L’agence internationale de l’énergie (AIE), émanation autonome de l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE), a été créée en 1974 pour assurer la sécurité des approvisionnements en pétrole après le premier choc pétrolier. Pour vivre avec son temps, elle se penche depuis quelques années sur les minéraux critiques pour la transition énergétique. Une première étude de ce marché, pour l’année 2022, début 2023, est sortie ce 11 juillet.
Décarboner l’économie exige beaucoup de matières premières
« Les minéraux de transition énergétique, qui constituaient autrefois un petit segment du marché, occupent désormais le devant de la scène dans l’industrie minière et métallurgique », note le rapport de l’AIE. Batterie pour véhicules électriques, cellules photovoltaïques et éoliens portent la demande de minéraux, principalement de Lithium, Cobal et Nickel.
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En cinq ans, entre 2017 et 2022, la demande de lithium a triplé, celle du cobalt a augmenté de 70 %, pour le nickel c’est 40 %. Selon tous les scénarios de l’agence, cette demande ne va faire que croitre dans les années à venir. Pour les matériaux nécessaires à l’énergie propre, elle devrait augmenter jusqu’à trois fois et demie d’ici 2030. Face aux enjeux du réchauffement climatique, répondre à cette demande est capital.

La part de l’énergie propre dans la consommation de minéraux. Infographie : AIE
Dans son analyse l’AIE se permet une pointe d’optimisme. Le directeur exécutif de l’agence, Fatih Birol, juge encourageant la croissance du marché des matériaux critiques. Le rapport note que les investissements dans le secteur ont augmenté en moyenne de 30 % en 2022, plus que l’année précédente, « l’offre pourrait être suffisante pour soutenir les engagements climatiques nationaux annoncés par les gouvernements ».
L’optimisme affiché, ne cache pas des préoccupations importantes. L’approvisionnement n’est pas assuré et les marges de manœuvre sont étroites. Si tous les projets n’aboutissent pas en temps et en heure, ce qui n’est pas rare, le fragile équilibre entre offre et demande pourrait être remis en cause.
Une prise de conscience des enjeux d’approvisionnements en minéraux critiques
De même, les tensions sur la chaîne d’approvisionnement, notamment liées aux crispations géopolitiques sont à prendre en compte. « Il reste encore beaucoup à faire pour que les chaînes d’approvisionnement en minerais essentiels soient sûres et durables », souligne Fatih Birol. Les progrès de diversification existent, mais restent limités.
Pour l’extraction, le lithium vient surtout d’Australie et Chili, le Cobalt et le Nickel proviennent, de façon écrasante, respectivement de la République démocratique du Congo et d’Indonésie. La Chine, quant à elle domine l’extraction de terres rares, mais est surtout le plus grand centre de raffinage du monde. Pékin importe de fait de gros volumes de matières premières « souvent en provenance d’un petit nombre de sources » s’inquiète l’AIE.
Le texte constate la multiplication des politiques à travers le monde pour répondre à ce défi. L’Union européenne, par exemple, tient depuis 2011 une liste de « matières premières critiques » mise à jour tous les trois ans. Le lithium y a fait son apparition en 2020, dernière édition de la liste. Il y est précisé que l’UE « aurait besoin de 18 fois plus de lithium et de 5 fois plus de cobalt en 2030 » pour ses besoins en batteries. Si du lithium est présent en Europe, son traitement est réalisé ailleurs. Les entreprises concernées, comme Tesla, s’efforcent également de remonter dans la chaîne de valeur pour sécuriser leurs approvisionnements.
L’autre difficulté sur laquelle l’industrie doit rapidement se pencher est, ironiquement, l’impact environnemental de l’exploitation de ces minéraux. L’extraction de matière première est rarement indolore pour la nature. L’AIE pointe que ses émissions de gaz à effet de serre sont élevées et stagnent. Les prélèvements en eau du secteur ont eux quasiment doublé entre 2018 et 2021.
L’AIE va organiser à Paris, fin septembre, un sommet sur les minéraux essentiels et l’énergie propre, afin de réunir gouvernements, entreprises et autres parties prenantes pour réfléchir à l’enjeu de l’explosion de la demande de matériaux critiques.