Alors que l’entrée en vigueur du Digital Services Act (DSA), règlement européen pour limiter la diffusion de contenus illicites en ligne – entre autres – approche, et les grandes plateformes sociales commencent à s’adapter pour répondre aux nouvelles exigences. La Commission européenne a notamment demandé aux géants comme Facebook, TikTok ou Twitter de fournir un rapport sur leurs moyens mis en place pour garantir l’application du code de pratique 2022 sur la désinformation, la charte contre les fausses informations de l’Union européenne. Parmi la douzaine d’entreprises concernées, seule Twitter n’est pas parvenue à rendre un dossier complet.

Le réseau social est connu pour être un berceau de la propagande pro-russe dans le cadre de la guerre en Ukraine. Un enjeu de taille tandis que Volodymyr Zelensky, président ukrainien, indiquait, à Bruxelles ce 9 février, apprécier la lutte contre la désinformation.

Les géants de la tech doivent coopérer

Les très grandes plateformes en ligne, qui recensent au moins 45 millions d’utilisateurs actifs mensuels, ont été appelées à partager de nombreuses données détaillées sur la manière dont elles traitent les fausses informations et les ingérences étrangères. Si la quasi-totalité d’entre elles ont montré patte blanche, le rapport de Twitter s’est révélé incomplet, dépourvu de renseignements sur ses plans de collaboration avec les organismes de vérification des faits.

En outre, il leur était prié d’expliquer comment elles détectent les campagnes de manipulation étrangères et les arrêtent ; la façon dont elles réduisent la rémunération des acteurs à l’origine de ces actions ; comment elles précisent qu’une publicité est politique et laissent les chercheurs accéder à leurs données. Ces dernières doivent être rapportées pour les 27 pays qui composent l’Union européenne.

« Je suis déçue de voir que le rapport de Twitter est à la traîne comparé aux autres », a déclaré Věra Jourová, vice-présidente de la Commission européenne pour les valeurs et la transparence, relayée par Politico. Elle attend « un engagement plus sérieux vis-à-vis de leurs obligations découlant du code ».

Les licenciements de Twitter mis en cause

Pour Thierry Breton, le commissaire européen au marché intérieur, « il n’est pas surprenant que le degré de qualité varie fortement en fonction des ressources que les entreprises ont allouées à ce projet ». Une grande partie des employés de Twitter s’occupant des questions de confiance et de sécurité ont été licenciés.

Début décembre, Thierry Breton s’était entretenu avec Elon Musk, affirmant que l’Europe serait intransigeante si le réseau social ne respectait pas le DSA. « Il y a encore un énorme travail à faire, car Twitter devra mettre en œuvre des politiques d’utilisation transparentes, renforcer considérablement la modération des contenus et protéger la liberté d’expression, s’attaquer à la désinformation avec détermination et limiter la publicité ciblée », soulignait-il.

Dès septembre 2023, les grandes plateformes en ligne seront sujettes à des enquêtes du régulateur européen. Elles devront prouver qu’elles disposent de modérateurs en Europe pour surveiller le contenu et limiter la diffusion de désinformation. Elles seront également amenées à ouvrir leurs algorithmes. Auquel cas, elles risquent des amendes montant jusqu’à 6 % de leur chiffre d’affaires annuel et une interdiction d’exercice sur le territoire européen.

Le problème russe

Dans un discours tenu le 7 février, Josep Borell, vice-président de la Commission européenne, mettait en avant la nécessité de recherches plus approfondies sur la manière dont les réseaux sociaux sont instrumentalisés pour diffuser la propagande de Moscou. « Nous devons étudier comment elle circule, d’où elle vient et quels en sont les résultats », alertait-il.

Twitter est notamment dans la ligne de mire des autorités européennes depuis l’annonce de la fin de l’accès gratuit à son API. D’après eux, cette décision pourrait limiter les recherches des chercheurs sur la désinformation, alors que l’endoctrinement russe grandit sur la plateforme. « Nous avons besoin de plus de transparence et de responsabilité, pas de moins », plaidait Josep Borell, avant d’annoncer que l’Union européenne allait créer une ressource centrale pour recueillir des informations sur les menaces de désinformation et promouvoir le partage des renseignements.