TikTok est subjuguée par la décision de la Commission européenne de supprimer l’application sur tous les appareils gouvernementaux. Le réseau social chinois assure ne pas avoir été mis au courant d’une telle mesure au préalable, et considère cette manière de faire comme « non européenne ».

L’UE emboîte le pas aux États-Unis

Ce 23 février, la Commission européenne a demandé à tout son personnel de supprimer TikTok de leurs appareils professionnels, une semaine après que les Pays-Bas aient ordonné à leurs autorités publiques de se tenir à l’écart de l’application. Cette décision résonne avec une mesure prise aux États-Unis fin 2022, lorsque tous les employés gouvernementaux ont, eux aussi, reçu la consigne de désinstaller la plateforme.

Les Occidentaux dénoncent le lien de ByteDance, la maison mère de TikTok, avec Pékin, et accusent l’application d’espionner ses utilisateurs américains et européens et de diffuser de la propagande sur la plateforme. Si les États-Unis se sont montrés bien plus véhéments à l’égard de TikTok, les Européens, depuis quelques semaines, s’en méfient de plus en plus.

« Ce n’est bien sûr pas un secret que nous sommes soumis à une menace accrue en matière de cybersécurité, et que nous devrions donc prendre des mesures pour éviter tout à l’avenir », s’est justifié, le commissaire Johannes Hahn, qui supervise le conseil d’administration de l’Union européenne (UE).

TikTok n’a pas été informée, selon l’un de ses dirigeants

Theo Bertram, vice-président de TikTok chargé de la politique publique européenne, s’est montré particulièrement choqué de la décision de l’UE, rapporte le média Bloomberg. Les dirigeants du réseau social l’ont appris via les médias : la Commission n’a pas contacté TikTok au préalable pour lui faire part de ses préoccupations, assure-t-il.

« Nous ne leur avons jamais parlé. Ils ne nous ont jamais demandé notre avis, alors c’est une surprise. Normalement, nous devrions nous attendre à un certain engagement et à une certaine capacité à comprendre ce qui nous est reproché, quelles sont les preuves, pour y répondre. Et, dans ce cas, nous n’avons rien eu de tout cela », a-t-il expliqué. Par exemple, dans le cas des États-Unis, TikTok est en discussion avec le gouvernement depuis plusieurs mois pour trouver un arrangement, et l’application connaît le risque qu’elle encourt.

TikTok est d’autant plus ahurie que son PDG, Shou Zi Chew, s’est rendu à Bruxelles le mois dernier et n’a pas été mis au courant d’une telle mesure. Par ailleurs, l’entreprise vient d’annoncer l’ouverture d’un second centre de données en Irlande, afin de stocker les données des utilisateurs européens sur leur territoire et ainsi rassurer les autorités. « Ils ne nous ont jamais donné l’impression que c’était quelque chose qui était envisagé. Ne pas nous dire quel est le processus, c’est une démarche non européenne », continue Bertram.

De plus en plus de suspicions à l’encontre de l’application

Les suspicions de l’UE à l’encontre de TikTok ont notamment été accentuées par le fait que des employés de ByteDance ont accédé aux données personnelles de journalistes, et que le personnel chinois de TikTok a admis avoir accès aux informations d’utilisateurs européens. Récemment, Thierry Breton, le commissaire européen au marché intérieur, a haussé le ton face à la plateforme, en lui indiquant que l’UE n’hésiterait pas à l’interdire si elle ne respectait pas le Digital Services Act, qui entrera en vigueur prochainement.

La vice-présidente de la Commission européenne, Margrethe Vestager, s’est montrée plus prudente en affirmant, ce mois de février, qu’une telle mesure n’était « pas sur la table ». De son côté, TikTok a écrit au service compétent de la Commission, mais n’a pas trouvé d’interlocuteur.