Les États-Unis et l’Inde ont officiellement annoncé le 31 janvier 2023, le lancement d’un nouveau partenariat stratégique. « L’initiative de haut niveau sur la défense et les technologies émergentes » aura pour objectif d’encourager la production conjointe d’équipements militaires et de composants électroniques. Les relations des deux pays avec la Chine semblent être au centre de cet accord technologique.

L’Inde cherche à mettre des bâtons dans les roues de la Chine

D’après le Financial Times, le conseiller à la sécurité nationale des États-Unis, Jake Sullivan, a récemment accueilli son homologue indien Ajit Doval à la Maison-Blanche dans le but de lancer cette initiative. Selon le haut responsable américain, « cet accord servirait les intérêts stratégiques plus profonds des deux pays ». Au centre de cette initiative se trouve la Chine avec laquelle les deux pays sont en conflit.

Depuis son indépendance, l’Inde a des litiges frontaliers avec la Chine. Litiges ayant donné lieu à une guerre en 1962 et réglée par un cessez-le-feu fragile. Ces dernières années, des affrontements se produisent sporadiquement dans la région de l’Himalaya, toujours en lien avec la question non résolue de la position de la frontière entre les deux pays. Dans ce contexte, l’Inde a décidé d’écarter Huawei et ZTE de son réseau 5G, ou d’interdire de nombreuses applications d’entreprises chinoises, dont TikTok.

La Chine reste malgré tout le premier partenaire commercial du sous-continent. New Delhi a également rejoint, en 2017, l’Organisation de coopération de Shanghai, créée à l’initiative de la Russie et où la Chine occupe une place centrale. Il n’empêche, l’Inde souhaite réduire sa dépendance envers son puissant voisin. Comme l’indique Jake Sullivan, « le contexte de la concurrence géopolitique avec la Chine est une caractéristique des relations américano-indiennes depuis plus d’une décennie ».

Avec Moscou, la position de l’Inde est plus ambiguë. Fidèle à une position héritée de la guerre froide, les non-alignés, New Delhi conserve une certaine proximité avec la Russie. L’invasion de l’Ukraine n’a, par exemple, pas été officiellement dénoncée par le gouvernement de Narendra Modi. La Russie a également longtemps été le premier fournisseur d’armement de la plus grande démocratie du monde. Une position ravie par la France en 2022.

Les États-Unis ont trouvé leur eldorado pour stimuler son duel face à la Chine

Dans un contexte géopolitique mondial tendu, Washington tente d’en profiter pour se rapprocher de l’Inde. Les deux pays collaborent déjà dans le domaine de la 5G et du spatial, mais vont élargir leurs partenariats dans des secteurs de pointe : semi-conducteurs, aéronautique, informatique quantique et intelligence artificielle. Plusieurs entreprises américaines auront ainsi la possibilité de s’implanter sur le territoire indien pour fournir plus facilement les entreprises indiennes avec lesquelles elles sont liées.

Le projet moteur à réaction de General Electric est un exemple probant. Le conglomérat américain aimerait alimenter des avions produits et exploités par l’Inde. Avec la signature de cet accord entre les deux pays, l’ensemble des moteurs pourraient être fabriqués en Inde, ce qui permettrait une belle retombée économique pour le pays.

La puissance acquise par la Chine ces dernières décennies constitue le dénominateur commun entre Washington et New Delhi. La coopération des deux pays vise à contrer l’influence de Pékin. L’Inde peut, par exemple, constituer une terre d’investissement alternative pour les géants américains cherchant à diversifier leur chaîne d’approvisionnement.

L’exemple le plus parlant est celui d’Apple. Si initialement, la Chine était le partenaire privilégié de l’entreprise pour la production de ses appareils, l‘iPhone 14 a été en partie produit en Inde. La marque à la Pomme affirme que 25 % de sa production devrait y être transférée d’ici 2025, la firme de Cupertino incitant son principal sous-traitant, le Taïwanais Foxconn, à investir en Inde.

Dans les prochains mois, les acteurs indiens et américains du secteur des semi-conducteurs travailleront ensemble afin d’identifier des axes d’investissements conjoints. Depuis l’an dernier, l’Inde tente de mettre en place une véritable industrie de semi-conducteurs. Avec la signature de cet accord, l’Administration Biden invite le Congrès à abolir certaines restrictions qui empêchent actuellement l’exportation de technologies performantes vers l’Inde.