L’interdiction de TikTok aux États-Unis n’a jamais été aussi proche. Un projet de loi qui permettrait au secrétaire au Commerce d’interdire les applications qui présentent un risque pour la sécurité nationale du pays vient d’être présenté au Sénat. La législation a reçu le soutien officiel de la Maison Blanche.

TikTok est considérée comme une menace pour la sécurité nationale du pays

Malgré son immense succès, l’étau se resserre autour de TikTok outre-Atlantique. Les autorités du pays suspectent sa maison-mère, ByteDance, d’être liée au gouvernement chinois et de livrer, entre autres, les données de ses utilisateurs américains à ce dernier.

Depuis plusieurs années déjà, TikTok dément ces allégations et tente de convaincre Washington de sa bonne volonté. L’entreprise est en pourparlers avec le Comité pour l’investissement étranger (CFIUS) pour trouver une solution convenant à chacune des parties pour que l’application puisse continuer d’opérer aux États-Unis. Il y a peu, elle a également présenté un vaste projet visant à transférer les données des Américains de TikTok à Oracle. Elle assure, en outre, qu’elle serait prête à dévoiler son algorithme aux autorités du pays pour plus de transparence.

Ces efforts semblent vains. Le RESTRICT Act, projet de loi bipartisan mené par le sénateur démocrate Mark Warner, vient d’être présenté devant le Sénat, tandis que la Maison Blanche exhorte le Congrès à l’adopter « rapidement ». Il s’agit de la première fois qu’un projet de loi sur TikTok au Congrès reçoit le soutien explicite de l’administration Biden, rapporte CNBC.

Le Capitole des États-Unis.

Photographie : Don Shin / Unsplash.

Que prévoit le RESTRICT Act ?

Concrètement, le texte permettrait au département du Commerce d’examiner les accords, les mises à jour de logiciels ou les transferts de données par les technologies de l’information et de la communication dans lesquels un adversaire étranger a un intérêt. Si le secrétaire au Commerce estime qu’une transaction présente un « risque excessif ou inacceptable » pour la sécurité nationale des États-Unis, le président peut être saisi pour prendre des mesures pouvant aller jusqu’au désinvestissement forcé.

Cette législation fait suite à un autre texte présenté à la Chambre des représentants il y a quelques jours, baptisé DATA Act. Ce dernier permettrait au président Joe Biden de sanctionner ou d’interdire TikTok si l’administration déterminait que la plateforme partageait des données d’utilisateurs américains avec des personnes associées au gouvernement chinois.

Le RESTRICT Act est différent : il crée un cadre permettant d’évaluer et de sanctionner les entreprises étrangères qui représentent un risque, plutôt que de cibler uniquement TikTok. Le texte vise les groupes situés dans des pays considérés comme hostiles aux États-Unis, à savoir la Chine, Cuba, l’Iran, la Corée du Nord, la Russie et le Venezuela, à condition qu’ils aient accès aux « données personnelles sensibles » de plus d’un million de citoyens américains.

« Aujourd’hui, la menace dont tout le monde parle est TikTok, et la façon dont elle pourrait permettre la surveillance par le Parti communiste chinois, ou faciliter la diffusion de campagnes d’influence malveillantes aux États-Unis. Avant TikTok, cependant, c’était Huawei et ZTE, qui menaçaient les réseaux de télécommunications de notre pays. Nous avons besoin d’une approche globale, basée sur les risques, qui s’attaque de manière proactive aux sources de technologies potentiellement dangereuses avant qu’elles ne s’implantent en Amérique, afin que nous ne jouions pas à la baballe et que nous n’ayons pas à nous démener pour les rattraper une fois qu’elles sont déjà omniprésentes », explique Mark Warner.

« Il est essentiel de renforcer notre capacité à traiter les risques discrets posés par des transactions individuelles et les risques systémiques posés par certaines catégories de transactions impliquant des pays préoccupants dans des secteurs technologiques sensibles », assure, de son côté, Jake Sullivan, conseiller à la sécurité nationale de la Maison Blanche.

TikTok invoque la liberté d’expression

« L’interdiction de TikTok par les États-Unis revient à interdire l’exportation de la culture et des valeurs américaines vers le milliard de personnes qui utilisent notre service dans le monde entier. Nous espérons que le Congrès explorera des solutions à ses préoccupations en matière de sécurité nationale qui n’auront pas pour effet de censurer les voix de millions d’Américains », se défend TikTok. L’entreprise rappelle, en outre, qu’elle a mis au point un accord avec le CFIUS et demande au gouvernement de l’approuver.

Dans le même temps, TikTok est également ciblée par d’autres pays occidentaux. Reflétant une mesure prise aux États-Unis en décembre dernier, le Canada, ainsi que la Commission et le Parlement européen ont interdit l’application sur les appareils gouvernementaux.

Shou Zi Chew, le PDG de TikTok, doit témoigner devant le Congrès des États-Unis prochainement, reste à voir s’il sera en mesure de convaincre des élus qui semblent particulièrement suspicieux à l’encontre de la plateforme.