En termes de capitalisation boursière, ASML (Advanced Semiconductor Materials Lithography) est la première entreprise technologique européenne. Elle subit pourtant de plein fouet la rivalité géopolitique entre les États-Unis et la Chine. Son PDG, Peter Wennink, a publiquement exprimé ses craintes pour la sécurité du groupe.

« Devons-nous être très sensibilisés à la fuite de savoir-faire, à la fuite de propriété intellectuelle ? Plus que jamais. » Cette question rhétorique de Peter Wennink, publié dans le Financial Times suite à un entretien manifeste l’inquiétude du PDG. L’homme a d’ores et déjà annoncé une croissance à deux chiffres du budget sécurité, en particulier sur les questions de cybersécurité. Des milliers d’événements par an sont redoutés.

Fin février ASML révélait déjà être victime d’un de données par un ancien employé chinois. La piste d’une responsabilité de Pékin est déjà privilégiée par l’enquête, toujours en court. Et lorsque Peter Wennink affiche ses préoccupations, c’est bien à la Chine qu’il pense.

L’entreprise de Veldhoven, dans la banlieue de Eindhoven, est célèbre pour son monopole sur les systèmes de lithographie les plus perfectionnés du marché. Ces machines, coûtant généralement plus de 100 millions d’euros, sont utilisées pour fabriquer les semi-conducteurs les plus avancés au monde.

ASML se plie sans enthousiasme aux restrictions d’exportations vers la Chine

Suite à une exigence américaine en 2019, ASML ne vendait déjà pas son matériel le plus performant, la lithographie extrême ultraviolet (EUV). Pour accentuer la pression sur la Chine, les États-Unis ont lancé une nouvelle vague de limitation des exportations de produits liés aux semi-conducteurs à laquelle ils ont rallié le Japon et les Pays-Bas, donc ASML.

La Chine représentait encore 18 % du chiffre d’affaires de l’entreprise néerlandaise, mais l’accord de son gouvernement avec Washington va probablement changer la donne. Même des machines moins perfectionnées ne pourront plus être exportées.

Alors que le jeu diplomatique se déroulait en coulisse entre les États-Unis et les Pays-Bas au cours de l’année 2022, Peter Wennink avait exprimé sa désapprobation. Au-delà de sa volonté de ne pas voir son entreprise piégée au milieu de considération géopolitique, il avait avancé que la Chine trouverait un moyen de rattraper son retard technologique.

S’il ne mentionnait pas le vol de propriété intellectuelle directement à l’époque, il ne s’en prive plus désormais. Manifestement toujours en désaccord avec les sanctions à l’encontre avec la Chine, il a déclaré au Financial Times, « Si vous risquez d'être coupé du monde, il est évident que vous le feriez vous-même ».