qu’il soit difficile voir impossible pour les salariés les moins aguerris d’exploiter la force des outils disponibles gratuitement (Dropbox, Prezi, Evernote, …) et donc d’être plus productifs pour leur employeur.

Formation, oui mais comment ?

Les modèles d’accompagnement au changement sont très variés du plus traditionnel par de la formation présentielle en passant par les MOOC, le champ des possibles est vaste. Prenons par exemple la formation du top management, car oui ce n’est pas parce qu’on définit la stratégie et qu’on gère le business qu’il faut passer à côté de la révolution en cours, un modèle qui fait ses preuves dans pas mal de COMEX ou de CODIR est celui du « reverse mentoring« . Ce mode de formation a pour objectif de mettre en situation d’apprentissage l’équipe dirigeante avec pour formateurs de jeunes collaborateurs triés sur le volet et experts dans leur domaine qui vont accompagner leurs ainés dans la compréhension et l’utilisation des nouvelles technologies.

Si on sort de la sphère des « chefs à plumes », des solutions simples existent permettant de varier les modes d’apprentissage et de s’adapter au niveau des salariés. Autoriser, voir même financer, la participation à des MOOC sur le temps de travail, il s’agit d’une solution efficace et peu couteuse donnée à des salariés motivés pour monter en compétences mais qui n’ont pas forcément ni les moyens ni le temps nécessaire à la maison. Autre option, fournir un espace de discussion récurrent pendant lequel des présentations sur des sujets innovants ou liés au digital sont réalisées par les salariés passionnés ou experts pour les salariés débutants. Ces sessions pouvant prendre la forme de communautés de pratiques ou bien lors de « Brown Bag Lunch« .

Il existe ensuite des solutions plus élaborées qui permettent une appréhension pratique de nouvelles technologies et de nouveaux usages. Par exemple avec la création d’un Fab lab interne, cet espace d’idéation et de création regroupe un ensemble de technologies, de ressources et compétences permettant à tout un chacun de s’essayer à des outils et usages difficiles d’accès par ailleurs (imprimante 3d, ordinateurs puissants dotés de logiciels de conception, machines outils…) Un autre excellent moyen d’amener les collaborateurs à se confronter à de nouveaux usages consiste à concevoir ou à aménager vos locaux avec des solutions innovantes, ces nouveaux espaces de travail « à la Google » se développent de plus en plus en France. Les équipements que l’on peut retrouver dans ces bureaux innovants sont par exemple des salles de réunion entièrement équipées de solutions de visioconférence, d’espaces collaboratifs, de rétroprojection, de tableaux numériques ou d’écrans tactiles, des imprimantes à badge, … tout est ouvert.

Finalement, vous aurez compris qu’il n’est plus envisageable de laisser le collaborateur sur le bas côté dans votre projet de transformation. Au-delà de l’aspect évident de lutter plus facilement contre les résistances aux changements, il est surtout important que les entreprises soient moteur dans la montée en compétences digitales de la population, pour leur permettre de mieux appréhender les nouveaux usages et les nouvelles technologies. Par ailleurs, ces salariés sont aussi les clients, ils seront donc tout aussi déboussolés devant la kyrielle de technologies que vous leur proposerez. La fracture est nette à l’heure actuelle entre les catégories d’individus qui sont à l’aise dans un environnement digital et ceux qui sont complètement largués. Il y a bien sûr un problème de générations, mais pas seulement, il y a aussi de l’incompréhension voir de la résistance aux changements vis-à-vis de la nouveauté. Source de peurs, de légendes urbaines ou d’ignorance, le « 3.0 » doit être démystifié et simplifié pour que tout un chacun puisse le comprendre et se l’approprié, de l’ouvrier en passant par le cadre ou le dirigeant. Les dispositifs de formation et d’acculturation existent du plus simple au plus complexe, du moins cher au plus onéreux. C’est bien par là que cela commence et par là que les moyens doivent être mis en premier.